Une politique de la recherche et de l'innovation brouillonne

Publié le 26/10/2013 à 00:00

Une politique de la recherche et de l'innovation brouillonne

Publié le 26/10/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Après avoir annoncé une réforme de l'enseignement de l'histoire au collégial, Pierre Duchesne persiste et signe. En effet, l'une des chaires de recherche proposées dans sa Politique nationale de la recherche et de l'innovation (PNRI) portera sur l'enseignement de l'histoire. La seule autre chaire de recherche identifiée parmi la quinzaine qu'il veut créer portera sur la langue française. Les activités de ces chaires «seront centrées sur le thème de l'identité québécoise». Mais que vient faire l'identité québécoise dans une politique de recherche et d'innovation industrielle ?

C'est la signature péquiste de la PNRI, qui succède aux deux stratégies québécoises de la recherche et de l'innovation (SQRI) du gouvernement Charest. On a aussi pris soin d'inscrire le qualificatif «nationale» dans le nom de cette politique, conformément à d'autres initiatives péquistes. Et comme si on voulait politiser encore plus la PNRI, le document ne manque pas de critiquer le fédéral, qu'on accuse de ne pas financer suffisamment les frais indirects de la recherche lorsqu'il subventionne les chercheurs québécois.

Cette politisation enlève de la crédibilité à la PNRI, qui devrait être orientée essentiellement vers la recherche et développement (et l'innovation industrielle). Mais le mot «recherche» ne signifie pas la même chose dans la PNRI que dans les SQRI. Dans la PNRI, la recherche a été étirée jusqu'à l'identité, alors que dans les SQRI, elle s'en tenait à la R-D et à l'innovation industrielle.

Comme les deux SQRI, la PNRI propose de porter à 3 % du PIB la dépense intérieure de R-D. C'est un objectif irréaliste : l'effort du gouvernement précédent n'a même pas réussi à freiner le glissement de ce ratio de 2,78 % en 2003 à 2,41 % en 2010. Il est clair qu'il faut chercher à renverser cette tendance, mais ce ne sera pas évident pour trois raisons :

1) La capacité industrielle du Québec est en déclin ; 2) Le climat économique n'est pas favorable à l'investissement, car trop de politiques péquistes (sur la souveraineté, la fiscalité, les mines, la langue) sont mal accueillies par les gens d'affaires et les investisseurs ; 3) Les mesures proposées dans la PNRI sont très abondantes et disparates, de sorte qu'il en résulte un grand saupoudrage des fonds alloués.

Le gouvernement ne semble pas comprendre que le climat économique (politiques fiscales, stabilité politique, prévisibilité des politiques) est plus important que l'aide d'appoint versée aux entreprises pour assurer un haut niveau d'investissements. Si le gouvernement accroît autant ses mesures incitatives actuellement, n'est-ce pas parce que les investissements annoncés n'auraient pas été réalisés sans ces cadeaux additionnels ?

Une des mesures les plus originales de la PNRI est la création du Réseau recherche innovation Québec. Ce réseau vise à mieux partager les connaissances en R-D et en innovation entre tous les organismes publics et privés qui interviennent dans ce domaine ainsi qu'à partager cette information avec les entreprises. Ces connaissances seraient accessibles sur une plateforme électronique. L'intention est bonne, mais le projet pourrait être difficile à réaliser.

La PNRI propose de mettre à la portée des PME de jeunes chercheurs et de leur fournir de l'aide pour l'obtention d'un premier brevet. La portée de ces mesures sera limitée, puisque peu de PME font de la R-D. En outre, la PNRI néglige le problème du partage des fruits de la propriété intellectuelle entre les chercheurs, les universités et les entreprises.

La même timidité s'observe à l'égard de l'entrepreneuriat technologique, de l'accès au capital de démarrage pour les PME technologiques et de la valorisation et de la commercialisation de la R-D. Rien d'impressionnant n'est proposé sur ces questions.

Désireux de plaire à tout le monde, le ministre a produit un salmigondis de mesures qui ne s'attaquent pas avec force aux grands enjeux de notre économie : son manque de compétitivité, la faible productivité de nos entreprises, la sous-efficience de l'écosystème de l'innovation, l'insuffisance de la R-D et de l'innovation industrielle de même que la déficience de la valorisation et de la commercialisation de la recherche universitaire.

Non seulement le ministre a procédé à peu de consultations, mais sa politique ne semble s'appuyer sur aucune étude sérieuse et ne paraît pas issue d'une réflexion approfondie. Elle semble plutôt avoir été rédigée avec empressement, comme si elle faisait partie d'un processus électoraliste.

jean-paul.gagne@tc.tc

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