Les firmes face à des attentes nouvelles de leurs employés

Offert par Les Affaires


Édition du 06 Mai 2017

Les firmes face à des attentes nouvelles de leurs employés

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Édition du 06 Mai 2017

« Ils [les employés qui quittent les grands cabinets] cherchent le 9 à 5, moins de travail ou des défis différents. Certains préfèrent travailler pour un seul client plutôt que d’en suivre plusieurs. » — Michael ­Newton, associé directeur de ­ Fuller ­Lan

Vieillissement des CPA, féminisation, départ de certains talents vers le monde des entreprises, diversification des profils. Les firmes comptables doivent affronter plusieurs enjeux dans la gestion de leur main-d'oeuvre, ce qui les pousse à se renouveler.

Fleurissent ici et là de petits cabinets fondés par d'anciens CPA de grandes firmes comptables. C'est le cas, par exemple, d'Hébert-Marsolais, à Longueuil, qui compte aujourd'hui trois associés issus du même cabinet où ils ont commencé leur carrière. À 30 ans, Julie Hébert n'était pas totalement satisfaite de sa vie. «Je travaillais tout le temps !» se souvient-elle. Après avoir exercé son métier à son compte et seule, elle a fondé le cabinet Hébert-Marsolais début 2016 avec un ancien collègue. Puis, une troisième CPA du même cabinet s'est récemment jointe à eux.

Aujourd'hui, Julie Hébert a 40 ans et travaille toujours beaucoup. «Cependant, mes horaires sont plus souples. Je peux m'organiser comme je veux», affirme-t-elle. Sans compter la satisfaction d'avoir créé une activité propre.

Les grands cabinets en conviennent : leur activité n'est pas faite pour tous. Bon an mal an, ils estiment qu'ils perdent de 5 à 10 % de leurs employés, qui partent souvent comme travailleurs autonomes ou dans des entreprises. «Ils cherchent le 9 à 5, moins de travail ou des défis différents», avance Michael Newton, associé directeur de Fuller Landau. «Certains préfèrent travailler pour un seul client plutôt que d'en suivre plusieurs», ajoute Emilio Imbriglio, président et chef de la direction de Raymond Chabot Grant Thornton.

Adaptation aux milléniaux

Avec l'arrivée des milléniaux dans les effectifs et la féminisation de la profession - 51 % des nouveaux étudiants en comptabilité à l'université sont des femmes -, l'enjeu de la conciliation travail-famille prend une nouvelle tournure. «Les jeunes générations ne sont pas fainéantes comme on a parfois tendance à le dire, mais il faut réussir à les toucher dans ce qui est important pour elles. La qualité de vie et l'empreinte dans leur milieu sont des préoccupations pour elles. On essaie donc de trouver un équilibre quant à l'habitude de travailler selon le principe des heures facturables. On réfléchit à des modes de facturation qui seraient plus axés sur le produit que sur le nombre d'heures. Par exemple, si un client a plusieurs services avec nous, on pourrait lui faire un prix fixe», explique Michael Newton.

«L'arrivée des nouvelles générations dans le cabinet amène une culture jeune et demande quelques ajustements, reconnaît Martin Bernier, associé et leader en certification pour PricewaterhouseCoopers (PwC). On facilite le télétravail, qui est prisé par les jeunes, on a prévu des congés de paternité, on a réduit les délais des promotions pour donner aux milléniaux des perspectives d'évolution, etc.»

L'enjeu est d'autant plus pressant que de nombreux CPA s'approchent de la retraite, laissant rapidement place à une nouvelle génération. La moyenne d'âge des membres de l'Ordre des CPA est de 47 ans, et plus de la moitié d'entre eux ont plus de 45 ans. Tous les cabinets nomment de jeunes associés pour remplacer ceux qui partent.

Profils multiples

La profession va aussi sûrement changer un peu de visage car, avec le vieillissement des CPA, il se pourrait qu'un plus grand nombre d'étrangers viennent remplacer les retraités. «On sait que, malgré le succès de la filière auprès des étudiants, les universités n'arriveront pas à fournir assez de candidats pour remplacer tous les baby-boomers. On doit donc se tourner vers de nouveaux profils, notamment pour intégrer les professionnels formés à l'étranger», constate Geneviève Mottard, présidente et chef de la direction de l'Ordre des CPA. Conscient des enjeux de reconnaissance des diplômes, l'Ordre réfléchit même à la possibilité de permettre à des étrangers, qui ne pourraient obtenir le titre de CPA sans refaire de longs compléments d'études, d'occuper des postes intermédiaires dont les tâches comptables n'exigent pas d'avoir le titre.

Les cabinets sont prêts à accueillir ces nouveaux profils. Avec la diversification des services, notamment en technologies, des employés d'un tout nouveau genre se sont installés dans les bureaux des grandes firmes depuis quelques années. Par exemple, vu le développement du service de cybersécurité, il ne s'agissait plus de recruter des CPA, mais des ingénieurs informatiques, des geeks et même des... hackers ! «On a des mandats d'attaque des sites de nos clients pour déceler leurs faiblesses», explique Marco Perron, associé et chef de la direction de RCGT Consulting.

Le changement d'ambiance est radical, loin de l'atmosphère feutrée des bureaux de comptables, des tailleurs et des costumes sombres. «Ici, on a des employés qui arrivent en gougounes, un frigo de bière dans le bureau et des avions en papier qui volent», lance Marco Perron avec un sourire.

Michael Newton voit un enrichissement dans cette diversification des profils. «Ça change la dynamique du milieu des CPA, traditionnellement conservateur. Cette nouveauté dans l'approche nous permet d'être à l'avant-garde plutôt que de vivre comme hier.»

51%

C'est la proportion de femmes parmi les nouveaux étudiants en comptabilité à l'université.

http://www.lesaffaires.com/dossier/les-cabinets-comptables-a-la-croisee-des-chemins

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