Le retour de la fabrication aux É.-U. nous coûtera des emplois

Publié le 31/08/2013 à 00:00

Le retour de la fabrication aux É.-U. nous coûtera des emplois

Publié le 31/08/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

La perte de deux millions d'emplois manufacturiers en 15 mois aux États-Unis pendant la dernière récession a servi d'électrochoc. Les Américains ont alors senti l'importance de rapatrier des emplois exportés dans les pays où la main-d'oeuvre est bon marché pendant le tsunami de sous-traitance auquel ont participé des dizaines de sociétés américaines au cours des 50 dernières années.

Une illustration de cette prise de conscience est la Reshoring Initiative lancée par Harry Moser, un industriel à la retraite de 69 ans, pour démontrer qu'il est parfois plus avantageux de fabriquer aux États-Unis que dans les pays où la main-d'oeuvre est à faible coût.

M. Moser, qui a vécu de l'intérieur l'effondrement du fabricant de machines à coudre Singer, a été agent de liaison du Massachusetts Institute of Technology (MIT) auprès des sociétés et a dirigé des entreprises de fabrication. Le site Internet qu'il a créé comprend plusieurs articles sur le reshoring (délocalisation inversée) ainsi qu'un outil (le TCO Estimator) permettant de comparer les coûts de fabrication à l'étranger avec ceux des États-Unis.

Les manufacturiers connaissent bien les coûts de main-d'oeuvre, des intrants et du transport, mais ils sous-estiment souvent ceux qui sont liés aux délais de livraison, aux problèmes de qualité, à l'incapacité de répondre rapidement à de nouveaux besoins dans le marché, au stockage excessif, à la surveillance de la production et à la perte d'expertise locale sur le plan de l'innovation et de la fabrication.

Cette initiative a séduit. Harry Moser a été invité à la Maison-Blanche. Il a été la vedette d'un débat organisé par The Economist sur le reshoring, et il a été nommé au temple de la renommée d'IndustryWeek.

Certes, le rapatriement des emplois perdus à l'étranger n'est pas encore une grande tendance aux États-Unis, mais on décèle une vague. Des exemples : Motorola Mobilicity, acquise par Google en 2011, a créé 2 000 emplois au Texas pour y fabriquer le Moto X, son nouveau téléphone. Apple investira 100 millions de dollars américains pour assembler au Texas un nouveau Mac Pro, dont des composants viendront de la Floride et de l'Illinois. Lenovo assemble des Thinkpads en Caroline du Nord.

Caterpillar, Otis, Master Lock, Emerson, Whirpool, Intel, Du Pont, Dow Chemical, American Apparel, School House et Brooks Brothers ont aussi accru leur capacité de fabrication aux États-Unis.

De plus, des sociétés étrangères importantes ont choisi récemment de se doter d'usines aux États-Unis : Airbus en Alabama, Ikea en Virginie, Vallourec (usine de tuyaux d'acier de 1 milliard de dollars) en Ohio, Electrolux au Tennessee, etc. Ces entreprises ont reçu des subventions pour s'installer aux États-Unis, mais elles reconnaissent aussi que l'écart entre les coûts de main-d'oeuvre américains et chinois, qui a diminué de 50 % depuis huit ans (selon Hackett Group), n'est plus aussi déterminant qu'avant, compte tenu des autres avantages à produire aux États-Unis (qualité, innovation, proximité du marché, gestion du risque, etc.).

Le cas de General Electric

General Electric (GE) fournit un bon exemple d'un retour réussi de la fabrication aux États-Unis. GE a déjà eu 23 000 travailleurs dans son complexe de Louisville, mais n'en avait plus que 1 863 en 2011. Elle a découvert les lacunes du modèle d'entreprise qui justifie la sous-traitance à l'étranger : perte d'expertise en fabrication, en flexibilité face aux besoins du marché et en capacité d'innovation. En regroupant dans un seul emplacement des designers, des ingénieurs et des spécialistes en marketing, GE a obtenu des synergies impossibles à obtenir en travaillant à distance.

GE a embauché plus de personnel qualifié, a réinvesti en R-D et a conçu des appareils à forte valeur ajoutée, dont les modèles sont renouvelés rapidement et qui sont assemblés sur place. L'effectif a doublé. Plus de 55 % des appareils ménagers vendus par GE aux É.-U. viennent maintenant de ce complexe.

Quelque 75 % des 2 millions d'emplois manufacturiers perdus pendant la récession auraient été récupérés, et 3,7 millions d'autres emplois devraient être ajoutés d'ici 2025. Selon le Boston Consulting Group, plus de 35 % des fabricants ayant des revenus supérieurs à 1 G$ US songent à rapatrier aux États-Unis de la production faite en Chine.

Cette tendance pourrait nous toucher, car certains États américains ont des coûts de main-d'oeuvre inférieurs aux nôtres. Où est le promoteur qui relèvera le défi de ramener chez nous les emplois exportés en Chine ?

MON COMMENTAIRE

J'aime

Les actionnaires des producteurs de potasse ont longtemps bénéficié de l'oligopole soutenu par des sociétés des anciennes républiques de l'URSS et du Canada. Or, la décision de l'important producteur russe OAO Uralkali de rompre avec son cartel régional aura pour effet de réduire le prix des fertilisants, ce qui fera baisser le coût de production des céréales et le prix des produits alimentaires. C'est une bonne nouvelle pour les consommateurs.

Je n'aime pas

Le Parti québécois avait promis de ne pas faire de nomination partisane, pourtant, il les a multipliées. Une des dernières en lice est le remplacement de Ginette Bureau par Benoît de Villiers à la présidence et direction générale de Recyc-Québec. Ce dernier n'a aucune compétence reconnue en environnement, ayant travaillé dans des sociétés financières et dans la réglementation du courtage immobilier. À l'opposé, celle de Ginette Bureau, qui a oeuvré à Recyc-Québec pendant 21 ans, dont plus de 5 ans comme pdg, est reconnue. Le conseil d'administration de Recyc-Québec s'est d'abord opposé à cette nomination, mais Québec a renouvelé le conseil. Le tour était joué !

jean-paul.gagne@tc.tc

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