[Photo : Hydro-Québec]
BLOGUE. Les sociétés minières paieront le juste prix pour leur électricité, disait le gouvernement du Québec, au lendemain des inquiétudes publiques de Jacques Parizeau. On ne veut pas faire trop de sémantique, mais alors que s'amorcent les travaux pour le prolongement de la route 167 jusqu'aux Monts Otish, ce n'est toujours pas très clair.
Dans son étude de faisabilité pour une première mine de diamants au Québec, Stornoway table sur une alimentation en électricité à partir de génératrices au diesel. Selon l'hypothèse opérationnelle retenue, ces génératrices lui coûteraient un peu plus de 26 cents le kilowattheure.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT
Voilà cependant que l'entreprise est à mener une autre étude sur la possibilité de construire une ligne d'électricité qui partirait de Laforge-1 et grimperait jusqu'aux Monts Otish.
Financière Banque Nationale calcule que si une telle ligne devait lui coûter 100 M$ en immobilisations, la valeur de la mine de Stornoway grimperait de 13%. Si elle devait coûter 150 M$, la hausse serait de près de 4%. À 200 M$, il vaudrait mieux oublier tout cela et rester avec les génératrices au diesel.
Fort bien, dîtes-vous, l'État ne subventionne pas l'électricité de la minière.
Pas exactement. Le calcul repose sur la construction de la ligne, mais prend pour acquis que l'électricité vendue, le serait au prix du tarif L, celui consenti aux entreprises qui consomment beaucoup d'énergie. Or, le tarif L, est à 0,03$ le kilowattheure. À titre comparatif, en excluant le transport (1,50 cent), le coût du dernier barrage d'Hydro, La Romaine, est autour de 5 à 7 cents (on penche personnellement vers le 7 cents).
Pour chaque dollar reçu de la nouvelle mine, Hydro-Québec perdrait donc 2,30$. Pas exactement un scénario où l'on qualifierait l'argent reçu de "juste prix".
Une nuance
Avant de porter Hydro et le gouvernement à la croix, une nuance.
Il faut savoir qu'Hydro fait actuellement face à d'importants surplus qui pourraient s'étaler sur une dizaine d'années. Obtenir pour 3 cents d'électricité dans un barrage est peut-être meilleur que d'y laisser dormir un potentiel et ne rien obtenir du tout. Il n'est en effet pas très clair quelles sont ses options de revente sur le marché de l'exportation. Après trois trimestres en 2011, la société d'État indique que ses ventes à l'extérieur sont en moyenne survenues à 5,2 cents le kilowattheure, mais les volumes d'électricité exportés ont reculé.
Ce que l'on souhaiterait
Il devient impératif qu'Hydro-Québec précise au public sa lecture du marché des exportations et sa stratégie pour les prochaines années.
Si l'option exportation devait apparaitre plus lucrative, et que le tarif L était accordé à Stornoway, on se trouverait alors à réellement subventionner les diamants du Québec.
Une politique qui serait difficilement justifiable.
Parce que le projet envoie déjà un signal de rentabilité. Et surtout parce qu'il est temps de cesser de faire reposer notre stratégie industrielle sur un avantage artificiel qui aura une fin. Dans 30 ans, l'entente de Churchill Falls sera terminée et toute cette industrie que l'on tient actuellement en place par de bas tarifs ne pourra plus être maintenue (nos coûts d'approvisionnement explosant).
Tant qu'à construire pour la génération de demain, construisons sur les vrais coûts.