Compétitivité: Biden pourrait aider nos entreprises

Publié le 26/04/2024 à 18:00

Compétitivité: Biden pourrait aider nos entreprises

Publié le 26/04/2024 à 18:00

Le président Joe Biden s'exprimant lors du discours sur l'état de l'Union au Capitole, le 7 mars, à Washington, DC. (Photo de Matt McClain Getty Images)

ANALYSE GÉOPOLITIQUE. S’il est réélu en novembre, le président sortant Joe Biden pourrait sans le vouloir rendre les entreprises canadiennes plus compétitives par rapport à leurs concurrents aux États-Unis, et ce, en augmentant le taux d’imposition des sociétés américaines.

Actuellement, le taux fédéral d’imposition des entreprises aux États-Unis s’élève à 21%. Alors que le candidat républicain Donald Trump s’engage à le maintenir à ce niveau s’il retourne à la Maison-Blanche, Joe Biden souhaite le porter à 28%.

Actuellement, le taux fédéral au Canada s’élève à 15%.

Ce qui en fait le taux le plus bas des pays du G7, juste devant l’Allemagne à 16%, selon une analyse de la Peter G. Peterson Foundation, du nom d’un ancien secrétaire américain au Trésor de l’administration républicaine de Richard Nixon.

Toutefois, si l’on tient compte du taux d’imposition combiné moyen dans les États américains et des provinces canadiennes, les entreprises paient le même taux de 26% des deux côtés de la frontière.

 

Un écart potentiel important avec le Canada

Or, une éventuelle victoire de Joe Biden en novembre pourrait modifier cet équilibre en faveur du Canada s’il réussit à porter le taux fédéral de 21 à 28%.

Toutes choses égales par ailleurs, cela portait le taux combiné aux États-Unis à 31-32%, alors que le taux combiné au Canada demeurait à 26% (26,5% au Québec), selon Benoît Turcotte, associé chez Raymond Chabot Grant Thornton et spécialiste de la fiscalité américaine.

Par conséquent, pour chaque tranche de revenus de 100 dollars, les entreprises canadiennes en garderaient davantage dans leur poche (de 5 à 6$) que leurs concurrents aux États-Unis.

Ce qui serait un atout important.

 

Le Canada affiche le taux fédéral d'imposition des sociétés le plus bas des pays du G7. (Source tableau: Peter G. Peterson Foundation)

Ces sommes supplémentaires peuvent par exemple servir à faire davantage de R&D, à acheter de nouvelles technologies afin d’être plus productif ou à réduire les prix d’un produit pour conquérir des parts de marché.

Bref, autant de mesures qui permettent à une entreprise d’être plus compétitive.

Ce projet de Joe Biden d’augmenter à 28% le taux fédéral d’imposition des sociétés n’est pas nouveau (il a fait cette proposition en début de mandat, en 2021), même si le président en parle davantage en cette année électorale.

«Le président Biden estime que les grandes entreprises devraient payer leur juste part et s’engage à annuler la réduction fiscale massive accordée aux grandes entreprises que les républicains ont promulguée en 2017», souligne la Maison-Blanche dans un communiqué publié le 7 mars.

La précédente administration Trump avait réduit de 14 points de pourcentage le taux fédéral, pour le faire passer de 35% à 21%. Ce taux n’avait pratiquement pas bougé depuis le début des années 1990.

Dans les années 1950 et 1960, ce taux était supérieur à 50%.

C’est le président républicain Ronald Reagan — partisan du néolibéralisme avec la première ministre britannique Margaret Thatcher — qui avait commencé à le réduire de manière importante dans les années 1980.

 

Biden pourra-t-il hausser le taux à 28%?

La grande question est de savoir si une éventuelle nouvelle administration Biden pourra augmenter le taux d’imposition fédéral à 28%.

Le président a déjà essayé de le faire au cours de son mandat, mais sans succès, en raison de la division du Congrès à ce sujet, rappelle Benoît Turcotte.

Aussi, si Joe Biden est réélu en novembre et que le Congrès lui est plutôt favorable, il serait plus réaliste qu’il réussisse à obtenir un taux qui passerait de 21% à 24-25%, pour un taux combiné moyen qui pourrait atteindre 29-30%, selon le fiscaliste.

Même à ce niveau combiné, les entreprises canadiennes auraient encore un avantage, puisque le taux combiné au Canada s’établirait encore à 26%.

Cela dit, le fiscaliste de RCGT fait remarquer que certains facteurs peuvent en fait atténuer l’écart de revenus disponibles après impôts entre les sociétés au Canada et aux États-Unis.

Par exemple, les entreprises américaines bénéficient d’une dépréciation accélérée (ou le taux de la déduction pour amortissement accéléré) qui est généralement plus généreuse qu’au Canada.

Par conséquent, une entreprise en croissance aux États-Unis qui acquiert plusieurs équipements peut réduire de facto son taux d’imposition.

Les jeux sont loin d’être faits pour l’élection présidentielle de novembre.

Bien malin qui peut prédire qui, de Donald Trump ou de Joe Biden, sera le prochain locataire de la Maison-Blanche, en janvier.

Chose certaine, une victoire de Joe Biden pourrait signifier une hausse du taux d’imposition fédéral des entreprises aux États-Unis, même si plusieurs nuances sont à faire.

Cela dit, par la bande, une seconde administration Biden se trouverait à rendre nos entreprises plus compétitives par rapport aux entreprises américaines.

Et à leur permettre peut-être d’accroître leurs parts de marché aux États-Unis. 

 

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À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand

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