La taxe sur les transactions financières doit être universelle

Publié le 04/02/2012 à 00:00

La taxe sur les transactions financières doit être universelle

Publié le 04/02/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le sommet de Davos ne pouvait se tenir sans un débat sur le projet de taxe sur les transactions financières (TTF). Alors que la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président français, Nicolas Sarkozy, ont défendu le bien-fondé d'une telle taxe, le premier ministre britannique, David Cameron, s'est inscrit en faux contre cette mesure, estimant que la zone euro devait s'arranger avec ses problèmes.

Condescendant et arrogant, M. Cameron a dit que l'Allemagne devait aider les pays les plus endettés de la zone euro, que les pays de la zone euro devaient emprunter sur leur crédit collectif et que la Banque centrale européenne devait acheter de la dette souveraine, soit imprimer de la monnaie. Son but était de se faire du capital politique auprès des Britanniques, alors que son pays impose déjà une taxe sur l'achat d'actions, la Stamp Tax.

Avant d'analyser le pour et le contre d'une TTF et d'en tirer des conclusions, voyons d'abord quelques concepts.

Commençons par la TTF. Cette taxe est inspirée de la «taxe Tobin» sur les transactions de devises, proposée en 1972 par James Tobin, prix Nobel d'économie. Son application a toujours été vue comme problématique, car il a été impossible d'obtenir l'unanimité des principaux pays pour la mettre en place.

Cette taxe était la seconde solution imaginée par l'économiste américain pour réduire la volatilité des taux de change. Tobin avait d'abord suggéré que les grands pays se donnent une monnaie commune et une politique monétaire et fiscale commune, ce qui aurait conduit à une intégration économique.

Il est intéressant de constater que l'Union européenne (UE) chemine lentement vers ce concept. Dix-sept des 27 pays membres de l'UE ont adhéré à l'euro et se sont dotés d'une politique monétaire commune. Mais ils ne se sont toujours pas donné de politique fiscale commune, qui aurait pu empêcher la crise de l'euro. L'idéal serait que l'UE avance dans cette voie, mais c'est trop espérer, du moins à court et à moyen terme. Toutefois, c'est une piste que la zone euro aurait intérêt à suivre pour assurer sa survie. Mais cela signifie une perte d'autonomie supplémentaire pour les pays membres.

Limite de la Stamp Tax britannique

Revenons maintenant à la Stamp Tax du Royaume-Uni. Selon Wikipédia, 70 % des achats d'actions échappent à cette taxe, parce que les transactions faites entre intermédiaires financiers sont exemptées. Cela explique pourquoi Londres demeure un des plus grands centres financiers de la planète, que la spéculation y est florissante et que les grandes banques d'affaires britanniques spéculent abondamment, sans compter qu'elles ont dû être sauvées de la faillite par l'État lors de la dernière crise financière.

David Cameron pourfend le projet de TTF de Merkozy, car cette taxe serait appliquée sur tous les achats d'actions, d'obligations et de produits dérivés faits dans un pays donné, peu importe la provenance de la commande. Son taux serait de 0,1 % de la valeur de la transaction, ce qui est inférieur au 0,5 % de la Stamp Tax. Pour amadouer les Britanniques, Merkozy présente la TTF comme une Stamp Tax Plus, mais Cameron s'affiche comme un partisan de la déréglementation, dont ses amis de la City lui sauront gré. Il ne veut surtout pas donner de la crédibilité à la TTF, car, s'il fallait qu'elle se fraie un chemin au sein du G20, il subirait de la pression pour y adhérer. Il la voit comme une menace grave pour des centaines de milliers d'emplois de la City.

La TTF vise à contrer le fléau de la spéculation, à réduire les transactions que les banques d'affaires font pour elles-mêmes et à procurer des revenus supplémentaires aux États. Le G20 en a discuté, mais l'a écartée. On craint qu'elle n'entraîne une baisse de la liquidité sur les marchés, des coûts plus élevés pour les emprunteurs, des pertes d'emplois dans les capitales financières, et qu'elle nuise aux opérations de couverture (hedging).

Pourrait-elle être appliquée dans les seuls pays de la zone euro ? Certains pays membres pourraient s'y opposer, car plus la région d'application de la taxe sera restreinte, plus sa portée sera réduite et plus les pertes d'emploi risquent d'être élevées dans les capitales financières de ces pays (Francfort, Paris).

Sur le plan mondial, la TTF restera un projet tant que les États-Unis n'y adhéreront pas. Élections obligent, M. Sarkozy se montre pressé et parle de l'introduire en France, ce qui est un pari très risqué. Par contre, ce risque pourrait être acceptable dans la zone euro.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Ottawa refusera de financer le projet d'amphithéâtre sportif de Laval si une équipe de hockey professionnelle s'y installe. Selon les plans actuels, l'amphithéâtre sera géré par Evenko, la division spectacles des Canadiens de Montréal, et son principal utilisateur seraient les Bulldogs de la Ligue américaine, un club-école des Canadiens installé à Hamilton. Ottawa a déjà refusé de financer le futur amphithéâtre de Québec, qui servira surtout aux intérêts de Quebecor.

Je n'aime pas

Les déboires de Research In Motion (RIM), concepteur et fabricant du fameux BlackBerry, principal fleuron de la technologie canadienne, sont une grande déception. Toutefois, une autre déconvenue doit servir de leçon : c'est l'acharnement que Jim Balsillie (notre photo), coprésident et cochef de la direction de RIM, a mis pour acquérir une équipe de la Ligue nationale de hockey. Après s'être fait dire non par le propriétaire des Penguins de Pittsburgh en 2006, M. Balsillie a fait une offre d'achat des Predators de Nashville en 2007, a tenté de séduire le propriétaire des Sabres de Buffalo en 2008 et s'est battu en cour en 2009 pour acquérir les Coyotes de Phoenix. C'est une distraction qu'aucun chef de la direction ne devrait se permettre.

jean-paul.gagne@tc.tc

À la une

Bourse: records en clôture pour Nasdaq et S&P 500, Nvidia première capitalisation mondiale

Mis à jour le 18/06/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Les titres de l’énergie contribuent à faire grimper le TSX.

Stellantis rappelle près de 1,2 million de véhicules aux États-Unis et au Canada

Environ 126 500 véhicules au Canada sont concernés par le rappel.

Le régulateur bancaire fédéral maintient la réserve de stabilité intérieure à 3,5%

L’endettement des ménages reste une préoccupation pour le Bureau du surintendant des institutions financières.