Cogeco : des craintes exagérées

Publié le 26/01/2013 à 00:00, mis à jour le 24/01/2013 à 09:09

Cogeco : des craintes exagérées

Publié le 26/01/2013 à 00:00, mis à jour le 24/01/2013 à 09:09

À quoi faut-il s'attendre lorsque les dirigeants d'une entreprise se présentent devant leurs actionnaires avec un titre qui a chuté de 30 % depuis un an ?

À rien.

Preuve en a encore été donnée, il y a quelques jours, lors des assemblées annuelles de Cogeco (Tor, CGO, 39,26 $) et de Cogeco Câble (Tor., CCA, 41,99 $). On aurait pu s'attendre à ce que les actionnaires posent plusieurs questions sur les deux dernières acquisitions de Cogeco Câble à l'étranger. Les achats de Atlantic Broadband et de Peer 1 ont été fort mal reçus par le marché, qui redoute, qu'à cause de ces transactions les agences de notation n'envoient sous peu les titres de dettes au rang de pacotille (junk bonds).

Pourtant, aucune question n'a été posée sur le sujet.

Heureusement que le grand patron, Louis Audet, sait lire dans les esprits.

«Nous n'avons pas d'autres acquisitions dans les plans et allons nous concentrer sur l'intégration de nos dernières acquisitions. L'objectif est de ramener le ratio dette/BAIIA de 3,7 à sous les 3,5 d'ici août», a-t-il notamment dit dans son exposé.

C'était répondre à la principale crainte des analystes. Nombre d'entre eux redoutaient en effet que la société ne décide prochainement d'ajouter encore de la dette à son bilan en poursuivant sur le sentier des acquisitions. L'été dernier, elle avait en effet indiqué qu'elle entendait utiliser le câblodistributeur américain Atlantic Broadband comme base de lancement à une expansion aux États-Unis.

Malgré la déclaration de Louis Audet, le titre n'a cependant depuis que très peu bougé (+ 6 %). Le marché continue d'avoir peur.

Le marché a-t-il trop peur ?

On serait personnellement porté à dire que oui. Et à soutenir que Louis Audet prend les bonnes décisions.

Tous ont à l'esprit l'échec de Cabovisao, au Portugal, un câblodistributeur acheté 660 M$ en 2006 et revendu pour seulement 60 M$ en février 2012. Une erreur du genre avec Atlantic et Peer 1, et Cogeco Câble ne vaudrait plus grand-chose.

Le funeste souvenir de Cabovisao pourrait effectivement amener prochainement les agences de notation à abaisser le statut des débentures de la société au rang de pacotille.

Avec le temps, les choses devraient toutefois s'améliorer, et les investisseurs qui auront fait le pari des faibles multiples de Cogeco (9,5 fois le bénéfice), être récompensés.

Pas comme au Portugal

Au Portugal, Louis Audet avait eu une bonne idée. Malgré les doutes initiaux, l'aventure avait dans ses premières années été créatrice de valeur.

C'est une décision du gouvernement local de privatiser le réseau de câblodistribution Portugal Telecom (en créant la société Zon), qui a tout fait déraper. Zon et Portugal Telecom se sont alors mises chacune à jouer dans le marché de l'autre, les prix ont chuté, et on connaît la suite.

Le seul risque, cette fois, est celui d'exécution. Qui n'est pas petit, mais auquel semble rattaché un bon potentiel.

Le réseau d'Atlantic, quatorzième câblo aux États-Unis, est à un bon niveau technologique, avec un taux d'adhésion à plusieurs services sous la moyenne américaine. Moins de 20 % des abonnés utilisent la télé numérique, tandis que la moyenne nationale est de 36 % ; 30 % sont sur l'Internet haute vitesse, alors que la moyenne est de 38 % ; 14 % sont abonnés au téléphone, alors que la moyenne est de 19 %. Une situation attribuable au fait qu'Atlantic est passée sur le tard à la technologie numérique. Avec le temps, les moyennes devraient être rattrapées, et une valeur intéressante serait ainsi créée.

L'acquisition de Peer 1 est plus controversée. Elle est réalisée à un multiple élevé de 12,7 fois le BAIIA, tandis que Cogeco est à 5,7 fois. Le réflexe de plusieurs est d'accoler le BAIIA de Peer 1 au multiple de Cogeco, ce qui a un effet immédiat de destruction de valeur.

Un tel multiple (12,7) signale cependant une forte croissance attendue du bénéfice pour l'avenir. D'ici quelques années, il se pourrait bien que l'entreprise de centres de données offre un rendement fort intéressant. Il faut parfois savoir reculer et prendre un peu d'élan pour sauter plus loin.

Cogeco faisait déjà le pari des centres de données au Canada. Elle a ouvert un centre à Toronto en 2012, en ouvrira un prochainement à Barrie (Ontario) et veut en ouvrir un ultramoderne à Montréal en 2014.

Peer 1 permet à Cogeco de réaliser une expansion dans le secteur des centres de données aux États-Unis

Tandis que la plupart des câblodistributeurs misent sur la téléphonie sans fil, Louis Audet parie plutôt sur le centre de données. Il confie d'ailleurs ouvertement ne voir aucun rendement intéressant dans le sans-fil.

La stratégie se défend. Et une intuition nous fait croire qu'elle portera ses fruits.

Notre seule divergence de vues avec M. Audet est à long terme. Le sans-fil n'est sans doute pas payant pour l'heure, mais il aurait peut-être mieux valu quand même y investir il y a quelques années. Il risque en effet de venir un jour où la technologie sortira le câble d'affaires, ou mettra à tout le moins une très forte pression sur ses marges. Les réseaux sans fil pourront en effet attaquer les marchés des câblodistributeurs (et offrir un Internet de qualité identique), mais les réseaux de câble ne pourront pas rejoindre d'autres marchés que le leur.

Mais ça, c'est pour beaucoup plus loin dans le temps. D'ici là, le titre de Cogeco devrait s'être significativement redressé.

DANS LE DÉTAIL

Le titre sur cinq ans

COGECO CÂBLE (CCA ; 41,99 $)

Données de marché

Symbole: CCA

Prix actuel: 41,99 $

Fourchette 52 sem.: 34,45 $ - 53,54 $

Dividende: 1,04 $

Valeur boursière: 1,3 G$

Prévisions de bén. par action ($ US)

ANNÉE / 2013 / 2014

Août / 4,26 $ / 4,63 $

T1 / 0,86 $ / 1,00 $

T2 / 1,13 $ / 1,17 $

T3 / 1,17 $ / 1,26 $

T4 / 1,24 $ / 1,34 $

Recommandations des analystes

Achat 2

Surperforme 3

Conserver 6

Sous-performe 1

Vendre 0

Cible des analystes

Moyenne: 43,75 $

Plus élevée 49,30 $

Plus basse 41,00 $

Sources : Bloomberg, Thomson Reuters

francois.pouliot@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/francois-pouliot

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