«Cette décision est de nature idéologique ; nous allons réagir» - Yvon Bolduc, pdg

Publié le 30/03/2013 à 00:00, mis à jour le 28/03/2013 à 09:25

«Cette décision est de nature idéologique ; nous allons réagir» - Yvon Bolduc, pdg

Publié le 30/03/2013 à 00:00, mis à jour le 28/03/2013 à 09:25

Surprise et incompréhension. Tels ont été les sentiments des dirigeants du Fonds de solidarité FTQ lorsque, le jour du dépôt du dernier budget fédéral, ils ont appris que le gouvernement allait abolir le traditionnel crédit d'impôt de 15 % qui est accordé aux fonds de travailleurs.

«C'est inouï, ce qui se passe. Cette décision n'est pas de nature économique, elle est de nature idéologique. Mais nous allons réagir», a dit le pdg du Fonds de solidarité FTQ, Yvon Bolduc, lors d'une rencontre éditoriale avec Les Affaires.

Ottawa donne la possibilité aux intervenants de lui présenter des observations sur sa décision jusqu'au 31 mai. D'ici là, le Fonds a l'intention de bâtir une coalition. «Il semble y avoir une contrepartie qui a eu plus l'oreille du gouvernement que nous», dit M. Bolduc.

Il veut notamment prendre contact avec les autres fonds de travailleurs du Canada, aller chercher l'appui de gouvernements provinciaux, dont celui du Québec, et mobiliser les dirigeants des entreprises du Québec, particulièrement celles qui ont bénéficié de son soutien.

Une mission mal comprise, selon le Fonds

Le gouvernement fédéral abolit le crédit d'impôt en soutenant que les fonds de travailleurs manquent d'efficacité. En 2012, la mesure lui a coûté 145 millions de dollars. Il veut plutôt maintenant agir avec une nouvelle enveloppe de 400 M$, qui sera investie sur 7 à 10 ans dans des fonds de capital de risque.

Maxime Bernier, ministre d'État (Petite entreprise et Tourisme), juge que le Fonds FTQ avait à l'époque de sa création une mission de stimulation des investissements dans les entreprises en démarrage, mais fait valoir que les choses ont changé et qu'il ne remplit plus cette fonction. Le capital de risque de démarrage ne représente plus que 11 % de l'actif de 8,5 milliards de dollars du Fonds de solidarité, dit-il.

Yvon Bolduc ne nie pas le chiffre. Il estime cependant que la vision est réductrice et que la mission du Fonds FTQ est mal comprise. «Le spin est d'essayer de nous enfermer dans cette sous-catégorie [le capital de démarrage]», lance-t-il.

À son avis, il faut plutôt parler de capital de développement. La loi demande au Fonds de solidarité d'investir 60 % de son actif dans des placements québécois qui ne comportent aucune garantie. À l'heure actuelle, la proportion de ces placements atteint 67 %. «On est au-dessus de ce qui est demandé», souligne Yvon Bolduc.

Ce capital, affirme-t-il, ne vise pas un rendement optimal, mais vise plutôt, très souvent, à soutenir des emplois. Le reste de l'actif du Fonds sert à faire contrepoids aux risques et est investi dans des placements plus sûrs et dans d'autres endroits que le Québec.

Une rôle de prêteur de risque

À ceux qui lui reprochent d'avoir à l'intérieur de ces 67 % des placements quand même peu risqués, qui concurrencent d'autres acteurs financiers qui ne bénéficient pas d'avantages fiscaux, M. Bolduc rappelle la dernière crise financière. En 2009, le Fonds n'avait pas hésité à jouer son rôle de prêteur de risque et avait été particulièrement actif auprès d'entreprises québécoises qui avaient de la difficulté à faire renouveler leurs lignes de crédit.

«À ce moment-là, personne ne trouvait qu'on était de trop. On a pris des engagements de 1,3 milliard ; c'est ce qui a permis de rassurer d'autres acteurs», dit-il.

Par ailleurs, M. Bolduc dit ne pas voir quels acteurs financiers québécois critiquent le Fonds. «On n'a pas de preuve, mais on comprend que c'est idéologique et que ça vient de l'Ouest et de Bay Street», lance-t-il.

Dans l'éventualité où l'actif du Fonds de solidarité baisserait, il ne voit pas qui pourrait prendre sa place. La Caisse de dépôt et placement cherche un bon rendement ; ce n'est pas un capital aussi patient que celui du Fonds, qui tient autant compte de la nécessité de garder des emplois. Il reste Investissement Québec, mais, précise-t-il, «il faudrait dans ce cas que l'État mette 100 % du capital, alors qu'actuellement il ne lui en coûte que 30 % [15 % fédéral, 15 % provincial]».

Autre élément de mission, qu'il juge oublié dans la réflexion : l'obligation pour le Fonds FTQ de contribuer à l'épargne-retraite. «On a 2 239 entreprises partenaires [dans lesquelles le Fonds a investi] et 6 000 qui déduisent à la source. Sans nous, 200 000 personnes (sur 600 000 membres) n'auraient pas de régime de retraite. C'est le grand défi socio-économique que de responsabiliser des gens à mettre de l'argent de côté pour la retraite. Je ne peux pas croire qu'on est en train de saccager tout cela !» s'enflamme-t-il.

Oui, mais l'Ontario a aussi abandonné les fonds de travailleurs

Lorsqu'on lui fait remarquer que l'Ontario a aussi abandonné son crédit d'impôt aux fonds de travailleurs, Yvon Bolduc estime que l'on compare des pommes avec des oranges.

«Ils étaient trop nombreux, peu capitalisés et investissaient leur argent uniquement dans du capital de risque [sans portefeuille de stabilisation]. Ils n'avaient pas non plus la même mission. L'échéance des engagements envers les investisseurs n'était pas sur l'horizon de leur retraite (capital remboursable à 65 ans), mais sur 7 à 10 ans. Quand la bulle du capital de risque a dégonflé, ils ont eu de sérieux problèmes», dit-il.

Depuis le retrait du crédit d'impôt, en 2005, M. Bolduc note que les investissements en capital de risque sont en recul en Ontario, alors qu'ils continuent de grimper au Québec.

Qu'arrivera-t-il si le crédit d'impôt disparaît ?

Sur 10 ans, le rendement du Fonds de solidarité, en tenant compte des crédits d'impôt fédéral et provincial, atteint 9,8 %. En excluant les crédits d'impôt, il chute à 1,9 %.

Qu'arrivera-t-il si le fédéral ne fait pas marche arrière ? Les sorties de fonds ont atteint 550 M $ l'an dernier, mais les prévisions de celles-ci tournent plutôt autour de 750 M $ par année. La moyenne des entrées de fonds au cours des cinq dernières années a été de 660 M $. Les investisseurs continueront-ils d'injecter autant d'argent ?

M. Bolduc reconnaît qu'il n'a pour l'instant aucune idée de l'impact de la décision fédérale. Il note cependant que le crédit est encore valide pour 2013 et 2014 (il sera réduit à 10 % en 2015, à 5 % en 2016 et aboli par la suite) et que le Fonds est bien capitalisé.

«Nous allons appeler au dialogue et travailler fort pour faire renverser tout cela», conclut-il.

françois.pouliot@tc.tc

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