La mauvaise gouvernance à l'origine des problèmes du CUSM

Publié le 19/01/2013 à 00:00, mis à jour le 22/01/2013 à 14:36

La mauvaise gouvernance à l'origine des problèmes du CUSM

Publié le 19/01/2013 à 00:00, mis à jour le 22/01/2013 à 14:36

Par Jean-Paul Gagné

Dans une entrevue qu'il vient de donner au journal The Tribune de Nassau, le Dr Arthur Porter soutient que le conseil d'administration du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) savait très bien qu'il devait continuer de s'occuper de ses entreprises des Bahamas, d'Afrique et d'Europe lorsqu'on lui a confié la direction générale du centre hospitalier.

Entré au service du CUSM en février 2004, M. Porter en a démissionné en décembre 2011, après que le National Post eut révélé qu'il avait confié à un agent controversé de Montréal, Ari Ben-Menashe, le mandat de négocier une aide de la Russie de 120 M$ pour financer des projets d'infrastructure d'une de ses sociétés, l'Africa Infrastructure Group du Sierra Leone, son pays d'origine.

Il ne faut pas croire tout ce que dit le controversé docteur, mais le CA du CUSM devait savoir que celui-ci avait déjà une clinique de traitement du cancer à Nassau, dont il était le directeur général. Toujours selon le National Post, le conseiller en recrutement retenu par le CUSM s'était aussi fait dire par le doyen de la Faculté de médecine de la Wayne State University du Michigan d'être «très prudent» avec le Dr Porter et de rédiger son contrat de façon à contrôler la façon dont il s'occuperait de ses multiples intérêts à l'extérieur.

Cet avertissement n'a pas empêché le CA du CUSM d'embaucher l'oncologue, dont le curriculum vitae était aussi flamboyant (études de médecine à Cambridge, MBA de l'Université du Tennessee, formations complémentaires à Harvard et à l'Université de Toronto) que l'image qu'il aimait projeter. On lui attribuait aussi des travaux de recherche qui lui auraient permis d'associer son nom à plus de 300 articles, chapitres de livres et conférences sur les traitements anticancer.

Même s'il devait gérer six hôpitaux et coordonner la construction du futur hôpital universitaire (campus Glen), M. Porter n'a pas tardé à garnir son CV. Après être entré au CA d'Air Canada en 2006, il a été nommé membre, en 2008, puis président, en 2010, du CA du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS). Le CSARS a pour mandat de surveiller les activités du Service canadien du renseignement de sécurité, l'agence d'espionnage du Canada.

Une personne semble avoir joué un rôle prédominant dans la carrière canadienne du Dr Porter : l'avocat montréalais et sénateur (de 1993 à 2012) David Angus, qui était président du CA du CUSM lorsque M. Porter a été embauché et qui a été administrateur d'Air Canada. Bailleur de fonds reconnu pour le Parti conservateur, il a pu influencer le gouvernement Harper dans la nomination d'Arthur Porter au CA du CSARS, dont ce dernier a démissionné lorsqu'on a révélé ses tractations avec Ari Ben-Menashe.

Bien des questions se posent sur les péripéties vécues par le CUSM sous la direction de M. Porter. Non seulement celui-ci fait face à un déficit scandaleux de 115 M$ pour 2012-2013, mais l'attribution du contrat de construction du nouvel hôpital fait l'objet d'une enquête policière sur des allégations de fraude. Par ailleurs, l'Université McGill a dû recourir aux tribunaux pour récupérer des honoraires payés en trop et un prêt fait à l'ex-directeur-général du CUSM.

De plus, la Banque Nationale poursuit également le Dr Porter pour un prêt hypothécaire en défaut.

Gouvernance relâchée et inadéquate

Aussi révoltant que puisse être le fiasco financier du CUSM, ce sont le manque de rigueur de sa gestion, les conflits d'intérêts à différents niveaux et la déficience de sa gouvernance qui déçoivent le plus à la lecture du rapport du comité dirigé par le Dr Michel Baron sur la gestion du centre hospitalier :

> rapports verbaux du directeur général au CA, temps de réunion insuffisant du comité d'audit, absence du directeur général aux réunions du comité du budget, absence de compte-rendu des réunions du directeur général avec ses directeurs adjoints, procès-verbaux très succincts des réunions du CA.

Malgré la bonne foi des membres passés et actuels du CA du CUSM, sa composition demeure inadéquate. Puisque plusieurs administrateurs représentent des parties prenantes (le personnel de plusieurs catégories, les usagers, les fondations, l'université), ils sont en conflit d'intérêts au regard de leur responsabilité primordiale de mandataire de leur établissement.

De plus, la non-rémunération des administrateurs ne peut que nuire à leur engagement dans des situations difficiles et complexes. En faut-il plus pour constater le besoin de revoir la gouvernance de ces CA ?

MON COMMENTAIRE

J'aime

Malgré les nombreux problèmes associés aux autochtones, il y a une lueur d'espoir. Selon le Canadian Council for Aboriginal Business, il y avait au Canada, en 2006, 37 400 travailleurs autonomes (63 %) et petites entreprises (37 %) au sein de la population autochtone vivant à l'intérieur ou à l'extérieur de réserves et parmi les Métis. Quelque 61 % avaient déclaré un profit net en 2010.

Je n'aime pas

Ce n'est pas avec le jugement qui a rejeté les accusations de fraude portées contre trois ex-dirigeants de Nortel qu'on établira une jurisprudence qui mènera à la condamnation de gestionnaires, lesquels ont conduit leur société en faillite, ruiné ses actionnaires et fait perdre des emplois à cause de leurs mauvaises décisions. Selon le juge qui a entendu la cause, la poursuite n'a pas fait la preuve hors de tout doute raisonnable que les accusés avaient manipulé les résultats financiers de Nortel pour faire monter la valeur de leurs options. Ce jugement montre que l'octroi d'options exerçables à court terme est une mauvaise façon de rémunérer les dirigeants de sociétés.

jean-paul.gagne@tc.tc

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