Pourquoi Westeel veut aider les pays émergents à limiter leurs pertes agricoles

Publié le 10/11/2012 à 00:00

Pourquoi Westeel veut aider les pays émergents à limiter leurs pertes agricoles

Publié le 10/11/2012 à 00:00

Par Pierre Théroux

Westeel façonne le paysage rural canadien depuis plus de 100 ans. Ses silos à grains en acier, qui permettent aux agriculteurs d'entreposer leurs récoltes à l'abri des intempéries, jonchent les campagnes de l'ouest du pays et même du Québec. Longtemps concentrée au Canada, l'entreprise manitobaine a maintenant des visées sur les pays du BRIC, l'Afrique du Nord et l'Europe de l'Est.

Fondée en 1905 sur les rives de la rivière Seine à Winnipeg, où elle a toujours son siège social dans le quartier français de Saint-Boniface, Westeel a concentré ses activités presque exclusivement au Canada au cours des 100 premières années de son existence.

Puis, au tournant des années 2000, cette entreprise phare du secteur agricole canadien décidait de sortir de sa zone de confort pour explorer de nouveaux champs.

«Le marché canadien avait atteint sa maturité. Pour assurer notre croissance, il fallait s'implanter dans d'autres régions du monde», explique André Granger, président de cette entreprise qui vend annuellement quelque 8 000 silos pour l'entreposage de grains, de semences ou d'engrais, de même que des réservoirs pour l'industrie pétrolière et gazière.

L'entreprise, qui accapare aujourd'hui 60 % du marché canadien de l'entreposage de grains, a initialement concentré ses efforts aux États-Unis avant de prendre la direction de l'Europe. Aujourd'hui, elle exporte ses produits dans une trentaine de pays.

La Chine dans la mire

Westeel lorgne maintenant des marchés «qui produisent d'importantes quantités de céréales, mais dans lesquels les infrastructures d'entreposage sont nettement déficientes», dit M. Granger. L'entreprise mise uniquement sur ses produits destinés à l'industrie agricole pour faire davantage sa marque à l'étranger, dit-il.

Westeel cible notamment la Chine qui vient au premier rang mondial avec une production annuelle de plus de 500 millions de tonnes. Or, la Chine enregistre chaque année des pertes de 65 M de tonnes (13 % de sa production), soit l'équivalent de la production totale du Canada !

De son côté, l'Inde perd quelque 20 % de sa récolte annuelle. Le Brésil et la Russie, qui sont parmi les cinq principaux producteurs céréaliers mondiaux, déplorent aussi la perte de millions de tonnes de récolte annuellement. Dans ces pays du BRIC, un fort pourcentage des récoltes est conservé dans des conditions médiocres.

«Les récoltes pourrissent à l'air libre, parce qu'elles sont simplement laissées dans des sacs par terre ou sous des bâches et des toits de métal», note André Granger. Selon lui, les gouvernements auraient intérêt à mieux protéger leur production de céréales pour garantir la sécurité alimentaire, avant de vouloir l'augmenter.

Un bureau en Espagne

Westeel s'intéresse aussi à l'Ukraine, huitième producteur mondial de céréales, à l'Europe de l'Est en général et à l'Afrique du Nord. Il y a un an, pour accroître sa présence dans ces régions du monde, l'entreprise choisissait Madrid pour implanter son premier bureau de ventes à l'extérieur du Canada.

Le choix de l'Espagne s'est imposé par «l'important réseau de fournisseurs de silos déjà établi et sa proximité avec les pays ciblés», explique M. Granger.

La vente des produits de Westeel à l'étranger passe par la conclusion d'alliances avec des partenaires locaux, notamment des fabricants ou des distributeurs d'équipements agricoles.

«Nous avons les produits et le savoir-faire technologique, mais nous devons aussi compter sur des gens qui comprennent bien les particularités du marché.»

Les partenaires locaux sont en première ligne, par exemple, pour informer l'entreprise des types de silos requis pour certaines régions, compte tenu des diverses réglementations ou encore des conditions climatiques.

S'installer à l'étranger

Westeel exploite cinq établissements manufacturiers (un au Manitoba, trois en Saskatchewan et un en Alberta). L'entreprise n'écarte toutefois pas l'idée de s'implanter dans les marchés ciblés en y construisant des usines ou en faisant des acquisitions, ce qu'elle n'a jamais fait auparavant.

«Ça fait partie de nos scénarios de développement», dit André Granger. D'autant, précise-t-il, que les tarifs douaniers de certains pays empêchent l'entreprise d'y exporter ses produits à des prix concurrentiels.

LES ENJEUX AUXQUELS WESTEEL FAIT FACE

LE RISQUE

Bien évaluer les coûts

Le développement de nouveaux marchés ne passe pas seulement par l'immense potentiel qui semble s'offrir sur un plateau d'argent. «On ne doit pas se laisser séduire uniquement par la demande et les occasions d'affaires qui se présentent. Il faut bien évaluer tous les coûts et les risques», souligne André Granger. Il cite en exemple les frais liés à l'établissement de partenariats et les risques associés à l'instabilité politique d'un pays.

LE DÉFI

Toujours innover pour résister aux géants

Westeel est l'un des cinq plus importants fabricants mondiaux de silos d'entreposage. Devant elle se dressent deux géants américains : GSI, qui affiche des revenus de 700 millions de dollars comparativement à 142 M$ pour Westeel, et Brock Grain Systems qui appartient à la société d'investissement Berkshire Hathaway du magnat Warren Buffett.

«Il faut sans cesse innover pour rivaliser avec ces concurrents et développer de nouveaux marchés», explique M. Granger. L'entreprise, qui a conçu et produit les premiers silos à grains en acier dans les années 1920, dit continuer à développer des produits toujours plus robustes et plus résistants à la corrosion et aux intempéries.

LE CONSEIL

Adapter ses produits

Westeel prend bien soin d'offrir ou d'adapter ses produits selon les besoins ou les caractéristiques des différents marchés visés. «Il ne faut pas arriver avec des produits standards, surtout dans les régions du monde où les risques de tremblement de terre, par exemple, sont plus élevés», précise M. Granger.

WESTEEL EN BREF

Revenus

142 M$ (2011)

125 M$ (2010)

Westeel réalise la majorité de ses revenus au Canada

Canada : 80 %

Reste du monde : 20 %

5 usines

539 employés

Principaux pays producteurs de céréales

(en millions de tonnes)

Chine : 512,2

États-Unis : 496,4

Inde : 268,2

Brésil : 141

Russie : 101,2

France : 74,6

Canada : 65,6

Ukraine : 57,8

Allemagne : 46,7

Depuis 2003, Westeel est une filiale de Vicwest, un fabricant et distributeur ontarien de revêtements métalliques pour murs et toitures, de panneaux métalliques isolants et architecturaux et de tabliers d'acier. Vicwest est cotée à la Bourse de Toronto depuis 2004.

«Les fortes moissons, au Canada et dans d'autres pays producteurs de céréales, entraîneront une demande en équipements d'entreposage, ce qui profitera à Westeel.» - Robert Winslow, analyste de la Financière Banque Nationale

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise canadienne et analysons ses risques.

Sur le Web, Les Affaires s'associe à L'actualité, Canadian Business, The Report on Business, The Economist Intelligence Unit et à la banque HSBC pour offrir un site axé sur les exportations. À lire sur affairessansfrontieres.ca.

pierre.theroux@tc.tc

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