Ottawa doit autoriser l'achat de Nexen par la Chine

Publié le 04/08/2012 à 00:00

Ottawa doit autoriser l'achat de Nexen par la Chine

Publié le 04/08/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le gouvernement canadien «évaluera attentivement le bénéfice net pour le Canada» de l'offre d'achat de Nexen par China National Offshore Oil Co., a déclaré le premier ministre Stephen Harper, tout en ajoutant qu'il ne «faut pas présumer de la décision dans un sens ou dans l'autre du gouvernement».

CNOOC a offert 15,1 milliards de dollars américains pour acheter au comptant la totalité des actions de Nexen, la 6e société non intégrée de production et d'exploration pétrolières et gazières du Canada. Étant donné que l'offre d'achat a été approuvée par le conseil d'administration de Nexen, que le gouvernement albertain la voit d'un bon oeil et qu'Ottawa veut diversifier les marchés pour nos hydrocarbures, il y a de fortes chances que le gouvernement Harper soit favorable à cet achat. Il est toutefois pleinement justifié que le gouvernement garde son jeu de cartes ouvert, puisque la transaction soulève déjà de l'opposition.

L'offre de CNOOC est avantageuse à plusieurs égards :

- le prix offert est de 61 % supérieur à la valeur au marché de l'action ; une bonne part de cet argent sera versée à des Canadiens ;

- la Chine est déjà ou deviendra le plus important client du Canada pour les matières premières ; elle représente aussi un marché de plus en plus important pour nos manufacturiers (tels que Bombardier) et nos entreprises de services (telles que celles d'assurance) ;

- CNOOC établira le siège social de ses activités américaines à Calgary et inscrira ses actions à la Bourse de Toronto ;

- CNOOC poursuivra le plan d'affaires de Nexen ; ses énormes ressources financières lui permettront de développer Nexen ;

- CNOOC pourrait aider à financer le projet d'oléoduc Northern Gateway d'Enbridge, qui pourrait se révéler plus coûteux que prévu en raison des conditions exigées par la Colombie-Britannique. Puisque CNOOC est une société d'État et qu'elle ne paie pas d'impôts, Ottawa pourrait exiger un tel appui en contrepartie de l'autorisation de la transaction.

Nexen n'est pas Potash

Le dossier de Nexen diffère grandement de celui de Potash Corporation, que BHP Billiton a tenté d'acheter au prix de 39 G$ en 2010. La transaction fut refusée par Ottawa.

Potash est le plus important producteur mondial de potasse. Nexen n'est pas stratégique pour le Canada, où elle réalise 30 % de sa production de pétrole. La moitié de sa production d'or noir est faite en mer du Nord.

Le gouvernement de la Saskatchewan, où Potash réalise l'essentiel de sa production et où elle a son siège social, s'était fortement opposé à l'offre hostile de BHP. L'Australie, où BHP a son siège, est beaucoup moins stratégique que la Chine pour le Canada.

Les obstacles

Aussi avantageuse soit-elle pour le Canada, la transaction CNOOC-Nexen n'est pas sans présenter certaines difficultés pour Ottawa. CNOOC est contrôlée par le gouvernement chinois, qui pourrait l'utiliser à des fins autres que commerciales. Washington avait invoqué sa «sécurité nationale» comme raison pour refuser en 2005 l'offre d'achat par CNOOC de la pétrolière américaine Unocal, même si cette dernière exerçait la plupart de ses activités dans des régions autres qu'américaines.

Il se pourrait que les États-Unis s'opposent à la transaction CNOOC-Nexen sous prétexte que la pétrolière de Calgary exerce 10 % de ses activités dans le golfe du Mexique. La campagne présidentielle apportera de l'eau au moulin des ennemis de la Chine et accentuera la pression sur le président Obama, qui a déjà refusé le tracé original du projet d'oléoduc Keystone de la société TransCanada. Ces adversaires voudront en profiter pour obtenir des concessions de la Chine. De plus, plusieurs membres du Congrès voient l'Alberta comme l'arrière-cour de leur pays et croient avoir une option sur notre pétrole. Ils n'aiment pas qu'Ottawa veuille diversifier ses marchés pour les hydrocarbures de l'Ouest canadien.

C'est dans ce contexte politique que doit naviguer le gouvernement Harper. Bien qu'il veuille sans doute s'assurer de garder bien ouvertes les portes du marché américain, il doit aussi continuer d'améliorer les relations commerciales du Canada avec la Chine, dont l'économie pourrait supplanter celle des États-Unis dans une dizaine d'années.

Ottawa doit avaliser la transaction mais, en même temps, tenter d'en tirer des bénéfices additionnels pour l'industrie.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Il est primordial que les peuples d'origine différente qui veulent assurer leur prospérité se donnent des dispositifs politiques et économiques favorisant la démocratie et l'inclusion. C'est exactement ce que vise l'entente historique sur la gouvernance du territoire d'Eeyou Istchee-Baie-James que viennent de signer le gouvernement du Québec et la nation crie. L'entente prévoit un nouveau gouvernement régional paritaire qui remplacera la municipalité de la Baie-James.

Je n'aime pas

En deux mois, l'action de Facebook a perdu 42 % de sa valeur (de 38 $ US, son prix d'émission, à moins de 22 $, après la publication de ses premiers résultats financiers). C'est une bonne indication que le prix de l'action de Facebook a été gonflé artificiellement par la promotion, l'effervescence et la cupidité qui ont accompagné son entrée en Bourse, et que les acteurs de cette manipulation (ses dirigeants et les profiteurs des grandes banques) ont exploité la naïveté des investisseurs. Reste à voir comment tout ce beau monde se tirera d'affaire face aux recours collectifs intentés en raison de «l'information incomplète et fausse» qui aurait été véhiculée lors de l'émission des actions de la société.

jean-paul.gagne@tc.tc

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