Victoire douce-amère, légitimité limitée et mandat restreint

Publié le 15/09/2012 à 00:00

Victoire douce-amère, légitimité limitée et mandat restreint

Publié le 15/09/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Pauline Marois espérait obtenir un gouvernement majoritaire pour réaliser son ambitieux programme fiscal et faire avancer le projet souverainiste. Elle a échoué, ce qui limitera grandement son action, en plus de réduire la durée de vie de son gouvernement.

Le Parti québécois n'a obtenu que 31,9 % des votes exprimés, ce qui veut dire que 68,1 % des électeurs ont voté contre ce qu'il représente. Son programme s'est radicalisé ces dernières années, tant sur le plan de la souveraineté avec les référendums d'initiative populaire que sur celui de l'économie. Dans ce secteur en effet, le programme met l'accent sur la distribution de la richesse (gels des droits de scolarité et du tarif des garderies, hausse des impôts des prétendus riches et des taxes des sociétés minières, abolition de la contribution santé de 200 $, gel du tarif d'électricité du bloc patrimonial) et l'interventionnisme, plutôt que sur la création de richesse.

Avec 31,2 % des voix malgré un bilan affligeant d'allégations de corruption et d'un taux d'insatisfaction de 70 %, le Parti libéral s'en est sorti honorablement, ce qui témoigne de la crédibilité de son message, axé sur la stabilité et la croissance de l'économie. Jean Charest laisse un riche héritage sur le plan économique et sur celui de la gestion des finances publiques. Il sera aussi regretté pour le rayonnement du Québec à l'étranger, aucun de ses prédécesseurs n'ayant fait autant à ce chapitre.

Outre son déficit de légitimité, le gouvernement Marois sera confronté au ralentissement généralisé de l'économie. Cela se produira aussi bien en Europe, où les principaux pays sont en récession, qu'en Chine, où la croissance de la production faiblit, et surtout aux États-Unis, où la création d'emplois est anémique. Cette conjoncture touchera inévitablement le Canada, dont le Québec, et la croissance des recettes fiscales en souffrira, ce qui placera le gouvernement Marois devant le dilemme suivant : soit respecter l'objectif de l'équilibre financier dès l'an prochain et abandonner ou reporter plusieurs de ses engagements ; soit sacrifier l'objectif du déficit zéro et réaliser les promesses faites par le parti aux clientèles qu'il a courtisées.

Son gouvernement vivra avec une épée de Damoclès, dont la chute dépendra du temps que prendra le Parti libéral pour se trouver un nouveau chef et de la vitesse avec laquelle la Coalition avenir Québec regarnira sa caisse électorale. Il est improbable que ces derniers tentent de renverser le gouvernement Marois lors du prochain budget, mais on peut penser qu'ils voudront le faire au printemps 2014, afin de provoquer de nouvelles élections.

D'ici là, le gouvernement réussira sans doute à trouver certains accommodements sur des questions non fondamentales avec l'un ou l'autre des deux principaux partis d'opposition, mais il risque de se heurter à un mur sur des enjeux jugés importants sur les plans de la question nationale, de la langue, de l'identité de la fiscalité. Et comme il est minoritaire, le PLQ et la CAQ pourront bloquer des projets de loi sans que leur geste ait nécessairement pour effet de renverser le gouvernement.

Budgets difficiles en vue

Le prochain budget sera sans doute l'occasion d'âpres négociations en raison des enjeux suivants :

1. Le maintien ou non de l'objectif de l'équilibre budgétaire en 2013-2014, alors que l'économie ralentit ;

2. L'imposition ou non de mesures fiscales jugées inappropriées par les milieux d'affaires ;

3. Le respect ou le report des engagements du programme péquiste dans un contexte de contraction de l'économie. Le gouvernement devra mettre beaucoup d'eau dans son vin, mais il pourrait obtenir un appui de la CAQ sur la taxation accrue des dividendes et des gains en capital.

C'est lors de la confection du deuxième budget du gouvernement Marois au printemps 2014 que la situation devrait se corser. Alors que celui-ci sera pressé de pousser plus loin son programme d'action, les deux principaux partis d'opposition seront plus en mesure d'empêcher sa réalisation. Pour sa part, la population sera alors devenue plus réceptive à la tenue d'une autre élection. Un impondérable dans ce scénario toutefois : les dommages que l'enquête sur la corruption dans la construction pourrait infliger aux partis libéral et québécois.

Pour faire oublier sa marge de manoeuvre restreinte sur le plan purement québécois, le gouvernement ne manquera pas de demander à Ottawa le transfert au Québec de certains pouvoirs. Or, sa faible légitimité le privera de tout pouvoir de négociation sur ce terrain.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Les fédérations étudiantes des universités et des collèges du Québec ont rendu les armes. Elles renoncent même au compromis que le gouvernement Charest leur avait proposé sur le financement de l'aide aux étudiants. Ce faisant, elles rompent avec la CLASSE, qui revendique toujours la gratuité, et avec laquelle elles avaient conclu un pacte de solidarité. Celui-ci s'est révélé un empêchement d'en venir à une solution négociée qui aurait réglé le conflit étudiant.

Je n'aime pas

Les sondages ont sous-estimé le vote libéral lors des dernières élections. Ce biais vient du fait que les sondeurs et les médias qui publient leurs résultats répartissent le vote des électeurs discrets au prorata des votes exprimés, induisant ainsi la population en erreur. Or, les électeurs discrets se retrouvent surtout parmi les personnes âgées, les allophones et les gens plus conservateurs, qui votent davantage pour le Parti libéral que pour les autres formations. Autre pratique malsaine pour la démocratie, des médias ont publié comme réalistes des résultats de sondages faits avec de très petits échantillons et comportant une forte marge d'erreur. Ce n'était pas sérieux !

jean-paul.gagne@tc.tc

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