Charles Sirois [Photo : Gilles Delisle]
Aussi curieux que cela puisse paraître, jamais il ne nous avait été donné de le rencontrer.
- Pardon, vous n'auriez pas une autre demi-heure à nous accorder?
En conférence de presse, le jour du lancement de la Coalition pour l'avenir du Québec, Charles Sirois avait fait bonne impression. En rencontre éditoriale, avec les collègues Jean-Paul Gagné, Yannick Clérouin et Mathieu Lavallée, on a compris comment il avait pu bâtir sa fortune: le charisme.
"Il donne vraiment le goût de le suivre", disions-nous au sortir, le collègue Lavallée et moi.
Pourquoi revenir?
La première question de toutes, évidemment. Étant donné son long éloignement de la scène publique.
"Pour me donner le droit de chialer. Ceux qui chialent et ne font rien ne devraient pas avoir le droit de chialer. Si tu veux chialer, il faut que tu fasses quelque chose", dira-t-il dans un éclat de rire.
Plus sérieusement, son retour semble s'articuler autour de deux ou trois choses: le goût inné d'entreprendre, une attraction naturelle pour l'engagement public, et une certaine réflexion philosophique. "On ne choisit pas notre capacité intellectuelle, ni nos parents, ni son milieu. Quelqu'un qui part avec tout ça (comme acquis), part bien. Quand tu as eu ça, parce que ça ne dépend pas de toi, il faut cependant que tu redonnes", affirme-t-il.
Vers le milieu des années 2000, après que le premier ministre Jean Chrétien lui ait demandé de faire partie d'un groupe de travail sur la pauvreté dans les pays émergents, il s'est soudainement aperçu que son rapport risquait d'aboutir sur les tablettes.
C'est là que s'est en réalité amorcé le retour, mais hors la portée des projecteurs.
"Je me suis dit, ce n'est pas vrai que ce sera tabletté." C'est ainsi qu'est né Enablis, un réseau qui vise à former des entrepreneurs en Afrique. Il compte aujourd'hui 1 100 membres et ne cesse de grandir.
Pourquoi Sirois s'était retiré
À la fin des années 90, début des années 2000, Charles Sirois s'était déjà avancé dans l'arène publique. Il était sur plusieurs tribunes, prêchait certaines recettes entrepreneuriales et ne se gênait pas pour prendre part au débat public. Il allait s'y faire quelques ennemis et, à l'éclatement de la bulle technologique, voir le fan club non plus parler d'un visionnaire, mais d'un gérant d'estrade.
Look, Télésystème (TWI), et Microcell ont toutes besoin de réinjection d'argent et leurs cours boursiers vrillent. "Le gourou s'est-il gouré?", titre le magazine Commerce.
Charles Sirois choisit de rentrer dans ses terres. "Un hiver nucléaire, dit-il aujourd'hui. Il fallait rembourser de la dette, restructurer des entreprises. Je me suis concentré à régler les problèmes".
Ce que le public ne sait pas, c'est qu'au même moment, son épouse découvrait aussi qu'elle était atteinte d'un cancer (qu'elle a vaincu). Les priorités de l'entrepreneur venaient vraiment de changer.
90 secondes avec Charles Sirois : « le rôle de l'État a ses frontières »