Cessons de rêver en couleur sur le potentiel pétrolier d'Anticosti

Publié le 25/08/2012 à 00:00

Cessons de rêver en couleur sur le potentiel pétrolier d'Anticosti

Publié le 25/08/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

François Legault, chef de la Coalition Avenir Québec, croit que les redevances que le gouvernement du Québec tirera du pétrole de l'île d'Anticosti lui permettront de rembourser une bonne partie de sa dette. Rien ne permet, actuellement, de faire une telle prédiction.

Pour sa part, la société Petrolia, qui détient, avec son partenaire Corridor Resources, les 35 permis ayant appartenu à Hydro-Québec, multiplie les communiqués de presse pour entretenir la confiance des investisseurs à l'égard de son action (1,40 $ à la Bourse de croissance). Petrolia fait état d'un «potentiel» de 30,9 milliards de barils de pétrole, selon une estimation de Sproule Associates de Calgary.

De son côté, Daniel Breton, candidat péquiste dans Sainte-Marie-Saint-Jacques, parle de réserves estimées de 40 milliards de barils ayant une valeur de 4 000 milliards de dollars. Ces chiffres sont souvent cités dans certains médias, laissant ainsi supposer que le Québec est assis sur une véritable fortune.

On fabule tellement sur le potentiel pétrolier de l'île d'Anticosti, que le groupe écologiste fondé par M. Breton accuse le gouvernement du Québec et Hydro-Québec de «vol du siècle» pour avoir cédé à de petites sociétés les permis d'exploration que la société d'État y a déjà possédés. Celui-ci s'est même rendu à la Sûreté du Québec pour y déposer une plainte. Ces permis auraient été vendus en échange d'une participation à des redevances éventuelles. Celle-ci serait infime, mais elle est toujours secrète.

Le 13 août, Petrolia a annoncé qu'elle réalisera bientôt des sondages stratigraphiques sur l'île d'Anticosti. Elle en retirera des carottes qui permettront d'analyser la qualité de matière organique trouvée dans la formation géologique de Macasty, l'épaisseur de celle-ci, la porosité et la perméabilité de la roche ainsi que des indices de pétrole s'il y a lieu.

Petrolia n'a pas révélé le coût de ce travail de base, qui lui permettra de savoir s'il y a lieu d'entreprendre éventuellement un véritable programme de forage.

Un potentiel toujours inconnu

On sait encore très peu de chose sur la structure susceptible de renfermer des hydrocarbures sous l'île d'Anticosti, car la quinzaine de forages effectués jusqu'à maintenant par Shell, Hydro-Québec et Petrolia n'ont rien donné de concret, d'où les retraits de Shell et d'Hydro-Québec.

Hydro-Québec a cédé ses permis en 2008, après avoir investi à l'île d'Anticosti et en Gaspésie environ 30 millions de dollars sur un programme d'exploration qui devait totaliser 330 M$ à la suite d'un mandat que Québec lui avait donné dans la foulée de sa stratégie énergétique 2006-2015. Ce virage à 180 degrés n'a jamais été vraiment expliqué, ce qui veut dire que le potentiel pétrolier de l'île d'Anticosti ne sera connu qu'après que Petrolia, Corridor et d'autres sociétés auront fait le travail que l'État québécois s'est refusé à exécuter.

Grâce à un autre virage à 180 degrés, Québec revient dans ce secteur en créant Ressources Québec, qui prendra la relève de l'ex-Soquip et d'Hydro-Québec pour appuyer des sociétés privées prêtes à investir dans l'évaluation du potentiel du sous-sol québécois en hydrocarbures. De toute évidence, la stratégie énergétique initiale du gouvernement n'a pas fonctionné, et la vision qu'on y trouvait a fait place à l'improvisation. Ainsi, la différence entre ce qu'Hydro-Québec aurait pu réaliser et ce qui sera fait par les propriétaires actuels des permis sera d'enrichir au passage certains actionnaires, qui auront besoin de toute façon de l'appui de l'État pour tenter de repérer un gisement de pétrole sur l'île d'Anticosti.

Seul un programme d'exploration d'envergure permettra d'y arriver. Puisque la formation de Macasty est schisteuse, les forages devront y être faits en partie à l'horizontale et en utilisant la fracturation hydraulique. À quelque 10 M$ par forage, un programme d'environ 50 forages pourrait coûter 500 M$, ce qui est bien au-delà de la capacité financière de Petrolia (encaisse de 22 M$, valeur boursière de 93 M$) et de Corridor (encaisse de 8 M$, valeur boursière de 66 M$.) Investissement Québec vient d'injecter 10 M$ dans Petrolia, qui a aussi vendu des unités qui lui ont rapporté 5,75 M$. Un tel programme pourrait même requérir la participation d'une société pétrolière qui aurait l'expertise et les ressources voulues pour s'y engager.

Il faudra plusieurs années pour évaluer le potentiel de l'île d'Anticosti et vérifier si ce qu'on y trouvera sera commercialisable.

Pour le moment, il faut cesser de rêver en couleur et de spéculer.

MON COMMENTAIRE

J'aime

François Legault a été courageux de dire que les jeunes Québécois de souche ne sont pas toujours aussi travaillants que les jeunes Asiatiques. Ce constat est aussi vrai pour d'autres nationalités. Il ne faut pas l'en blâmer, car il a dit la vérité. Même si on ne veut pas l'admettre, il y a au Québec une trop grande tolérance pour la médiocrité et une culture du plus petit dénominateur commun. Dans le monde très concurrentiel d'aujourd'hui, c'est une entrave majeure à une prospérité accrue.

Je n'aime pas

Alors qu'il supprime des emplois dans l'inspection des aliments et la sécurité aux frontières, le gouvernement Harper planifie le renouvellement de la flotte d'avions utilisés par les Snowbirds, qui présentent des spectacles acrobatiques aériens. Selon des documents obtenus par Postmedia, le coût estimé de ce projet est de 755 M$. C'est une très mauvaise utilisation de l'argent des contribuables, d'autant plus que le gouvernement canadien a accru sa dette considérablement au cours des dernières années. Les Snowbirds, qui sont gérés par le ministère de la Défense nationale, n'ont aucune utilité autre que celle de bien faire paraître l'Aviation royale canadienne.

jean-paul.gagne@tc.tc

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