Une ombre plane au-dessus du marché immobilier

Publié le 21/07/2012 à 00:00

Une ombre plane au-dessus du marché immobilier

Publié le 21/07/2012 à 00:00

L'«exubérance irrationnelle» est de retour... et cette fois-ci, elle touche le marché immobilier du pays. Le Québec, en particulier Montréal, n'y échappe pas.

C'est Alan Greenspan, alors président de la Réserve fédérale américaine, qui avait lancé cette expression désormais célèbre au moment de la folie techno, à la fin des années 1990, trois ans avant que la bulle n'explose. Vrai, il a été moins clairvoyant avec l'autre folie, immobilière celle-là, qui a fini par décomposer l'économie américaine, mais le terme est resté : il s'applique à la frénésie qui s'empare d'un groupe de personnes en train de perdre le sens des réalités.

Les Montréalais n'ont qu'à regarder autour d'eux, surtout au centre-ville. On a l'impression que les projets de copropriétés germent comme la mauvaise herbe après la pluie. Oh, sur papier, les condos sont attirants, d'autant plus que les promoteurs visent une clientèle aisée, mais nous devons bien être deux ou trois à nous poser la même question : où vont-ils trouver les acheteurs ? La demande est-elle vraiment si forte ?

Remarquez, on vise notamment les investisseurs, ceux qui pensent réaliser un bon coup en profitant d'une appréciation des prix de l'immobilier, et pas simplement les personnes qui rêvent d'habiter au centre-ville. Les autres possibilités ne sont pas inspirantes : les taux d'intérêt sont misérables, tandis que les sursauts de la Bourse donnent le vertige. L'immobilier, ça, c'est du solide !

La brique peut être solide, mais les hausses des dernières années paraissent insoutenables. Après la stagnation des années 2000, les prix ont progressé un peu partout au Canada. Dans la région de Vancouver, ils sont partis en orbite, au point où une maison ordinaire se vend maintenant 10 fois le revenu annuel disponible d'un ménage. C'est plus du double de ce qui est considéré comme viable. D'ailleurs, cette bulle - car c'en est une - commence à se dégonfler.

Montréal n'a pas connu les mêmes excès. C'est probablement pourquoi les prix continuent à grimper. Au deuxième trimestre, selon Royal Lepage, ils ont monté de 0,5 % pour une maison individuelle et de 3,9 % pour les condos.

Mise en garde

Pendant ce temps, les pépines continuent de se faire aller... Pour l'ensemble du pays, en juin, les mises en chantier ont été beaucoup plus nombreuses qu'on ne le prévoyait, surtout au Québec et en Colombie-Britannique. Assez pour que, dans une note récente, les économistes du Mouvement Desjardins écrivent cette mise en garde : «L'essor de la construction neuve suscite toutefois des inquiétudes quant à la capacité du marché à absorber les nouvelles unités...»

La population de Vancouver a crû ces dernières années grâce à l'immigration asiatique, souvent fortunée. C'est en bonne partie ce qui a alimenté la bulle. Montréal aussi dépend de l'immigration, mais son apport est nettement moins marqué. Et les nouveaux arrivants sont moins riches.

Donc, la question demeure : mais qui habitera ces nouvelles copropriétés ?

Au moins, l'analyse de Desjardins aide à dissiper un mythe : contrairement aux apparences, la part des condos haut de gamme (800 000 dollars et plus) dans l'offre globale, à Montréal, n'atteint pas 1 %. Elle reste marginale. Par contre, l'avalanche d'annonces récentes va inévitablement amplifier la proportion. Et cela, sans compter tous les chantiers en cours qui s'adressent à une clientèle diversifiée, alors même que la démographie québécoise bascule, puisqu'elle compte désormais plus de gens âgés que de jeunes. Tous les ingrédients sont en place pour une recette éventuellement explosive, même si le péril n'est pas immédiatement en la demeure.

Les taux d'intérêt sont historiquement bas et vont le demeurer pendant encore plusieurs mois, ce qui va aider à soutenir le marché. Même le resserrement des normes décrétées par le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, ne sabordera pas le marché. En fait, s'il y a un risque, il vient plutôt de l'intérieur. Les nouvelles unités à venir semblent si nombreuses qu'elles pourraient bientôt surcharger l'offre. Et quand le bateau commence à tanguer, le redresser devient bien difficile.

Pas de désastre, donc, mais pas de paradis facile non plus. Les maisons et les condos sur le marché retrouveront leur premier rôle : celui d'abriter des gens qui cherchent un meilleur toit. Pour l'investissement, il faudra repasser.

DE MON BLOGUE

Ralentissement économique

Même la demande pour les cossins (chinois) faiblit

À 7,5 %, la croissance de l'économie chinoise ferait soupirer d'envie tous les pays industrialisés. Mais pour ce gigantesque pays, c'est à peine suffisant [...] Et on constate l'essoufflement graduel des exportations chinoises par cet autre indicateur révélateur : la demande mondiale pour les cossins de Noël faiblit.

Vos réactions

«Personnellement, je ne crois pas aux chiffres publiés par la Chine. À mon avis, quelqu'un désirant tâter le pouls de l'économie chinoise aurait plutôt intérêt à analyser ses partenaires commerciaux qui publient des données plus vérifiables. À titre d'exemple, les exportations de Taïwan affichaient une contraction annualisée de 10 % en mai 2012.»

-ABC

«Le Père Noël aura aussi pour plusieurs années à avoir moins de cossins à livrer. Et n'allez surtout pas croire qu'il prendra des kilos en surplus, car il aura inévitablement une moins forte ration de biscuits et de lait.»

- codepre $ $

rene.vezina@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/rene-vezina

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