Il ne faut pas sauver les spéculateurs

Publié le 28/02/2009 à 00:00

Il ne faut pas sauver les spéculateurs

Publié le 28/02/2009 à 00:00

Semaine noire au journal.

Trois collègues ont perdu leur emploi dans un exercice visant à réduire les coûts d'exploitation. Même si ce n'est pas la première fois que je vis une telle situation, c'est toujours aussi triste et pénible.

Et je ne peux m'empêcher de me poser cette question : ces nouveaux chômeurs sont-ils des victimes de la bulle immobilière américaine ?

Je sais qu'il faut se méfier des conclusions hâtives et des généralisations.

Certains prétendront que le déclin de l'industrie des médias explique ces mises à pied. Or, Transcontinental, la société qui publie le journal Les Affaires, a été dans l'obligation de réduire son effectif de 10 %, soit 1 500 personnes. Pourquoi ? Parce que depuis octobre, le chiffre d'affaires de la société a fortement décliné.

Évidemment, Transcontinental n'est pas la seule entreprise à souffrir de la crise. Depuis le début de l'année, de nombreuses mises à pied sont annoncées chaque jour dans la plupart des secteurs d'activité.

Pour en trouver la cause, vous devez jeter un oeil aux États-Unis, où certains ont tenté de s'enrichir en spéculant sur des éléments d'actif immobiliers.

Cela me rappelle une anecdote racontée l'automne dernier par Wilbur Ross, le milliardaire américain qui a fait fortune dans l'acier. Après une partie de golf, son caddie lui a demandé conseil à propos de cinq appartements en copropriété qu'il avait achetés à Scottsdale, en Arizona. "J'ai pu vendre rapidement les trois premiers, mais je reste pris avec les deux autres. Est-ce que je devrais continuer de rembourser mes prêts hypothécaires ou devrais-je simplement les laisser tomber ?" demanda le caddie.

M. Ross lui demanda alors l'emplacement des copropriétés : "Est-ce un endroit agréable ?" "Je ne sais pas. Je ne suis jamais allé en Arizona", répondit le caddie. On ne peut pas mieux illustrer la folie spéculative.

Il ne faut pas oublier le rôle des institutions financières qui ont tenté de gonfler leur bénéfice en créant entre autres des produits dérivés basés sur cette fièvre immobilière. Après tout, il fallait quelqu'un d'incompétent pour prêter le capital à ce caddie !

Très loin de ce monde, il y a des personnes qui font leur travail sérieusement, épargnent méthodiquement et évitent toute spéculation (probablement plus par ignorance que par vertu, admettons-le, mais quand même).

Voilà que cette bulle spéculative se dégonfle, fait dégringoler la Bourse et met en péril le système financier mondial.

Je n'ai rien en principe contre la spéculation. Personnellement, je tente de l'éviter, mais j'admets que les gens ont le droit de spéculer sur ce qu'ils veulent, que ce soit à la Bourse, en achetant un billet de loterie ou en jouant au casino. Je sais aussi que les spéculateurs ont un rôle important à jouer dans le bon fonctionnement des marchés.

Mais je me pose de sérieuses questions. Est-ce normal et acceptable que la spéculation pousse le système financier au bord du gouffre ? Et est-ce normal que les gouvernements interviennent pour sauver les spéculateurs ?

À mon avis, la meilleure façon de prévenir les immenses dommages provoqués par les excès de spéculation est d'encadrer beaucoup plus étroitement toutes les institutions financières. Cela passe par la mise sous tutelle des produits dérivés et l'adoption de normes comptables plus limpides et rigoureuses.

Quant aux gouvernements, je comprends le raisonnement qui les incite à intervenir. Pour éviter que la crise s'aggrave, ils injectent massivement des liquidités.

C'est ce qui s'est produit à chaque crise depuis 1987. Tellement que c'est devenu un réflexe.

S'il y a crise, on s'attend à ce que la Réserve fédérale intervienne et baisse ses taux d'intérêt. Cela a fonctionné plusieurs fois, notamment en 2002, à la suite de l'éclatement de la bulle techno. Ce faisant, les importantes liquidités ont nourri la spéculation immobilière.

Peut-être que le remède suprême est aussi le plus simple : laisser couler les spéculateurs.

Car il y a quelque chose de vicié lorsque ceux qui se sont tenus loin de la spéculation - que ce soit des investisseurs ou des travailleurs - paient une bonne partie des dommages.

bernard.mooney@transcontinental.ca

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