Jusqu'où peut-on tolérer la tyrannie d'une minorité ?

Publié le 21/04/2012 à 00:00

Jusqu'où peut-on tolérer la tyrannie d'une minorité ?

Publié le 21/04/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Jusqu'à quel point une minorité peut-elle empêcher la majorité d'avoir accès à des services importants que celle-ci a pleinement le droit de recevoir selon l'ordre social établi ?

C'est la question que pose le blocage de l'accès des salles de cours par une minorité d'étudiants qui s'opposent au dégel des droits de scolarité universitaires par l'État.

Ces activistes n'exercent cette prérogative que grâce à la tolérance de la société et de ses institutions (le gouvernement, les établissements d'enseignement, la police, etc.). Ces étudiants sont dans l'illégalité, car leurs actions ne reposent sur aucune base légale. On pourrait les citer en justice, mais on ne le fait pas pour ne pas jeter de l'huile sur le feu.

Ils n'ont pas le «droit de grève», car ce droit ne peut être exercé que par des salariés (les étudiants n'en sont pas) et dans le cadre de lois sur le travail. Aucune loi n'encadre les rapports que les associations d'étudiants ont avec les établissements d'enseignement. Les étudiants ont le droit de manifester, mais ils n'ont pas le droit de faire du «piquetage» (autre action inspirée des tactiques syndicales) pour bloquer l'accès à des lieux publics.

Il vient un moment où la majorité n'a plus à tolérer la tyrannie d'une minorité, surtout lorsque les actions de cette dernière causent des préjudices importants, comme l'impossibilité d'avoir accès aux cours prévus, le report d'une session d'études et la perte d'un travail étudiant. D'ailleurs, c'est sur la base de tels arguments, présentés par des étudiants, que des juges accordent des injonctions interlocutoires. Il est révélateur que ce ne soit pas les établissements d'enseignement qui demandent ces injonctions.

La tolérance a beau être une grande vertu, elle est incompatible avec le désordre et les saccages récents de lieux publics, comme on l'a vu récemment à l'Université de Montréal et au bureau de circonscription de la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp.

Malheureusement, même si ce vandalisme nuit à la cause des étudiants (la majorité silencieuse réprouve la violence, comme on l'a vu récemment lors du débrayage illégal de certains syndicats de la construction lors du débat sur la loi 33), il n'empêche pas plusieurs opposants traditionnels au gouvernement Charest (syndicats, artistes, activistes de tout acabit, etc.) de descendre aussi dans la rue, et les partis d'opposition de profiter du conflit pour favoriser leurs intérêts politiques.

Négocier quoi ?

Selon un sondage récent, 60 % des Québécois appuient la position du gouvernement sur le dégel des droits de scolarité, mais une proportion semblable lui demande de négocier avec les étudiants. Mais négocier quoi ?

Puisque le dégel des droits de scolarité est pleinement justifié et légitime pour plusieurs raisons, la seule ouverture à la portée du gouvernement ne peut toucher que l'accessibilité aux études. Les ministres Line Beauchamp et Raymond Bachand ont déjà offert de moduler le remboursement des prêts en fonction des revenus des étudiants une fois qu'ils auront accédé au marché du travail, ce qui est une amélioration certaine, mais cette ouverture a été rejetée du revers de la main.

Le 15 avril, la ministre de l'Éducation a fait un pas de plus en annonçant la création d'une «commission permanente et indépendante», qui pourra faire des recommandations au gouvernement sur la gestion des universités. Cet exercice, qui s'inspire d'une proposition d'une association étudiante, pourrait permettre de dégager certaines ressources et d'améliorer ainsi les bourses, notamment pour les étudiants qui ont les meilleurs résultats et qui réalisent leur programme de cours selon l'échéancier prévu.

Les leaders étudiants doivent s'inspirer des chefs syndicaux. S'ils ne peuvent prévoir comment vont finir les conflits qu'ils déclenchent, les vrais leaders syndicaux savent généralement profiter d'une ouverture de la partie adverse pour trouver le compromis qui leur permettra de sauver la face.

Le débat sur les droits de scolarité a assez duré, d'autant plus qu'il a débouché sur le désordre et l'illégalité. La main que la ministre a tendue dimanche à deux leaders étudiants est opportune, et ceux-ci doivent saisir cette occasion pour reprendre le dialogue et préparer leur sortie du cul-de-sac dans lequel ils ont entraîné leurs troupes.

Ils démontreraient ainsi qu'ils sont responsables, ils éviteraient à leurs membres beaucoup d'inconvénients et ils pourraient se dire qu'ils ont vécu une expérience inoubliable.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Des représentants d'une cinquantaine d'entreprises québécoises ont participé à la mission commerciale organisée récemment par le gouvernement du Québec. Le Brésil est de loin le pays le plus attrayant de l'Amérique du Sud. Sa croissance économique est forte et ses besoins sont énormes. Le Brésil est de plus membre du Mercosur, qui réunit aussi l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay et qui forme un marché commun de 242 millions d'habitants.

Je n'aime pas

Le président de Qatar Airways, Akbar Al Baker, a profité d'un passage récent à Montréal pour blâmer Air Canada, qui empêcherait sa société d'avoir plus de permis d'atterrissage au Canada (Qatar Airways est limitée à trois vols par semaine entre Montréal et Doha et veut offrir des vols quotidiens reliant Doha et Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver). Il est vrai qu'Air Canada fait pression sur Ottawa pour bloquer Qatar Airways et conserver ses parts de marché, mais il y a une bonne explication à cela. Les loyers très élevés réclamés par Ottawa aux grands aéroports canadiens pour les terrains qu'ils occupent les obligent à exiger des droits d'atterrissage abusifs, pénalisant ainsi leur plus gros utilisateur, Air Canada.

jean-paul.gagne@tc.tc

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