Un conflit injustifié qui finira mal pour les lockoutés d'Alma

Publié le 14/01/2012 à 00:00

Un conflit injustifié qui finira mal pour les lockoutés d'Alma

Publié le 14/01/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le conflit de travail qui vient de débuter à l'aluminerie de Rio Tinto Alcan (RTA) à Alma risque de mal finir pour les 755 travailleurs syndiqués qui ont été mis en lockout.

Ce différend porte sur une question de principe, la sous-traitance. L'employeur en veut plus pour réduire ses coûts. Il pratique déjà ce mode de gestion dans d'autres entités de production. De son côté, le syndicat des Métallos, qui représente les salariés, veut un plancher d'emploi de façon à freiner la sous-traitance, qui s'accroît avec les années.

Aucun emploi actuel n'est menacé par la demande de l'employeur. Les seuls impacts réels d'une sous-traitance accrue seront le transfert d'emplois, essentiellement dans des PME de la région, qui offrent des salaires inférieurs à ceux des employés d'Alcan, et la réduction éventuelle des revenus du syndicat. L'intérêt de ce dernier ne concorde pas avec celui des employés d'avoir un bon emploi, ce qui leur est garanti. L'intérêt du syndicat réside plutôt dans les cotisations qu'il perçoit sur les salaires de ses membres. Un plancher d'emploi protégerait ses revenus. Or, aucun employeur soucieux de contrôler ses coûts ne veut de plancher d'emploi.

Un joyau à préserver

Le syndicat appuie son argumentation sur la rentabilité de l'usine, qui serait très élevée. Il est certain que celle-ci est l'une des plus rentables de RTA. Lancée en 2000, utilisant une technologie moderne et dotée d'une capacité de production annuelle de plus de 400 000 tonnes, cette usine est un joyau dans l'ensemble des installations de RTA. Son coût en électricité est très bas puisque la compagnie possède ses propres centrales hydro-électriques. Celle-ci paie toutefois des redevances à l'État québécois sur l'eau qui passe dans ses centrales hydroélectriques. La partie non utilisée de l'électricité produite dans ses installations est achetée par Hydro-Québec.

Une transaction trop coûteuse

Il est clair que RTA doit accroître la rentabilité de son secteur de l'aluminium. Rio Tinto a payé très cher l'achat d'Alcan : 38,1 milliards de dollars américains (G $ US) comptant pour un actif de 44 G $ US. Rio Tinto avait déjà un actif de 4 G $ US dans ce secteur. La transaction a été conclue le 15 novembre 2007. Quand celle-ci a été annoncée à l'été 2007, le prix de l'aluminium était d'environ 1,25 $ US la livre. Ce prix a même atteint 1,40 $ US au début de 2008. De l'été 2008 à février 2009, celui-ci a baissé rapidement jusqu'à 0,60 $ US. Il a ensuite remonté jusqu'à 1, 20 $ US au printemps 2011, avant de rechuter jusqu'à 0,90 $ US actuellement. Avec le ralentissement de l'économie, notamment de celle de la Chine, premier producteur mondial, l'avenir s'annonce sombre. Autre indice, Alcoa, qui a subi une perte, réduira sa capacité de 12 %.

Ce niveau de prix est catastrophique pour RTA ; on peut penser que Rio Tinto n'aurait jamais acquis Alcan au prix qu'elle a payé si elle avait connu l'avenir. Alcoa, leader du secteur à l'époque, avait offert 33 G $ US pour Alcan, en incluant un échange d'actions.

La division de l'aluminium de RTA a réalisé en 2010 un bénéfice net de 773 millions de dollars (M $) sur des revenus de 15,2 G $ et des actifs de 37,3 G $. Ce bénéfice lui a ainsi procuré des rendements respectifs de seulement 5,1 % sur ses revenus et de 2 % sur son actif. La société a même subi une perte de 587 M $ en 2009, après avoir obtenu un bénéfice net de 1,34 G $ en 2008. Au premier semestre de 2011, elle a réalisé un bénéfice net de 379 M $ sur des revenus de 7,95 G $, soit une marge nette de 4,8 % et un rendement de moins de 1 % sur l'actif.

Dans son message aux actionnaires, la direction affirme travailler sur «des changements dans l'organisation, une gestion disciplinée de ses installations, une réduction de ses coûts et une hausse de ses marges», de façon à livrer un milliard de bénéfice brut additionnel en 2014. RTA réévalue le sort d'un certain nombre de ses installations.

Les salariés d'Alma ne semblent pas avoir évalué sérieusement le marché de l'aluminium ni la sous-rentabilité de ce secteur pour RTA avant de plonger dans ce conflit, qu'ils risquent fort de perdre. Pour RTA, le retour à une rentabilité acceptable est trop crucial pour se laisser charrier par ses syndiqués d'Alma.

RTA continue de croire au Québec, comme en font foi ses intentions d'investir des milliards de dollars additionnels au Québec.

L'affrontement actuel à l'usine d'Alma est injustifié. La sous-traitance n'est pas une calamité. Bien au contraire, en assurant la rentabilité des entreprises, elle contribue à leur pérennité et à l'enrichissement collectif.

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