Un budget responsable, un brin audacieux, mais assez opaque

Publié le 30/03/2013 à 00:00

Un budget responsable, un brin audacieux, mais assez opaque

Publié le 30/03/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Si le dernier budget du ministre Jim Flaherty a suscité peu d'enthousiasme dans les médias généralistes, c'est parce qu'il contenait peu de mesures spectaculaires.

C'est pourtant un budget qui traduit une vision, avec laquelle on peut être d'accord ou pas, et qui comporte un brin d'audace, comme en témoignent certaines réactions. Mais c'est aussi un document qui est discret quant aux impacts de certaines stratégies et aux intentions qui y sont exprimées. Par exemple, le gouvernement fédéral n'explique pas comment il s'y prendra pour limiter à 2,1 % la croissance moyenne de ses dépenses totales au cours des cinq prochaines années, ni comment il arrivera à faire passer de 80,5 milliards de dollars en 2012-2013 à 77,8 G $ en 2017-2018 ses dépenses administratives.

Quant à ses dépenses directes, qui incluent les dépenses de fonctionnement, la gestion des programmes et l'amortissement des immobilisations, elles passent de 6,7 % du produit intérieur brut en 2012-2013 à 5,5 % en 2017-2018.

On y voit l'intention claire d'Ottawa de réduire le poids de l'État dans l'économie. Pour la même période, les transferts aux personnes et aux autres administrations restent stables à 3,9 % et 3,2 % du PIB respectivement, ce qui indique la volonté d'Ottawa d'empêcher une explosion des dépenses publiques malgré le vieillissement de la population, qui coûtera plus cher à l'État.

Le budget est muet sur le nombre de postes qu'Ottawa songe à éliminer, mais, selon d'autres sources, ce sont 29 500 emplois qui doivent disparaître dans l'appareil fédéral d'ici 2015. On sait toutefois qu'Ottawa s'attaquera à la rémunération des fonctionnaires. Selon le directeur parlementaire du budget, le coût moyen d'un fonctionnaire, qui était de 112 000 $ en 2012, atteindra 130 000 $ en 2015. Il va de soi que la rémunération des fonctionnaires s'aligne sur celle de l'ensemble des contribuables, une réalité qu'a comprise le gouvernement du Québec, mais qui échappe toujours aux grandes villes du Québec.

Autre incertitude, l'intégration de l'Agence canadienne de développement international au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international pourrait contribuer à lier davantage les programmes d'aide à l'étranger aux préférences du ministre et aux objectifs commerciaux du ministère.

Optimisme excessif ?

En raison de la forte croissance des transferts aux personnes (de 70 G $ en 2012-2013 à 86 G $ en 2017-2018) et aux autres administrations (de 58,5 G $ à 70,8 G $ au cours de la même période), c'est grâce à la forte croissance anticipée de l'économie, à l'augmentation des revenus du gouvernement (de 254 G $ à 319 G $ en cinq ans) et à la réduction des dépenses de gestion que Jim Flaherty peut prévoir un retour à l'équilibre budgétaire en 2015-2016, alors que le déficit de 2012-2013 est de 25,9 G $.

Cet objectif paraît très optimiste, mais il est pertinent, car le gouvernement s'assure ainsi de conserver sa note de crédit (AAA), une performance unique au sein du G7. Ottawa pourra continuer de financer sa dette à un taux d'intérêt très faible (1,9 %, terme de 10 ans, actuellement), en plus de favoriser la bonne tenue de notre devise sur les marchés.

Pour soutenir l'économie, Ottawa débloquera 47 G $ en 10 ans pour financer des infrastructures.

Il consacrera aussi près de 1 G $ en 5 ans en appui à l'industrie aérospatiale, 1,4 G $ en 4 ans en déductions fiscales à des achats de machinerie et d'équipements par les fabricants, 325 millions de dollars en soutien aux technologies propres, 225 M $ à la modernisation des laboratoires de recherche, 165 M $ à la recherche en génomique et 60 M $ au financement d'incubateurs et d'accélérateurs de nouvelles entreprises. Ces interventions renforceront notre compétitivité.

Le programme de 500 M $ destiné à la formation des travailleurs sous-qualifiés a été mal reçu par Québec ; on ne voit pas, pour le moment, ce qu'il apporte de plus à ce qui se fait déjà chez nous. Ce qui compte ici, c'est que nos leaders cherchent ensemble les meilleurs moyens d'améliorer encore l'offre de formation et l'exécution des programmes.

Les fonds de capital de risque de la FTQ et de la CSN perdront graduellement d'ici 2017 le crédit d'impôt fédéral de 15 % accordé aux investisseurs, mais il serait étonnant qu'ils ne soient plus capables de se financer.

Un budget doit viser la bonne gestion de l'économie, soutenir, au besoin, certains intervenants et assurer la saine gestion des finances publiques. C'est ce qui a été fait.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Ottawa redoublera d'effort pour éliminer plusieurs échappatoires fiscales : transactions illégales à l'étranger, achats de pertes de sociétés par des sociétés rentables, détournements de crédits d'impôt pour la R-D, avantages fiscaux abusifs liés à des stratagèmes d'assurance vie et de rentes avec effet de levier, utilisation de produits dérivés pour convertir des revenus normaux en gains en capital, etc.

On s'attend à récupérer 4,4 G $ de revenus à ce titre en cinq ans.

Je n'aime pas

Selon une maxime bien connue, «tout ce qui est exagéré est insignifiant». Le ministre Nicolas Marceau aurait dû s'en souvenir avant de déchirer sa chemise sur le dernier budget fédéral. Ajoutant aux hyperboles «attaque frontale contre le Québec» et «entreprise de sabotage économique» de son ministre des Finances, Mme Marois a même parlé d'un «échec du fédéralisme» et d'un «recul de 15 ans». Si le budget Flaherty est aussi catastrophique qu'ils veulent le faire croire, les ténors péquistes auraient dû lancer des «hourras» et des «bravos», car celui-ci ferait alors avancer leur cause, en plus de leur donner l'occasion de déclencher une chicane avec le grand-frère fédéral.

jean-paul.gagne@tc.tc

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