[Photo : Bloomberg]
Le Quartier de l’innovation, un organisme sans but lucratif, veut faire de Griffintown et de la Cité du Multimédia le cœur de l’écosystème technologique montréalais. L’initiative est pilotée par l’ÉTS et l’Université McGill, qui souhaitent créer dans ladite zone un écosystème où chercheurs, entrepreneurs et artistes tisseront des liens et innoveront.
Le Centech, l’incubateur de l’ÉTS, a d’ailleurs été agrandi dans le cadre du projet. De concert avec McGill, l’ÉTS a également converti l’ancienne brasserie Dow en espace à bureaux pour les entreprises innovantes baptisé Carrefour d’innovation INGO. Un deuxième immeuble devrait être converti dans une deuxième phase du projet évaluée à 35 millions de dollars.
On ne peut pas être contre la vertu et on ne peut qu’applaudir la volonté de deux universités québécoises de contribuer à la communauté de start-ups. Cependant, comme le soulignait l’assistant-professeur Raphaël Suire dans Le Devoir, l’initiative ignore les préférences exprimées par la communauté.
Alors que la Cité du Multimédia était populaire auprès des start-ups avant l’éclatement de la bulle techno, la nouvelle génération de fondateurs de start-ups a décidé de s’installer ailleurs. Nombre d’entre eux ont ainsi été attirés par les loyers plus abordables et la vie de quartier du Mile-End.
La nouvelle génération de start-ups montréalaise s’est en effet établie dans le Mile-End et aux abords du boulevard St-Laurent, entre Sherbrooke et Mont-Royal. On trouve notamment dans cette zone les start-ups Busbud, Frank & Oak, PasswordBox, Provender, Transit App, Nexalogy et Breather. Et c’est sans mentionner Ubisoft et les innombrables start-ups qui ont élu domicile à la Maison Notman, située coin Sherbrooke et Saint-Laurent.
Comme le Downtown Project à Las Vegas ou le Communitech Hub à Waterloo, cette zone a été choisie par des entrepreneurs et on peut y louer des bureaux très bon prix. Il suffit d’une connaissance minimale de l’économie des start-ups pour comprendre que ces entreprises n’ont aucun intérêt à s’établir dans les quartiers les plus chers.
Au centre-ville de Toronto, le MaRS Discovery District est tout sauf une histoire à succès, pour la simple raison que les loyers y sont trop élevés. À Londres, le quartier Tech City, dont le succès initial est indéniable, perd de plus en plus de start-ups au profit d’emplacements moins coûteux, comme Birmingham.
Il y a plusieurs entreprises technos dans le Quartier de l’innovation et l’initiative pourrait en attirer d’autres. Ce n’est pas alarmant, puisque le succès d’un quartier n’enlève rien aux autres. Par contre, les entrepreneurs technos ont déjà fait leur choix et, si la ville de Montréal et nos universités publiques veulent maximiser leur impact, elles devraient soutenir ces derniers plutôt que de prendre l’initiative.
Je parviens à cette conclusion en constatant que le Quartier de l’innovation viole la première des quatre règles édictées par Brad Feld dans son livre Startup Communities: Building an Entrepreneurial Ecosystem in Your City, soit que les entrepreneurs doivent être les leaders de la communauté. Or, aucun des membres du conseil d’administration du Quartier de l’innovation, où siège notamment le pdg du Cirque du Soleil Daniel Lamarre, n’est un fondateur de start-ups.