Les efforts de Rona pour relancer ses ventes et améliorer ses marges tardent à donner des résultats. La situation est telle qu’il serait étonnant que Lowe's soit autant intéressée à acquérir l’entreprise québécoise, selon un analyste de Valeurs mobilières Desjardins.
«Les résultats financiers sont si mauvais que nous réduisons les probabilités que Lowe’s achète l’entreprise à 30 % (de 60%)», écrit l’analyste Ketih Howlett. Et si une transaction devait avoir lieu, ce serait à un prix révisé à la baisse.»
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Ce n’est pas que le quincailler n’a pas tenté de renverser la vapeur. Depuis un an, il a lancé une application mobile et un nouveau site Internet. Il a recruté 1,3 million d’abonnés pour son bulletin par courriel. Il a fait du ménage en fermant quatre grandes surfaces et en vendant 11 M$ d’actifs non stratégiques. Il a aussi signé de nouveaux baux, a recruté des marchands et a ouvert des magasins satellites et de proximité. Il a acquis trois entreprises, a agrandi deux centres de distribution et nommé une nouvelle équipe de soutien aux marchands.
Mais ses résultats demeurent décevants.
Les ventes des magasins comparables, au cours de son troisième trimestre terminé le 28 septembre, ont reculé de 1%. Les revenus ont chuté de 0,8 % et la marge brute a diminué de 1,18 point pour atteindre 26,9 %. Quant au bénéfice net par action (avant éléments inhabituels et non récurrents), il s’établit à 0,27 $, alors que les analystes espéraient plutôt qu’il touche les 0,40 $. Si la valeur du panier moyen demeure « forte », l’achalandage dans les magasins décline.
La direction de Rona n’a pas nié les faits. « Après avoir atteint, pendant quatre trimestres consécutifs, des résultats conformes à ses trois priorités financières, soit l'amélioration de l'efficacité, l'optimisation de la structure de capital et la croissance du rendement du capital, [nous avons vu notre] progression interrompue », a-t-on déclaré dans un communiqué.
Selon le président et chef de la direction, Robert Dutton, « l'ensemble du secteur canadien de la quincaillerie-rénovation » a subi un recul au cours du dernier trimestre. L’industrie de la rénovation traverse même sa pire période depuis les années 30, a-t-il mentionné au cours d’une conférence téléphonique avec les analystes du secteur, hier.
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Le travail continue
Rona assure qu’il continuera de réagir et de prendre les initiatives qui s’imposent dans les circonstances. En entrevue avec Les Affaires, Dominique Boies, premier vice-président et chef de la direction financière, a mentionné que ces actions se concentrent « sur trois fronts » : marge brute/marchandisage, opérations de détail et dépenses administratives/efficacité.
« On regarde de quelle manière on pourrait consolider nos achats auprès d’un moins grand nombre de fournisseurs pour augmenter notre pouvoir de négociation et obtenir des rabais-volume, ou comment on pourrait réduire le nombre de produits offerts », a-t-il donné en exemple.
Rona va aussi déterminer « si certaines tâches se dédoublent, si certains département ont trop grossi et comment on pourrait bénéficier de l’automatisation de certaines tâches », compte tenu des investissements de 40 - 50 M$ par années en TI.
En magasin, on veut « s’assurer que les employés ne remplissent pas les tablettes quand il y a des clients à servir ». L’objectif n’est pas d’abolir des emplois, a précisé M. Boies qui espère profiter de ces actions quand « l’environnement redeviendra positif ».
Plus de « non » que de « oui »
Dans un long communiqué divulgué avant l’ouverture des marchés, Rona fait état de toutes les initiatives réalisées depuis le début de l’année. Elles sont résumées en 27 points regroupés en sept catégories. L’entreprise de Boucherville a aussi pris soin d’élaborer un tableau dans lequel on précise si les 11 « priorités » ont été ou non réalisées. Au troisième trimestre, trois l’ont été. Au cours des quatre trimestres précédents, l’entreprise avait accompli 100 % du travail.
Les coupables : « une rapide détérioration des conditions de marché et un changement dans la composition de nos ventes en faveur des produits à plus faibles marges », a indiqué Dominique Boies. En d’autres termes, les entrepreneurs en construction sont plus nombreux (+3% par rapport à l’an dernier) et ceux-ci achètent des biens moins rentables.
Fidèle à son habitude, Robert Dutton a répété au cours de l’appel conférence que son plan d’action baptisé «Nouvelles réalités, nouvelles solutions» est le bon, et qu’il va poursuivre sa mise en place avec « discipline ».
Il a soutenu que les petits magasins de proximité connaissent des résultats « supérieurs aux attentes » et que c’est la voie de l’avenir pour le quincailler. « Il faut revoir notre porte-folio de magasins », a dit le dirigeant, qui n’était pas disponible pour accorder d’entrevues mercredi. D’ailleurs, deux autres grandes surfaces seront fermées d’ici la fin de l’année, pour un total de cinq en 2012. Et six baux ont été signés « pour le redéploiement du volume des ventes des magasins à grande surface vers des magasins de proximité et satellites ». Aucune grande surface ne sera fermée au Québec.
Peu optimiste pour 2013, Dominique Boies dit ne pas voir « beaucoup de catalyseurs pour améliorer la confiance des consommateurs » et qu’il y a « beaucoup de choses » qu’il ne peut contrôler. À quel moment pense-t-il voir la lumière au bout du tunnel ? « C’est difficile à prévoir », répond-t-il.