Les 100 premiers jours : de bons coups, mais trop d'improvisation

Publié le 15/12/2012 à 00:00

Les 100 premiers jours : de bons coups, mais trop d'improvisation

Publié le 15/12/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Les 100 premiers jours du gouvernement Marois ont été éprouvants pour tout le monde.

Mais il y a une consolation. Parce qu'il est minoritaire, celui-ci a dû abandonner certains engagements (hausses rétroactives des impôts des particuliers en lien avec l'impôt personnel, les gains en capital et les dividendes, intervention dans la politique de placement de la Caisse de dépôt, interdiction aux francophones d'étudier dans un cégep anglophone) et en reporter d'autres (hausse des redevances minières). De plus, il n'a pas aboli l'impôt santé tel que promis, mais il l'a rendu progressif. Il a aussi renoncé au gel du tarif du bloc patrimonial d'électricité d'Hydro-Québec, qu'il a préféré indexer.

Le gouvernement a été actif sur le plan de la législation, puisqu'il a fait adopter neuf lois sur les 15 projets présentés. Les principales lois portent sur l'intégrité dans la gestion des contrats publics, le financement des partis politiques, les élections à date fixe, le droit pour les municipalités de refuser des soumissions douteuses lors d'appels d'offres et la possibilité de destituer un élu municipal.

En raison de la conjoncture économique difficile et malgré les hausses d'impôt qu'il contient, le budget du ministre Nicolas Marceau obtient la note de passage grâce à son engagement relatif à l'atteinte de l'équilibre budgétaire en 2013-2014. C'est toutefois loin d'être sûr qu'il y parviendra, puisque le produit intérieur brut réel du Québec ne devrait croître que d'environ 1,5 % cette année et l'an prochain, ce qui aura un effet considérable et néfaste sur les revenus du gouvernement.

Pour parvenir à l'équilibre, le ministre veut limiter à 1,8 % la croissance des dépenses de programmes. C'est un objectif très ambitieux, puisque le budget de la santé augmentera de 4,8 %, celui de l'éducation, de 1,8 %, celui de l'enseignement supérieur, de 2,0 % et celui du ministère de la Famille, de 3,2 % en raison de l'ajout de nouvelles places en garderie, une promesse électorale qui aurait dû être reportée. Comme ces missions, qui totalisent 50,3 G$, accapareront 79 % des dépenses de programmes, l'ensemble des autres ministères devra se contenter de 21 % de ce budget, en baisse de 0,9 % sur l'année précédente.

Le gouvernement s'est sûrement imposé ce corset budgétaire pour protéger la note de crédit du Québec. Nicolas Marceau a eu la sagesse de réduire la croissance des investissements dans les infrastructures, qui, ces dernières années, ont fait exploser la dette du gouvernement. En cinq ans, celle-ci se sera accrue de 42 G$ ou de 28 % pour atteindre 193 G$ le 31 mars 2013, soit 55,7 % du produit intérieur brut du Québec (c'est quelque 95 % avec la part québécoise de la dette fédérale).

Résultat de cet endettement démesuré : les intérêts sur la dette du gouvernement québécois atteindront cette année 8,6 G$, en hausse de 8,6 %, alors que les taux sont à un creux historique. Il faut prévoir que le service de la dette explosera quand les taux remonteront.

Improvisation et amateurisme

Le gouvernement a profité du fait que les partis d'opposition ne pouvaient provoquer une élection (celle-ci devrait avoir lieu au printemps 2014), mais cela n'a pas empêché la première ministre de prendre des décisions étonnantes, qui ont affaibli sa crédibilité :

- les nominations des militants écologistes Daniel Breton et Martine Ouellet aux ministères de l'Environnement et des Ressources naturelles. Alors que le premier n'aurait jamais dû être nommé ministre à cause de ses frasques, la seconde apprend à la dure ;

- le double emploi et la pension à vie offerte à André Boisclair, 46 ans, nommé à deux postes qu'il devait occuper consécutivement. On lui a enlevé le deuxième poste ;

- la décision d'accroître de 1 G$ les impôts des particuliers (impôt sur les salaires, gain en capital, dividendes) rétroactivement au 1er janvier 2012, conjuguée à l'affirmation que cette ponction était implicite dans le cadre financier présenté lors de la campagne électorale de 2012. Le gouvernement a dû battre en retraite ;

- l'adoption des concessions promises aux étudiants par le gouvernement Charest et la non-indexation des droits de scolarité pour au moins une année. Ces cadeaux n'ont en rien réglé le problème fondamental du sous-financement des universités. Pire, le gouvernement cherche à réduire de 124 M$ les crédits aux universités, qui sont devenues suspectes.

Les dérapages du gouvernement sont surtout imputables à la première ministre. On la sent pressée, mais elle ne doit pas oublier que la précipitation est mauvaise conseillère.

MON COMMENTAIRE

Je n'aime pas

Selon l'Institut de la statistique du Québec, la rémunération globale horaire des employés des principales villes du Québec était respectivement de 33,6 et 30,3 % plus élevée en 2012 que celles des fonctionnaires du Québec et des salariés du secteur privé. En 2011, ces écarts respectifs étaient de 29,2 % et de 27 %. Par ailleurs, les caisses de retraite de 105 municipalités du Québec affichaient à la fin de 2011 un déficit actuariel global de 4,7 G$, en hausse de 56 % en un an. Or, cette situation a sûrement empiré en 2012. Il faut féliciter le maire de Québec, Régis Labeaume, de s'attaquer à la résistance farouche des fonctionnaires face à ces questions urgentes.

J'aime

Ottawa a autorisé la vente de Nexen, qui possède une propriété exploitant des sables bitumineux, à la société d'État chinoise CNOOC. Cette transaction intensifiera les relations d'affaires entre les deux pays. Toutefois, Ottawa a ajouté qu'il ne voulait pas autoriser la vente d'une autre société active dans ce secteur à un gouvernement étranger. Alors que l'État canadien se refuse à être entrepreneur, il est logique de ne pas permettre à des États étrangers de l'être chez-nous.

jean-paul.gagne@tc.tc

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