Pourquoi la Chine devrait inquiéter les investisseurs

Publié le 15/08/2009 à 00:00

Pourquoi la Chine devrait inquiéter les investisseurs

Publié le 15/08/2009 à 00:00

L'économie chinoise semble inébranlable. Elle a crû de 7,9 % au deuxième trimestre. La Bourse a doublé depuis le creux atteint à la fin d'octobre 2008 et les investisseurs embrassent ce qu'ils croient être le miracle chinois.

Il est permis de douter de l'exactitude et de la fiabilité des données économiques chinoises. Le gouvernement a publié ses statistiques concernant la croissance de son produit intérieur brut 15 jours après la fin du deuxième trimestre. Ce délai paraît suspect compte tenu qu'il s'agit d'un si grand pays.

À titre comparatif, Statistique Canada a publié la croissance du produit intérieur brut de mai à la fin de juillet ! Cela dit, même si on tient pour acquis que la statistique pour la Chine soit fiable, il faut s'interroger sur les fondements de sa croissance.

Comme plusieurs autres pays, le gouvernement chinois a lancé un programme de stimulation, qui se distingue à deux égards.

D'abord par sa taille. Son plan de 586 milliards de dollars américains est gigantesque par rapport à son économie. Selon les chiffres, les sources et les taux de change utilisés, on estime que l'économie américaine est de quatre à cinq fois plus grosse. Ainsi, pour que le plan des États-Unis ait la même importance relative que celui de la Chine, il aurait dû s'établir entre 2 344 et 2 930 milliards de dollars, au lieu de 787 milliards.

L'autre grande différence est que le gouvernement chinois peut injecter directement, rapidement et comme bon lui semble tout cet argent puisqu'il contrôle les banques du pays. Aux États-Unis, l'industrie étant traumatisée par la crise, les banques se font tirer l'oreille avant d'accorder des prêts. C'est d'ailleurs ce qui retarde la reprise américaine et ce qui explique sans doute l'impact rapide en sol chinois. Mais, encore là, il faut faire attention.

Du capital spéculatif

Selon les données chinoises, les exportations auraient dégringolé de 20 % dans le trimestre qui a pris fin en juin. Pour une économie reposant à 35 % sur ses exportations, afficher dans ce contexte une croissance de 8 % est presque magique.

Ce petit miracle a été réalisé par le gouvernement, qui a forcé les banques à prêter, pour autant que cela créait de l'activité économique. Or, les banques chinoises étaient aussi déjà dans une situation critique en raison de leurs créances irrécouvrables. Elles auraient consenti pour 1 100 milliards de dollars américains de nouveaux prêts lors du premier semestre de 2009, selon le Wall Street Journal.

La moitié de cet argent se serait retrouvé dans l'immobilier, la Bourse et les matières premières, selon Ben Simpfendorfer, économiste spécialisé sur la Chine pour la Royal Bank of Scotland.

" La croissance chinoise provoquera une montagne de pertes sur prêts, croit le gestionnaire Vitaliy Katsenelson, auteur d'Active Value Investing. Il n'y a pas de miracle dans la croissance chinoise et la Chine en paiera le prix. La seule question est quand et combien. "

Michael Pettis, professeur au Peking University's Guanghua School of Management, donne des exemples intéressants sur son blogue (qui est bloqué en Chine !).

M. Pettis voyage beaucoup à travers la Chine. Dans son blogue, il raconte qu'il a récemment dénombré plus de 100 édifices d'au moins 20 étages nouveaux ou en construction dans la région de Guiyang.

Il y a aussi des signes que l'argent chinois sert à des fins spéculatives, comme l'achat de métaux. Selon Simon Hunt, président de Simon Hunt Strategic Services et spécialiste du marché du cuivre, les Chinois ont stocké plus d'un million de tonnes de cuivre.

Pour donner une idée de ce que cela représente, la Chine a importé 480 000 tonnes de cuivre en 2008, et cette quantité est en baisse constante depuis le sommet de 861 000 tonnes en 2004. " Ce n'est pas vraiment l'industrie qui achète en Chine, mais des individus et des institutions financières dissociés du marché du cuivre qui achètent parce qu'ils croient que les prix grimperont ", explique M. Hunt.

Des conséquences au Québec

La situation et le comportement chinois représentent des risques évidents pour les marchés financiers. Plusieurs sont tentés d'y investir, surtout en regard de la performance éclatante des indices boursiers en Asie. Le Canada profite indirectement du programme de stimulation chinois, étant donné l'impact important sur plusieurs matières premières en grande quantité ici, comme le cuivre.

Le dégonflement de l'économie chinoise aurait des conséquences graves, sans mentionner celles sur l'économie mondiale, encore fragile. Si les Chinois ont les ressources pour éviter le pire des scénarios, un krach, ils ne pourront éviter les conséquences négatives.

Comme M. Pettis, je ne crois pas à un écroulement, mais à une longue période, jusqu'à 10 ans, de croissance décevante, ce qui ne correspond certainement pas aux attentes des investisseurs qui achètent des valeurs à Àla Bourse chinoise ces temps-ci.

DE MON BLOGUE

www.lesaffaires.com/bernard-mooney

Les gros face aux petits

Lorsqu'il y a une reprise économique, généralement, les titres à petite capitalisation s'en tirent mieux que les plus grands. Un tableau publié par Jeremy Grantham, de la firme de placement GMO, a attiré mon attention sur ce sujet. C'est le tableau des rendements prévus de différentes catégories d'actif pour les sept prochaines années.

Ainsi, il prévoit un rendement annuel composé de 4,4 % des titres américains de grande capitalisation et de 4,5 % de ceux à petite capitalisation.

Par contre, les titres américains de grande qualité devraient générer 10,5 % par année. C'est le plus haut rendement attendu parmi toutes les catégories.

Si M. Grantham a raison, on devrait profiter du rebond des petits titres pour les liquider... (suite sur le blogue)

Vos réactions

" Un rendement annuel de 4,5 % pour les sept prochaines années, selon moi, ne surpassera pas tellement le rendement des titres à revenu fixe. "

- Dencour

" La Bourse aujourd hui est à 8700 alors qu'elle était à 9700 en 1998. Si on tient compte de l'inflation, c'est encore pire. "

- Danvillepq

bernard.mooney@transcontinental.ca

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