Faut-il abandonner l'éolien ?

Publié le 09/03/2013 à 00:00, mis à jour le 07/03/2013 à 11:00

Faut-il abandonner l'éolien ?

Publié le 09/03/2013 à 00:00, mis à jour le 07/03/2013 à 11:00

Après l'abandon des minicentrales hydroélectriques, voici que le débat se transporte du côté de l'éolien. Québec semble vouloir se désengager en partie. Bonne décision.

En marge d'un récent colloque de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, la ministre des Ressources naturelles du Québec, Martine Ouellet, a été assez explicite sur les intentions du gouvernement. «Il devra y avoir de nouveaux projets qui se réaliseront, mais nous sommes en train d'analyser l'ampleur et comment les choses vont se dérouler», a-t-elle dit.

En clair, les 700 mégawatts (MW) d'énergie éolienne promis par Jean Charest avant les dernières élections sont partiellement en péril.

L'annulation des 50 MW de projets de minicentrales était une bonne décision de l'État. Hydro-Québec Distribution a des surplus d'électricité jusqu'en 2027, et nous n'avons pas besoin de cette électricité. Chaque fois qu'Hydro achète un kilowattheure, elle est assurée de faire une perte, parce que le prix auquel les électrons seront revendus sur le marché extérieur est inférieur au prix d'acquisition.

La situation risque de durer longtemps. Une étude de l'Université du Texas prévoit que le schiste américain devrait livrer une importante croissance de volumes jusqu'en 2040. Ce n'est qu'à partir de cette date qu'on atteindrait le plafond. C'est dire que les prix de l'électricité (souvent produite à partir du gaz) risquent de demeurer faibles.

Dans un récent billet, on s'était personnellement prononcé contre ce nouvel appel d'offres de 700 MW dans l'éolien.

Un plaidoyer plus étoffé de l'industrie

L'industrie est depuis revenue avec un plaidoyer plus étoffé. Sommairement, il en va ainsi.

Le Québec compte sur 5 000 emplois dans l'éolien, dont 2 300 liés à la fabrication d'équipements. Plus ce qui est indirect. Il s'est créé ici une expertise intéressante, qui risque de tomber si Québec ne permet pas de faire le pont par une reprise de la demande d'éolien dans quelques années.

Du point de vue de l'industrie, le marché américain est appelé à reprendre, parce que l'oncle Sam voudra à un certain moment avoir un équilibre entre une énergie au coût d'exploitation fluctuant (l'électricité au gaz) et une énergie renouvelable au coût déjà connu (l'éolien).

Les surplus d'Hydro-Québec Distribution sont par ailleurs exagérés à ses yeux, alors qu'en moyenne, d'ici 2027, ils ne représentent que 1 % de ses approvisionnements.

En outre, contrairement à ce que tous prévoient, le prochain appel d'offres ne devrait pas être de 11,5 cents le kWh, mais tourner davantage autour de 8,5 cents. Le dernier appel d'offres, explique-t-on, était morcelé en plusieurs petits parcs éoliens pour permettre à plusieurs communautés de participer.

L'industrie indique enfin que le Québec avait promis 4000 MW aux entreprises du secteur, et que ne pas livrer les 700 MW manquants minerait sa crédibilité auprès des investisseurs internationaux.

Qu'en penser?

L'argument de la crédibilité internationale du Québec est à prendre en compte, mais aucune promesse n'a été faite quant à ces mégawatts. Il s'agissait plutôt d'une volonté exprimée dans une stratégie.

Le pourcentage des surplus (1 %) peut sembler faible, mais Hydro-Québec Production a aussi amplement d'électricité pour répondre à la demande québécoise si des difficultés d'approvisionnement survenaient. Il est en outre préférable d'acheter notre énergie d'Hydro, parce que l'argent entre dans le trésor public plutôt que d'aller à des tiers (les producteurs privés).

Il n'y a pas non plus de garantie que les trois grands manufacturiers - GE, Enercon et REpower - continueront de produire au Québec si, après l'appel d'offres de 700 MW, il n'y a plus de contrats à obtenir ici et que le marché se transporte aux États-Unis.

Un ancien responsable de l'évaluation des grands ouvrages chez Hydro-Québec avance une option intéressante dans nos pages cette semaine. Pierre Gingras suggère de créer un réseau national d'électricité qui permettrait d'exporter les électrons verts des barrages québécois vers l'Ontario. Notre électricité serait produite à un coût moindre que celle provenant de l'éolien et du solaire, que la province voisine est à ajouter à ses réseaux. Il faudrait creuser l'idée. Mais il y a peu de chances que cette voie sauve l'éolien. Le projet semble au mieux éloigné, parce que l'Ontario est elle aussi en surplus actuellement. D'autant qu'au final, il resterait vraisemblablement beaucoup d'électricité chez Hydro-Québec Production qui pourrait être vendue ici (et l'argent resterait dans le trésor public).

Dans le contexte, on serait peut-être prêt à se rallier à l'orientation que semble adopter la ministre Ouellet : couper la poire en deux pour construire un pont vers une possible reprise de la demande en éolien aux États-Unis. Mais avec une forte réserve. Il y a un risque élevé que l'on paie et que l'industrie manufacturière spécialisée dans l'éolien disparaisse tout de même dans quelques années.

MON COMMENTAIRE

Je n'aime pas

Les mandats de ces chantiers ne sont pas clairs, et on ignore quelle sera la portée de leurs travaux. Le chantier chargé de revoir la politique de financement peut-il examiner la possibilité de restructurer certaines universités, de manière à créer des pôles d'excellence et éliminer de possibles duplications ? Et celle d'augmenter la recherche au bénéfice des entreprises moyennant rémunération ? Ce n'est pas clair. Souhaitons que les choses soient clarifiées prochainement. Par ailleurs, le chantier de 25 M$ sur de l'aide supplémentaire aux étudiants est injustifié, puisque les bonifications libérales avaient déjà été conservées.

J'aime

Le gouvernement du Québec aurait pu enterrer le dossier des universités avec sa décision d'assumer, à même le trésor public, la hausse des droits de scolarité décrétée par l'ancien gouvernement. Il préfère plutôt créer cinq chantiers, dont un sur l'établissement de nouvelles règles de gouvernance et un autre sur la politique de financement des universités. L'opération est peut-être politique, mais il vaut mieux continuer à explorer que tout arrêter.

francois.pouliot@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/francois-pouliot

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