Les pièges de l'achat pour réduire son coût moyen

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Les pièges de l'achat pour réduire son coût moyen

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Il y a des concepts qui semblent magiques en théorie, mais qui se révèlent désastreux dans la pratique. La stratégie qui consiste à acheter le titre d'une société même si celui-ci se déprécie - l'achat pour réduire son coût moyen - en est une. Il s'agit d'une traduction de l'expression anglaise «averaging down». Plus le titre baisse, plus j'achète, diminuant ainsi mon coût moyen.

Par exemple, j'achète 100 actions de la société ABC à 100 $. Le titre perd 50 % et j'achète de nouveau 100 actions, cette fois à 50 $. Je me retrouve avec 15 000 $ investis dans 200 actions d'ABC. Mon coût moyen est donc de 75 $. Le titre continue sa descente, et à 25 $ j'ajoute 100 actions. Je me retrouve avec un placement de 17 500 $ dans ABC à un coût moyen de 58 $ l'action. Enfin, à 10 $, je rachète 100 actions.

Bilan : 400 actions dans ABC au coût de 18 500 $, soit un coût moyen de 46,25 $ par action. Mes achats ont ainsi permis de faire passer mon coût moyen de 100 $ à 46,25 $.

Technique dangereuse

Une autre version de la même approche veut que plutôt d'acheter le même nombre d'actions, on investisse le même montant. Ainsi, une fois le titre à 50 $, au lieu d'acheter 100 actions, j'en rachète pour 10 000 $, soit 200 actions. Cette approche fait baisser encore plus vite le coût moyen, mais nécessite plus de capital.

J'ai déjà considéré cette technique d'un très bon oeil, influencé par de grands investisseurs comme Bill Miller, ancien gestionnaire du Legg Mason Value Fund qui disait que, si vous n'êtes pas capable de racheter un titre qui a perdu 50 % de sa valeur, vous n'avez pas d'affaire en Bourse.

Aujourd'hui, disons que je la trouve assez dangereuse. Pourquoi ? Parce que dans la vraie vie, bien des gens l'appliquent de façon à se pendre !

L'automne dernier, après une conférence, une personne est venue me demander ce que je pensais de Bombardier. En discutant avec elle, je me suis rendu compte que cet investisseur, poussé par son enthousiasme pour ce titre, y avait consacré plus de 50 % de son portefeuille. Je n'ai pu m'empêcher de le mettre en garde, en lui disant que j'espérais qu'il était conscient des risques qu'il prenait.

Or, si cette personne a mis autant d'argent dans Bombardier, c'est qu'elle a constamment «profité» de la baisse du titre pour réduire son coût moyen.

Un très grand nombre d'investisseurs ont perdu des fortunes avec cette stratégie lors de la bulle Internet, plusieurs achetant notamment des actions de Nortel Networks tout au long de sa descente vers zéro. Impossible, croyaient-ils, de perdre à long terme en diminuant leur coût moyen.

Bien des professionnels y ont également laissé une partie de leur crédibilité. Bill Miller s'est entêté à racheter des actions d'Eastman Kodak malgré les signes de déclin pour profiter de la baisse de son cours. Il a toutefois eu la sagesse de ne pas consacrer une grande partie de son portefeuille à ce titre.

Bill Nygren, gestionnaire du fonds Oakmark Select, a racheté des actions de Washington Mutual jusqu'à y investir plus de 14 % de son fonds. Plus le titre baissait, plus il représentait une aubaine, selon lui. Jusqu'à ce que la société fasse faillite en septembre 2008.

Ce que l'expérience m'a appris, c'est que ces investisseurs se comportent ainsi, prenant des risques élevés, après plusieurs bonnes années. Ils sont au sommet de la vague et se croient les maîtres absolus de l'océan boursier. Ils font preuve d'un excès de confiance.

La Bourse leur enseigne par la suite l'humilité. C'est peut-être ce qui arrivera à Bruce Berkowitz, gestionnaire du Fairholme Funds, qui semble tomber dans le même panneau. Au 30 novembre 2011, il avait 28,9 % de son fonds dans la société d'assurance AIG.

Nuance

Par ailleurs, il ne faut pas croire que c'est nécessairement une mauvaise chose de racheter des actions d'un titre qui a baissé. L'erreur, c'est d'en racheter automatiquement parce qu'il a baissé. L'investisseur a avantage à ne jamais se laisser influencer par les fluctuations boursières. Ainsi, il n'est pas intelligent de vendre automatiquement parce qu'un titre a baissé ; il n'est pas plus avisé d'acheter.

Souvent, ceux qui appliquent avec zèle la stratégie d'achat pour réduire leur coût moyen ajoutent du capital dans leur pire titre. Ils courent le risque de se retrouver avec la plus grosse position du portefeuille dans ce perdant.

Je vous conseillerais de ne jamais racheter d'actions d'une société dont la performance se détériore. Cela devrait être une règle d'or : si les résultats sont moches, n'achetez pas, peu importe que le titre ait dégringolé.

Ce que je viens d'expliquer concerne l'achat de titres en particulier. La stratégie d'achat pour réduire son coût moyen appliquée à l'ensemble du marché est beaucoup plus sensée. Pourvu que l'investisseur respecte ses balises concernant la pondération maximale qu'il désire investir en Bourse.

DE MON BLOGUE

Apple

La taille n'est pas un obstacle à sa croissance

Malgré sa taille gargantuesque, Apple peut continuer de croître, si on se fie à l'expérience passée.

Kulbinder Garcha, analyste pour Credit Suisse, a étudié de nombreux cas de titres ayant atteint des pondérations importantes dans l'indice S&P 500. Selon lui, Apple pourrait représenter plus de 6 % de cet indice.

En lisant l'étude, on constate qu'il y a une grande différence entre le cas d'Apple et celui des autres anciens mastodontes du S&P 500. En effet, ces titres ont atteint des pondérations massives partiellement en raison de leur évaluation. Par exemple, Microsoft se négociait à 54 fois les profits en 1998. C'est loin d'être le cas d'Apple. «Le titre se vend à 10 fois ses profits, en fonction des prévisions de cette année, alors que l'évaluation médiane des titres ayant atteint 3 % du S&P était de 24,1 fois.»

Vos réactions

«Acheter la plus grande capitalisation boursière n'est pas à mon avis une bonne idée d'investissement, surtout pour une société du secteur de la technologie qui se fait de plus en plus attaquer par la concurrence.»

- arie

«C'est plutôt l'inverse. Grâce à son modèle fermé, plus Apple est gros, plus le terrain de jeux s'agrandit pour les utilisateurs qui ont moins l'impression d'être dans un carcan.»

- pbrasseur

bernard.mooney@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

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