Gouvernance : les leçons à tirer des errements de SNC-Lavalin

Publié le 24/08/2013 à 00:00

Gouvernance : les leçons à tirer des errements de SNC-Lavalin

Publié le 24/08/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le conseil d'administration de SNC-Lavalin aurait-il pu éviter les fraudes dont sont accusés certains de ses anciens dirigeants, dont Pierre Duhaime, qui fut le président et chef de la direction, et Riadh Ben Aïssa, qui fut un des principaux vice-présidents ?

Compte tenu de la qualité indiscutable des administrateurs de la firme, on ne peut pas répondre par l'affirmative à cette question. Par contre, on peut apprendre de cette expérience malheureuse. Les leçons qu'on peut en tirer devraient servir à améliorer la gouvernance dans les organisations de toutes tailles.

C'est pourquoi tous les administrateurs de sociétés auraient intérêt à lire l'excellent texte de Gwyn Morgan publié dans The Globe and Mail du 27 juillet 2013. Gwyn Morgan, un administrateur chevronné qui a fondé la gazière Encana, était président du conseil de SNC-Lavalin lorsque, selon les accusations en cours, des paiements frauduleux à des agences ont été découverts, ceux-ci ayant servi à financer des pots-de-vin destinés à l'obtention de contrats.

Quatre messages clés

Pour ceux qui n'auraient pas lu le texte de Gwyn Morgan, voici quatre messages qu'il y livre, assortis de commentaires de mon cru :

1. Le vérificateur interne d'une organisation doit relever du président du comité d'audit du conseil, et non du chef de la direction, comme c'est très souvent le cas; ou encore, ni du chef de la direction financière, comme cela arrive parfois. Quant aux contrôleurs des divisions, ils doivent relever du chef de la direction financière de la société et non du premier dirigeant de ces divisions.

Si, comme on l'a vu chez SNC-Lavalin, le chef de la direction participe à la fraude (selon les accusations portées), il aura évidemment tôt fait d'ignorer les observations du vérificateur interne. La vérification interne est un outil de surveillance très important que trop d'organisations négligent. Elle permet de détecter des manquements dans les contrôles et les pratiques de gestion, qui peuvent ouvrir la porte à la fraude.

L'importance que Gwyn Morgan donne au rôle du président du comité d'audit fait de celui-ci l'administrateur le plus important du conseil d'administration. Son choix est donc important pour la gouvernance de toute organisation. Quand on constate que les sociétés d'État (sauf six dans le cas du Québec) ne rémunèrent pas leurs administrateurs, c'est dire le peu d'importance que l'État accorde à la gouvernance de ces sociétés. En témoignent les déboires financiers survenus à l'UQAM et au CUSM.

2. Les organisations doivent avoir un système de dénonciation très robuste, qui permet aux employés de rapporter directement aux administrateurs (et non à la direction) toute irrégularité constatée sans crainte de représailles. Un système de dénonciation à la haute direction ne vaut rien si celle-ci est complice des malversations, ce qui peut arriver.

3. Il faut aussi un système de contrôle financier à toute épreuve, de même qu'un excellent code de valeurs et de déontologie. Toutefois, ces dispositifs seront efficaces seulement s'ils sont respectés à tous les échelons. Sur ce plan comme sur d'autres, le chef de la direction doit donner le ton. Un haut dirigeant qui joue avec l'éthique et qui déjoue les règles mises en place est un poison pour son organisation.

4. En fin de compte, ce sont les valeurs d'une organisation qui définissent sa culture. Si on peut définir celle-ci comme le comportement des employés quand personne ne les regarde, comment s'assurer que ceux-ci s'en imprègnent assez pour réagir aux comportements déviants ? Il y a beaucoup à faire à ce chapitre.

Ces enjeux montrent bien les importantes responsabilités qui incombent aux administrateurs de sociétés. Grâce à la diligence des autorités en valeurs mobilières et à la formation donnée aux administrateurs, la gouvernance des organisations a été grandement renforcée au cours des dernières années. Toutefois, on n'arrête pas de découvrir des malversations, preuve qu'il reste beaucoup de chemin à parcourir.

Enfin, les organisations doivent porter une grande attention à la sélection de leurs administrateurs. Le prix exorbitant payé par les employés et les actionnaires de SNC-Lavalin depuis les fraudes alléguées de certains de ses anciens dirigeants montre à quel point la gouvernance doit être gérée sérieusement.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Kevin Page, l'ancien directeur parlementaire du budget dont le mandat n'a pas été renouvelé par le gouvernement Harper, se prépare à lancer un institut d'analyse des finances publiques en collaboration avec l'Université d'Ottawa. M. Page pourra ainsi continuer à exercer un rôle de chien de garde de la gestion budgétaire et fiscale du gouvernement fédéral. Il compte aussi surveiller celle des gouvernements provinciaux et des municipalités.

Je n'aime pas

La Ville de Montréal a dû suspendre les négociations avec plusieurs syndicats concernant le partage du financement des caisses de retraite. Alors que les cols bleus ont accepté de porter de 30 à 45 % leur part du financement de leur régime de retraite, les autres syndicats refusent de revoir leurs cotisations. Ce faisant, les membres de ces syndicats continuent de compter sur les contribuables pour se faire payer des pensions de retraite très avantageuses, auxquelles la majorité des Montréalais n'ont pas accès. La Ville espérait économiser 50 millions de dollars par année en repartageant le coût de ses régimes de retraite. Elle n'a réussi à retrancher que 6,3 M$.

jean-paul.gagne@tc.tc

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