Pour en finir avec le virus du placement à court terme

Publié le 03/10/2009 à 00:00

Pour en finir avec le virus du placement à court terme

Publié le 03/10/2009 à 00:00

Les Américains appellent ça le "short-termism", terme qu'on pourrait traduire par "virus du court terme". C'est le cancer qui ronge le système financier.

Pour vous donner une idée de la progression du fléau, pendant les années 1940, l'investisseur conservait un titre 10 ans, en moyenne. Aujourd'hui, il le conserve moins d'un an - et même seulement six mois, selon James Montier, stratège chez SG Global.

Si vous y voyez un progrès, demandez-vous si vous vous êtes vraiment enrichi en faisant des transactions plus souvent. La réponse, même si on fait abstraction du piètre rendement des indices depuis 10 ans, est probablement non.

Toutes les études montrent que plus les investisseurs sont actifs, moins leurs rendements sont bons par rapport aux indices.

Atteints du virus du court terme, les investisseurs ne cessent de s'appauvrir. Ce mal n'est pas facile à enrayer, comme en témoigne le rapport intitulé Overcoming Short-Termism que vient de publier l'Aspen Institute, et auquel ont participé 28 dirigeants d'entreprise de divers secteurs, dont Warren Buffett, président de Berkshire Hathaway, John C. Bogle, fondateur du Vanguard Group, et Louis Gerstner, ancien président d'IBM.

Ces leaders précisent que la vision à court terme ne se limite pas au comportement des investisseurs. "C'est tout le système qui en souffre; cela touche les dirigeants de société, les conseils d'administration, les conseillers en placement, les gouvernements, etc."

Selon ces leaders, le virus du court terme a miné la confiance des investisseurs à l'égard des entreprises. Pourtant, ces dernières constituent la fondation de l'économie de marché.

Pour rétablir un climat de confiance, il faut que les dirigeants d'entreprise, les administrateurs, les gestionnaires et les investisseurs jugent important d'avoir une perspective à long terme.

Dans son rapport, le comité de l'Aspen Institute précise que si on n'y parvient pas par persuasion, il faudra utiliser la réglementation. Les recommandations de ce comité sont loin d'être parfaites, mais elles constituent des points de départ intéressants.

Par exemple, il faut exploiter au maximum les mesures fiscales pour favoriser l'adoption d'une vision à long terme. Ainsi, le comité recommande que l'impôt sur le gain en capital diminue en fonction du nombre d'années de détention du titre.

Quant aux fonds communs, le comité recommande que la rémunération des gestionnaires soit liée au rendement à long terme du fonds.

Le comité parle également d'améliorer la transparence dans les fonds spéculatifs. Sur ce point, on reste dans le domaine du voeu pieux, car aucune mesure n'est proposée.

La faiblesse des correctifs proposés est d'ailleurs la première critique qui peut être faite à ce comité. Il est difficile d'agir efficacement sur le comportement des investisseurs. Tout ce qu'on peut faire, c'est tracer des lignes directrices qui incitent les épargnants à agir dans une perspective à long terme.

Il faut admettre que c'est naviguer à contre-courant de la nature humaine. Tout nous pousse à agir en fonction du présent. C'est pourquoi il ne faut pas se limiter aux recommandations fondées sur les beaux principes. Il faut aller plus loin et forcer un changement de comportement par des incitations fiscales et financières.

On devrait par exemple imposer à 90 % les gains en capital réalisés lorsqu'un titre est revendu en moins d'un an. Selon cette politique, si vous conservez un titre moins de trois ans, vous serez imposé à 50 %; si vous le gardez plus de 10 ans, vous ne paierez alors aucun impôt, car votre attitude a contribué à développer notre économie.

Cette politique s'appliquerait aux institutions comme les caisses de retraite et la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui ne paient aucun impôt présentement. En fait, il faut que ces investisseurs institutionnels donnent l'exemple; en pensant à long terme, ils pourraient provoquer une transformation en profondeur des marchés financiers.

Imaginez la caisse de retraite qui doit détenir ses titres pendant au moins 10 ans ! Dès lors, elle n'a plus le choix : elle doit agir comme un actionnaire-propriétaire et s'assurer que les dirigeants et le conseil d'administration veillent au grain et travaillent à la création de valeur à long terme.

Dans le même ordre d'idées, les gains réalisés par des dirigeants sur la vente d'actions acquises grâce à des options seraient imposés à 90 %. Façon élégante de se débarrasser des options ! Elles pourraient être remplacées par des primes liées au rendement économique de l'entreprise sur au moins 10 ans.

Et on aurait ainsi une véritable chance de se débarrasser du virus du court terme.

bernard.mooney@transcontinental.ca

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