Dur dur, parfois, de vendre du vert

Publié le 11/06/2011 à 00:00

Dur dur, parfois, de vendre du vert

Publié le 11/06/2011 à 00:00

Par Marie-Eve Fournier

Dans les affaires, comme dans la vie, une bonne intention n'est pas un gage de réussite. Et en matière de protection de l'environnement, plusieurs détaillants l'ont appris à leurs dépens.

Metro a voulu faire un geste pour la planète en réduisant l'emballage de ses ailes de poulet de marque Selection, en 2009. Exit la boîte de carton, seul le sac de plastique avait été conservé. La recette d'ailes était restée la même, mais les consommateurs ont eu l'impression d'en avoir moins pour leur argent, lorsqu'ils comparaient les produits dans les congélateurs.

Conséquence : les ventes ont tellement chuté que l'épicier est revenu à son ancien emballage cette année.

" Un changement, aussi positif soit-il, peut être mal perçu. Ici, l'élimination du double emballage a laissé croire à une diminution de la qualité du produit ", explique Marie-Claude Bacon, directrice des affaires corporatives de l'épicier québécois.

Rona s'est trouvée dans une situation similaire. Afin de réduire sa facture d'électricité, le quincaillier avait choisi, en 2008, de n'allumer que 20 % des luminaires de ses grandes surfaces. " Nous nous sommes aperçus que ça faisait baisser les ventes. Il a fallu revenir sur notre décision en 2010 ", raconte Claude Bernier, premier vice-président marketing et innovations. Aujourd'hui, des ampoules éconergétiques sont vissées dans tous les luminaires, et parfois, des détecteurs de mouvement sont utilisés pour provoquer l'allumage des lustres et des lampes.

Déclin de la demande au rayon écolo

Metro et Rona ne sont pas les seuls détaillants à prendre des initiatives qui ne trouvent pas beaucoup écho auprès des consommateurs. Walmart s'est notamment donné comme objectif, en 2007, d'offrir aux consommateurs une plus vaste sélection de produits écologiques.

Or, la demande pour les produits verts diminue, ce qui est un véritable " problème " dit Alex Roberton, porte-parole du géant du détail pour l'est du Canada : " Cela représente pour nous un gros défi. Au départ, quand nous avons mis des produits écologiques sur les tablettes, ils se vendaient bien, mais là, leur vente est en déclin. Alors on ne peut pas atteindre notre objectif... et il y a des coûts reliés à tout ça. " Repérer de nouveaux produits, négocier avec des fournisseurs, les " lister " comme on dit dans le jargon, revoir le planogramme des tablettes, faire sortir les produits qui ne se vendent pas, rien de tout cela n'est gratuit.

Les pharmacies Jean Coutu vivent exactement la même chose. " Il y a eu une vague pour les produits ménagers bios. Un engouement. Mais les consommateurs ont visiblement constaté que leur efficacité est moindre, puisque l'engouement a été de courte durée ", dit Hélène Bisson, vice-présidente aux communications.

Bien mettre ses produits en valeur

Selon Edouard Clément, vice-président opérations chez Quantis, un cabinet spécialisé en analyse du cycle de vie, deux conditions doivent être réunies pour qu'un projet vert réussisse : il ne faut pas toucher au portefeuille des consommateurs, et ces derniers doivent bien comprendre ce qui leur est proposé. " Certaines entreprises n'arrivent pas à mettre suffisamment en valeur les qualités des produits écologiques ou éthiques ", observe-t-il, en précisant qu'il faut à tout prix éviter le greenwashing, qui augmente le scepticisme à l'endroit de l'offre " verte ".

" Les consommateurs préfèrent les grandes marques nationales, constate pour sa part le représentant de Walmart. Et les produits verts sont souvent fabriqués par de petites entreprises qui n'ont pas de budget marketing pour se faire connaître. " La récession et le fait que le sujet est moins présent dans les médias expliqueraient aussi la perte de vitesse des produits d'entretien verts, pense-t-il.

Histoires de sacs

Dans la foulée de l'immense succès remporté par les sacs réutilisables, Metro a eu l'idée de proposer à ses clients, en 2009, de petits sacs en filet pour transporter les fruits et les légumes. Une première au pays. Mais cette solution pour remplacer les sacs de plastique est pratiquement passée inaperçue. Trop avant-gardiste ? Inutile ? Trop coûteuse (4,99 $ pour quatre sacs) ? Marie-Claude Bacon dit qu'un ensemble de facteurs expliquent cet échec, mais qu'elle ne peut " blâmer la clientèle. "

IGA a aussi vécu une histoire de sacs moins heureuse. " Il y a une quinzaine d'années, nous avions proposé des sacs en coton. Le premier mois, il y a eu un gros engouement, mais après cela, plus rien. On s'est retrouvés dans notre entrepôt avec une tonne de sacs. On ne savait plus qu'en faire ! " raconte la porte-parole, Anne-Hélène Lavoie.

Cet échec n'empêche toutefois pas IGA de poursuivre ses efforts. L'entreprise a été la première au Canada à construire un supermarché certifié LEED, à Saint-Pascal de Kamouraska, en 2007. Et son futur entrepôt de Terrebonne, qui doit être en activité en 2013, sera lui aussi construit selon les principes LEED (mais la certification ne sera pas demandée, parce que cela exige " trop de démarches "). IGA effectue par ailleurs du compostage dans une cinquantaine de magasins, une mesure lancée en 2008.

Étant donné l'adoption, en mars dernier, de la nouvelle Politique québécoise de gestion des matières résiduelles, Metro est aussi en train de tester le compostage, ce qui n'est pas évident, surtout en ville. D'ici la fin de 2015, Québec souhaite que 60 % de la matière putrescible résiduelle soit recyclée. Une obligation, parmi d'autres, qui coûtera " très cher " aux détaillants, constate le Conseil québécois du commerce de détail.

marie-eve.fournier@transcontinental.ca

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