Gérald Tremblay n'avait pas le leadership pour diriger Montréal

Publié le 10/11/2012 à 00:00

Gérald Tremblay n'avait pas le leadership pour diriger Montréal

Publié le 10/11/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le père de Gérald Tremblay avait déconseillé à son fils de se lancer dans la politique «parce que c'était sale» et qu'il en sortirait détruit.

Il aurait dû l'écouter, parce qu'il n'avait pas le courage ni l'instinct de tueur qui lui auraient permis d'éliminer les pourris qui ont torpillé l'héritage grandiose qu'il rêvait de laisser.

Sa carrière politique est loin d'avoir été un échec, mais elle se termine en catastrophe. Il est cependant trop tôt pour porter un jugement définitif, sachant que M. Tremblay laisse plusieurs réalisations mémorables à son actif en tant que ministre (grappes industrielles), maire de Montréal et président de la communauté métropolitaine, mais aussi des ratés au passif de son bilan à la mairie. Alors qu'il s'est distingué comme ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, son aventure municipale s'est avérée très difficile.

Des transactions douteuses

Gérald Tremblay s'est intéressé à la mairie de Montréal en 2001, lorsque des maires de la banlieue, qui étaient opposés à la fusion des villes, décidèrent de former une opposition au maire Pierre Bourque, partisan d'«une île une ville». Gérald Tremblay se laissa convaincre de se présenter comme maire en s'associant à un parti qui misait sur le sentiment anti-fusion. Sa formation politique changea toutefois son fusil d'épaule une fois élue. Un tandem fut formé : Gérald Tremblay s'occuperait des fonctions générales et horizontales (orientations, planification stratégique, communications, etc.) et Frank Zampino, nommé président du comité exécutif, dirigerait les vraies affaires : la gestion de la ville, les contrats, les sociétés paramunicipales, etc.

On connaît la suite. Des vautours ont vite repéré une proie de choix, Frank Zampino, un personnage corruptible à en juger par les accusations portées contre lui dans l'affaire du Faubourg Contrecoeur (terrain vendu à vil prix au groupe Catania) et par le rôle qu'il a joué dans le contrat gigantesque des compteurs d'eau accordé à un consortium formé de Dessau et Simard-Beaudry, société appartenant à Tony Accurso (Zampino a séjourné deux fois sur le bateau de ce dernier alors que la Ville négociait ce contrat). Ce contrat a été ensuite annulé, mais on ne connaît pas le dédommagement versé au consortium, ce qui constitue un véritable affront aux contribuables.

C'est également sous la direction de Zampino que deux sociétés immobilières paramunicipales ont été fusionnées, puis privatisées (ce que la charte de la Ville interdisait), manifestement pour céder à des promoteurs amis des actifs de la société née de la fusion et dont le directeur général n'était nul autre que Martial Fillion, ex-chef de cabinet de Gérald Tremblay, lui aussi accusé dans l'affaire du Faubourg Contrecoeur. L'histoire rocambolesque de la fusion-privatisation-remunicipalisation des sociétés immobilières de la Ville de Montréal a été jalonnée de magouilles qui pourraient faire l'objet d'un livre.

Naïveté, aveuglement volontaire ?

Gérald Tremblay, qui a avoué avoir été informé dès 2001 que des enveloppes brunes circulaient, ne peut pas ignorer que des tumeurs gangrenaient l'administration de la ville. Or, il n'a pas su stopper le cancer qui s'est développé sous sa gestion. Certes, il jure qu'il est personnellement honnête (ce dont peu de gens doutent) et il a sans doute dénoncé à la police bien des malversations (on n'en a aucune preuve), mais il n'a pas su exercer le leadership nécessaire dans les circonstances.

Un vrai leader ne peut pas accepter que l'organisation qu'il dirige reste infestée d'individus corrompus et de voleurs. Gérald Tremblay paraît avoir été trop tolérant et avoir remis à plus tard les mesures correctrices qui devaient être prises dès qu'il a eu vent des malhonnêtetés commises au sein de son comité exécutif, dans la gestion des contrats et dans le financement de son parti.

Jusqu'à ce qu'il se soit expliqué (il aurait dû le faire depuis longtemps et publiquement), Gérald Tremblay restera une énigme. Il ne peut être le naïf que certains voient pour expliquer son ignorance des malhonnêtetés commises sous son règne. Il a plutôt fermé les yeux en espérant s'en sortir sans trop d'éclaboussures.

La commission Charbonneau travaille avec détermination et méthode. Elle débusquera des bandits à cravate, mais elle fera aussi des victimes innocentes. Des procès impliquant des proches de Gérald Tremblay auront lieu. C'est lorsqu'on aura un portrait plus complet de ses années à la mairie qu'on pourra porter un jugement plus net sur son héritage.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Le gouvernement Marois veut doter l'État d'un outil de plus pour renforcer l'intégrité dans l'attribution des contrats publics. Son projet de loi 1 ajoutera une autre couche de bureaucratie dans l'appareil gouvernemental, qui est déjà très lourd, mais il importe d'enrayer la corruption installée dans le processus d'attribution des contrats. Malheureusement, le coût de ce nouveau dispositif sera surtout supporté par les entreprises honnêtes et les contribuables.

Je n'aime pas

En raison du rejet de l'exploration du gaz de schiste par les Québécois, Talisman s'est retirée du Québec, radiant du même coup 109 M$ de dépenses d'exploration capitalisées à son actif. Après les retraits de Forest Oil et de Canbriam Energy, c'est un autre signal négatif envoyé aux entreprises qui s'intéressent aux ressources naturelles du Québec. Les États-Unis, qui comptent sur le gaz de schiste pour leur indépendance énergétique, en vendent maintenant en Ontario. Alors que la Russie s'inquiète de la «shale revolution» américaine, le Japon se félicite d'avoir un premier dépôt de gaz de schiste. Sommes-nous les seuls à bouder cette ressource ?

jean-paul.gagne@tc.tc

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