Un exercice mal conçu, qui n'aura pas la crédibilité espérée

Publié le 13/04/2013 à 00:00

Un exercice mal conçu, qui n'aura pas la crédibilité espérée

Publié le 13/04/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Il y a un risque à courir deux lièvres à la fois : celui de perdre les deux. Malgré la sagesse de cet adage, la première ministre Pauline Marois poursuit deux objectifs bien distincts avec sa commission sur l'assurance-emploi : 1) démontrer que la réforme du programme fédéral pénalisera gravement les chômeurs ; 2) faire avancer la cause de la souveraineté.

Puisque le Parti québécois n'a été porté au pouvoir qu'avec 32 % des voix, il se peut qu'une grande partie des électeurs, qui n'en peuvent plus des chicanes avec Ottawa, jugent cet exercice futile et le considèrent comme un gaspillage de fonds publics. La commission a été dotée d'un budget de 1,5 million de dollars.

Curieusement, le gouvernement n'a rien fait pour donner de la crédibilité aux conclusions de sa démarche. En présentant cette «commission nationale d'examen» comme l'outil que s'est donné le gouvernement pour dénoncer les initiatives fédérales jugées nuisibles au Québec et en en confiant la présidence à deux indépendantistes (une personne aurait suffi), Mme Marois en a fait un exercice au service de la cause souverainiste. Bernard Landry avait été plus stratégique en confiant la présidence de sa commission sur le déséquilibre fiscal à l'ex-ministre libéral Yves Séguin.

D'ailleurs, il est révélateur que le principal porte-parole du gouvernement dans ce dossier soit Alexandre Cloutier, ministre junior, délégué à la gouvernance souverainiste, et non à la ministre senior Agnès Maltais, la plus concernée par l'enjeu de l'assurance-emploi. Autre incohérence : le communiqué du gouvernement ne fait pas mention du programme de formation professionnelle annoncé dans le budget Flaherty, que le ministre Nicolas Marceau a pourtant dénoncé avec emphase. Pourtant, la formation professionnelle est de compétence provinciale, alors que l'assurance-emploi relève du fédéral.

La prépondérance de la promotion de la souveraineté sur l'assurance-emploi dans la conception de la commission Rita Dionne-Marsolais - Gilles Duceppe empêchera celle-ci d'obtenir l'appui des deux principaux partis d'opposition à l'Assemblée nationale. Quant au gouvernement Harper, il aura beau jeu d'en rejeter les conclusions en accusant le gouvernement Marois d'avoir fait de la politique sur le dos des chômeurs.

Stephen Harper ne sera pas loin de la vérité, car au lieu de travailler avec les autres provinces pour monter une offensive crédible face au projet fédéral, la commission québécoise se concentrera sur une tournée du Québec, qui lui permettra d'entendre les récriminations des victimes des réductions de prestations. Elle répétera l'exercice fait l'automne dernier par le Conseil national des chômeurs et chômeuses, qui a tenu 15 rencontres régionales.

«Ce n'est pas vrai qu'on va laisser crever les régions», a dit le ministre Cloutier dans son message aux médias. Or, si son gouvernement était vraiment sérieux, il renoncerait à son projet de surtaxe minière, ce qui aiderait à freiner l'hémorragie d'emplois à hauts salaires dans cette industrie. Il pourrait aussi maintenir le programme de construction des six petites centrales en région que la ministre Martine Ouellet a décidé d'abandonner. Au lieu d'éliminer les entraves à la création d'emplois et de lancer des initiatives structurantes, le gouvernement préfère se battre pour des chèques de secours direct.

Compte tenu de la présence de l'actuaire Michel Bédard au sein de la commission d'examen, on peut penser que celle-ci retiendra la proposition qu'il a déjà faite de rapatrier l'assurance-emploi au Québec.

Il est vrai qu'il serait logique de placer sous une même autorité l'assurance-emploi, la sécurité sociale et la formation professionnelle, mais le Québec n'a pas les moyens d'intégrer le programme fédéral. Selon des estimations récentes, les prestations d'assurance-emploi versées aux Québécois seraient de 800 MS supérieures aux cotisations perçues au Québec. M. Bédard a déjà suggéré d'élargir l'assiette fiscale. Sait-on que l'emploi manufacturier est à un creux historique ? Sait-on que le transfert de l'assurance parentale, qui devait coûter 350 M$, coûte maintenant près de 2 milliards de dollars ? Non, merci.

Il se peut que la réforme fédérale aille trop loin. S'il est essentiel que le programme d'assurance-emploi ne soit ni un substitut à l'aide sociale ni un mode de vie, il importe qu'il soit équitable. C'est à l'optimisation de ce programme que nos gouvernements doivent se consacrer.

jean-paul.gagne@tc.tc

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