Aux employeurs privés de s'ouvrir aux immigrants

Publié le 22/10/2011 à 00:00

Aux employeurs privés de s'ouvrir aux immigrants

Publié le 22/10/2011 à 00:00

On s'en doutait un peu : les immigrants ont la vie plus dure au Québec qu'ailleurs au pays, comme en fait foi leur taux de chômage, plus élevé ici que dans les autres provinces.

Une analyse toute récente vient confirmer cette situation : au Québec, 12,4 % des nouveaux arrivants âgés de 15 à 64 ans se retrouvent sans travail, comparativement à 10,4 % en Ontario et à 8,8 % en Colombie-Britannique, alors que les taux de chômage globaux sont à peu près les mêmes (de l'ordre de 7 %).

De là à conclure que les immigrants ralentissent plus qu'ils n'inspirent le progrès de l'économie québécoise... c'est là une conclusion à laquelle certains prétendument experts en sont arrivés dernièrement. Il suffit pourtant de creuser pour comprendre que le problème est complexe et qu'il met en cause nos propres résistances face au changement.

C'est ce que met en lumière Brahim Boudarbat, professeur à l'École de relations industrielles de l'Université de Montréal, dans un rapport intitulé «Les défis de l'intégration des immigrants dans le marché du travail au Québec», produit dans le cadre de sa participation au CIRANO. Un rapport d'autant plus pertinent qu'on commence à accepter le fait que le Québec va incessamment se retrouver en déficit de main-d'oeuvre (dès 2013, selon l'Institut de la statistique du Québec). L'industrie minière, par exemple, est en phase de recrutement intensif, et doit embaucher au minimum 6 000 mineurs d'ici cinq ans.

Mais... lorsque la discussion surgit, au Québec, elle dévie inévitablement vers le champ politique et la vulnérabilité de la société québécoise francophone, qui craint d'être marginalisée en Amérique du Nord avec l'afflux d'immigrants d'autres cultures. D'autant plus qu'ils ne contribuent pas tant que ça à la prospérité collective, et que beaucoup se contentent de se faire vivre en profitant du filet social québécois...

Ces préjugés agissent comme autant de prismes qui faussent notre regard. De là l'intérêt d'études comme celle du professeur Boudarbat, dont voici certaines observations éclairantes.

Au Québec, les immigrants qui ont obtenu un diplôme d'études postsecondaires à l'étranger sont pratiquement deux fois plus nombreux à chômer que ceux qui possèdent un diplôme canadien : 13 % par rapport à 7,8 %. En Ontario et en Colombie-Britannique, les deux provinces qui servent de comparaison dans l'étude, la différence n'est pas significative.

Parmi ceux qui n'avaient aucun diplôme, 20,5 % étaient sans travail en 2010, contre 17,9 % en Ontario et 15,8 % en Colombie-Britannique. Ils partent en mauvaise posture. Mais les diplômés universitaires ont aussi des problèmes, et ils sont eux aussi proportionnellement plus nombreux à chercher du travail ici : 9,4 %, comparativement à 9 % et à 8 %.

Serait-ce le fait d'une forme de discrimination à l'embauche ? On devine que les gens sondés hésitent à blâmer la société qui les accueille, mais il reste que «la proportion de ceux qui en ont parlé est légèrement plus élevée au Québec (21,8 %) qu'en Ontario (17,1 %) et en Colombie-Britannique (12 %)», écrit M. Boudarbat.

D'autres éléments intéressants ? Le secteur public, au Québec, est plus ouvert aux nouveaux arrivants qu'il ne l'est ailleurs au Canada. Un immigrant salarié sur six, au Québec, était à l'emploi des différents pouvoirs publics. En matière d'intégration au travail, les gouvernements montrent la voie. L'indifférence, ou la méfiance, demeure le lot du secteur privé. Et ce sont ces employeurs qui vont bientôt réclamer du renfort, quand ils ne se plaignent pas déjà de la pénurie de travailleurs.

Faut-il leur jeter la pierre ? Stigmatiser leur manque d'ouverture ? Non. M. Boudarbat dit que la faute retombe en partie sur les immigrants à qui il arrive de porter des lunettes roses et qui s'imaginent trop souvent qu'on les attend à bras ouverts. Même les Français éprouvent parfois ici des problèmes à faire reconnaître leurs compétences et doivent ajuster leurs aspirations. Aux dernières nouvelles, au moins 20 % d'entre eux abandonnaient et repartaient au bout de quelques années. Imaginez ceux des autres pays.

Et pourtant, l'immigration fait partie des variables dans le défi qui se pose au Québec pour assurer son avenir. Les sociologues devront mettre l'épaule à la roue, les employeurs aussi. On se rendra compte un jour que les problèmes ne proviennent pas tant du nombre d'immigrants que de notre volonté de bien les intégrer, avec les moyens appropriés, afin qu'ils participent pleinement à notre destin collectif.

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