Encore trop de questions pour dire oui à TransCanada

Publié le 17/08/2013 à 00:00

Encore trop de questions pour dire oui à TransCanada

Publié le 17/08/2013 à 00:00

Il y a simplement trop de trous dans l'argumentaire de TransCanada concernant son Projet Oléoduc Énergie Est (POEE), au Québec, pour lui donner le feu vert.

Il s'agit d'un mégachantier à échelle pancanadienne qui permettrait de transporter du pétrole de l'Ouest du continent, dont celui de l'Alberta, jusqu'à Saint John au Nouveau-Brunswick, en passant par le Québec.

Budget prévu : au moins 12 milliards de dollars. Le projet nécessite la transformation du principal gazoduc de TransCanada, appelé Mainline, en oléoduc, et la construction d'un nouveau lien à travers le Québec pour acheminer ce pétrole vers l'Atlantique. On prévoit aussi deux nouveaux terminaux portuaires, un à Québec, l'autre à Saint John.

De prime abord, le projet est séduisant. Ses atouts sont apparemment solides.

Les deux raffineries encore en activité au Québec (Suncor à Montréal, et Valero, alias Ultramar, à Lévis) s'approvisionnent sur les marchés de l'Europe, mais aussi de l'Afrique du Nord, où les régimes sont instables. C'est du temps du premier ministre John Diefenbaker qu'on a décidé que l'Est du pays devrait s'approvisionner en pétrole à l'étranger. Aujourd'hui, compte tenu de l'abondance de la production canadienne, c'est de moins en moins logique.

Le pétrole canadien est également moins cher que celui produit à l'étranger. Or, Shell a entrepris en 2010 de fermer sa raffinerie de Montréal-Est en raison de coûts d'exploitation trop élevés, disait-on. L'accès au pétrole canadien aiderait donc à sécuriser les activés chez Suncor et Valero. Leurs dirigeants laissent d'ailleurs entendre que l'idée les intéresse au point qu'ils seraient prêts à allonger les dizaines de millions de dollars nécessaires à la modification des systèmes, puisqu'il s'agirait d'une variété différente de pétrole.

On doit également prendre en compte toutes les retombées liées à la construction du nouveau tronçon québécois. Ce sera, durant les années nécessaires à sa mise en place, un immense chantier où s'activeront plusieurs centaines de travailleurs.

Voilà pour les beaux côtés. Passons maintenant aux zones d'ombre.

Dans sa chronique en page 10, mon collègue Jean-Paul Gagné détaille l'avance prise par le projet semblable de la société concurrente Enbridge. Les raffineries québécoises sont déjà desservies par Enbridge. Dans le cas du POEE, le Québec ne servirait que de terre de transit pour acheminer ce pétrole vers les installations d'Irving à Saint John. Peu d'avantages, mais toujours des risques.

Et même si le pétrole de l'Ouest est moins cher, vous pouvez parier que les automobilistes québécois n'obtiendront pas un sou de rabais à la pompe. Si ce ne sont pas les pétrolières qui vont empocher la différence, ce sera le gouvernement, toujours prompt à augmenter ses taxes.

Puis vient la question de l'approvisionnement du Québec en gaz naturel.

Gaz Métro a déposé dès le 10 juillet, de concert avec une société ontarienne, une plainte devant l'Office national de l'énergie. Objet du contentieux : la transformation du gazoduc de TransCanada en oléoduc risque de faire grimper la facture de Gaz Métro, qui se trouve au bout de ce tuyau et qui est totalement dépendante de TransCanada. On a évoqué la construction d'un nouveau segment pour garantir la continuité de l'approvisionnement, mais la note serait forcément salée.

Le débat oppose deux monopoles, le transporteur (TransCanada) et le distributeur (Gaz Métro). L'idée n'est pas de prendre parti pour l'un ou l'autre, mais de considérer l'impact sur la clientèle. La direction de Gaz Métro évalue que les tarifs de ses clients industriels, qui seraient les plus touchés, pourraient augmenter de 10 à 20 %. Cela est élevé. Il faudra trouver un terrain d'entente. La diversité des sources d'énergie, concurrentielles, fait partie des avantages que le Québec peut faire valoir pour attirer les investissements.

Résumons. Dans ce scénario global, les gagnants sont faciles à citer : TransCanada, les pétrolières de l'Ouest et l'ensemble des activités d'Irving à Saint John, ainsi que les entrepreneurs qui décrocheront les contrats de construction.

Les perdants, ou ceux qui ne récoltent à peu près rien : les consommateurs québécois. Sans compter les inévitables risques.

C'est bien de parler d'une stratégie canadienne qui permet de s'affranchir des aléas de la politique internationale, mais il va falloir offrir plus pour que le Québec y trouve son profit. Pour l'instant, la démonstration est loin d'être concluante.

DE MON BLOGUE

Sport et médias

John Henry et PKP, même combat ?

Et si, à la place de John Henry, des Red Sox et du Boston Globe, on imaginait PKP, les Nordiques et le Journal de Québec ? C'est une des questions qui ont immédiatement surgi quand on a appris la vente du vénérable Boston Globe au propriétaire des Red Sox de Boston. Au moins, le journal demeure ouvert... pour l'instant.

Vos réactions

«En ce qui concerne PKP, on est en train de lui construire un temple du hockey à Québec... sans hockey professionnel, du moins à court ou moyen terme, tant que Bettman sera à la tête de la LNH, tant qu'il n'y aura pas d'équipe de la LNH à Québec (et l'épisode des Coyotes en est la triste preuve). C'est malheureux mais c'est ça !»

- dencour

«Regardez la fameuse levée de terre à la pelle bleue de [Régis] Labeaume. Il s'est vendu trois fois plus de pelles qu'il y avait de partisans sur le site, et la vente fut une véritable catastrophe. PKP doit se mordre les doigts jusqu'au coude.»

- YBertrand

Les perdants, ou ceux qui ne récoltent à peu près rien : les consommateurs québécois. Sans compter les inévitables risques.

rene.vezina@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/rene-vezina

À la une

Bourse: records en clôture pour Nasdaq et S&P 500, Nvidia première capitalisation mondiale

Mis à jour le 18/06/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Les titres de l’énergie contribuent à faire grimper le TSX.

Stellantis rappelle près de 1,2 million de véhicules aux États-Unis et au Canada

Environ 126 500 véhicules au Canada sont concernés par le rappel.

Le régulateur bancaire fédéral maintient la réserve de stabilité intérieure à 3,5%

L’endettement des ménages reste une préoccupation pour le Bureau du surintendant des institutions financières.