Les minières doivent (beaucoup) mieux communiquer

Publié le 18/05/2023 à 13:45

Les minières doivent (beaucoup) mieux communiquer

Publié le 18/05/2023 à 13:45

«Comme je l’ai souligné précédemment, les images négatives des mines persistent. Elles viennent d’une époque où les pratiques étaient radicalement différentes de celles d‘aujourd’hui. Des procédés (et des idéologies) qui n’ont plus leur place aujourd’hui.» (Photo: 123RF)

EXPERT INVITÉ. L’Institut canadien des mines, de la métallurgie et du pétrole (ICM) tenait dernièrement son congrès annuel à Montréal sur le thème «Bâtir la confiance pour décarboner le monde». L’événement marquait également le 125e anniversaire de fondation de l’organisation.

J’ai eu le privilège de participer à un panel sur les relations entre l’industrie minière et les médias, qui était organisé par le YMP (Young Mining Professionals). Je vous partage (humblement) quelques-unes de mes réflexions et observations!

D’entrée de jeu, nombreux sont les observateurs qui constatent que l’image publique de l’industrie minière est souvent négative. Les causes sont multiples, mais tout n’est pas perdu, loin de là.

Voici quelques pistes qui pourraient améliorer la situation et permettre à l’industrie de mieux communiquer pour être mieux comprise.

 

Parlez de vos engagements ESG

L’un des points d’ancrage d’une «discussion» avec les médias réside certainement dans les engagements ESG (environnement, social, gouvernance) que prennent les entreprises. Ces préoccupations sont toutefois récentes sur les écrans radars.

Une étude de PwC révélait l’an dernier que 57% des compagnies canadiennes ne divulguent pas encore leurs mesures ESG.

Et on peut le comprendre…

Le processus est exigeant puisqu’il ouvre souvent la voie à une reddition de comptes aux parties prenantes de l’organisation: les actionnaires, les employés, les clients, les fournisseurs, les gouvernements et, bien évidemment, les médias.

Mais les bilans annuels ESG s’avèrent fort utiles lorsqu’on les prépare bien. Et tout porte à croire qu’ils deviendront pratiquement indispensables pour engager un vrai dialogue avec les publics concernés, médias inclus évidemment.

 

Soyez à l’écoute des populations

Une autre mesure pour amorcer un dialogue constructif avec les médias est d’être à l’écoute des préoccupations des populations directement impactées par l’activité de l’entreprise.

Dans le monde minier, l’histoire débute souvent avant même que la mine existe. Les activités d’exploration et de forage intéressent les communautés et soulèvent aussi beaucoup de questionnement.

Elles doivent être documentées et vulgarisées afin de répondre aux questions et aux inquiétudes qu’elles soulèvent auprès des populations concernées.

L’intérêt récent des médias pour la hausse des claims miniers au cours des deux dernières années au Québec (plus de 65%) constitue un bon exemple de ce phénomène.

 

Soyez proactif, et non pas réactif

L’univers médiatique évolue, il change rapidement. Pendant de nombreuses années, les institutions et les organisations d’une société constituaient des sujets d’intérêt, des objets auxquels pouvaient s’intéresser les médias pour toutes sortes de raisons.

Or, l’arrivée des médias sociaux, les développements technologiques et la prolifération des sources d’information changent radicalement la donne.

Chaque organisation, chaque individu peut aujourd’hui amorcer directement des discussions avec des auditoires plus ou moins restreints. Chacun peut maintenant publier des messages, raconter une histoire et devenir en quelque sorte un média.

Ce nouvel environnement de la communication oblige les entreprises — surtout celles dont les activités sont sensibles — à devenir proactives à l’égard des médias et de certains publics cibles.

La leçon est limpide: n’attendez pas qu’on s’intéresse à vous! Prenez une longueur d’avance. Proposez des histoires qui intéresseront des auditoires. Encore mieux: proposez VOTRE histoire!

 

Soyez conscient de votre pertinence

Dans la même veine, l’industrie minière doit se convaincre elle-même de l’intérêt de son discours.

Les mines d’aujourd’hui, en grande majorité, sont à mille lieues des tristes et dures réalités qui ont marqué le passé, laissé des cicatrices et inspiré les Émile Zola (Germinal) ou Charles Dickens (Hard Times) de ce monde.

Malheureusement, la perception de ce qu’est une mine semble figée dans le passé, sans parler de la mauvaise presse et des points négatifs.

Les mines d’aujourd’hui ont tout intérêt à dévoiler ce qu’elles sont devenues.

C’est-à-dire des milieux de recherche et de travail utilisant les technologies de pointe, des sources d’emplois sécuritaires, gratifiants et bien rémunérés, des endroits où plusieurs sciences environnementales trouvent leurs applications.

Et ce n’est pas terminé.

Avec les défis reliés à la décarbonation de la planète, les exploitants de minéraux critiques et stratégiques deviennent la bougie d’allumage de nouvelles industries.

On parle ici des fabricants de véhicules électriques, des manufacturiers d’éoliennes et de panneaux solaires en passant par des constructeurs d’édifices LEED et des designers de mobilier urbain.

 

Ayez un dialogue direct avec les influenceurs

Comme je l’ai souligné précédemment, les images négatives des mines persistent. Elles viennent d’une époque où les pratiques étaient radicalement différentes de celles d’aujourd’hui. Des procédés (et des idéologies) qui n’ont plus leur place aujourd’hui.

L’industrie minière est fort consciente de ce fossé et elle modifie continuellement ses vieux parcours, ses vieilles façons de faire.

J’ai abordé dans ce blogue trois pistes de solutions pour corriger situation: les engagements ESG, l’écoute des populations et la proactivité à communiquer.

L’autre façon de modifier les perceptions — c’est ma dernière suggestion! — réside probablement dans un dialogue direct avec les influenceurs.

J’ai souvent constaté que plusieurs critiques des mines n’y avaient jamais mis les pieds.

Ils n’avaient jamais visité une région minière. Et ils semblaient peu conscients du caractère indispensable des minéraux dans nos vies, et ce, de l’imposante infrastructure urbaine jusqu’à la salle de chirurgie la plus sophistiquée.

Dans cette perspective, l’image (et la conduite) de l’industrie devient presque une responsabilité collective.

Comme vous le voyez, à l’heure de la décarbonation, les mines ont de belles et de grandes histoires à raconter!

À propos de ce blogue

Le regard d'un spécialiste du secteur minier au Québec auprès de l’industrie, des gouvernements et du grand public. Maxime Guilbault est associé au sein du groupe de Certification chez PwC Canada et leader du groupe Mines et Métaux pour le Québec. Au cours des 15 dernières années, il s’est spécialisé dans la prestation de services aux clients du secteur minier et il travaille avec des sociétés à différents stades, allant de l’exploration à l’exploitation. Plus récemment, Maxime s'est concentré sur les entreprises qui cherchent activement à développer de grands projets d'investissement. En 2017, Maxime a supervisé la rédaction de la plus importante publication mondiale de PwC sur l’industrie minière «Mine 2017. Stop. Think…Act».

Maxime Guilbault
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