À 131 ans, Meubles Fraser veut rajeunir

Publié le 12/11/2011 à 00:00

À 131 ans, Meubles Fraser veut rajeunir

Publié le 12/11/2011 à 00:00

Par Marie-Eve Fournier

Malgré son âge vénérable de 131 ans, Meubles Fraser veut séduire les jeunes professionnels. C'est tout un changement de stratégie pour cette entreprise familiale de 4e génération, dont l'unique point de vente a toujours visé une clientèle aisée, à la recherche de meubles classiques pour orner de vastes demeures. Et l'objectif est ambitieux : faire bondir les ventes de 20 à 30 % d'ici deux ans.

C'est dans un marché «changeant et plus difficile» que le président Ross I. Fraser a décidé l'an dernier de revoir le positionnement de son magasin et de voir ce qu'il pouvait faire pour rejoindre une clientèle plus importante. Image, stratégie de marque, choix de mobilier, design du magasin, site Web, médias sociaux, relations avec les fournisseurs, gamme de services, personnel, tout a été passé en revue. En tout, ces initiatives coûteront un million de dollars (ce qui comprend les stocks).

Il faut dire que le détaillant admet lui-même que «bon nombre de Montréalais [...] ne soupçonnent pas l'existence» de son commerce, situé dans le secteur industriel de Ville Mont-Royal. Malgré tout, Ross I. Fraser refuse d'y voir un échec. Il fait plutôt le constat que rares sont ceux qui passent devant Meubles Fraser par hasard, ce qui en limite forcément la notoriété.

«Le problème, c'est qu'on dépense 500 000 $ par année en publicité et beaucoup de gens n'ont jamais entendu parler de nous», ajoute le dirigeant de 56 ans, rencontré par Les Affaires. Avec le même budget, mais un nouveau message, il compte mettre fin à cette situation. De plus, le détaillant s'adressera à la fois à sa clientèle traditionnelle et aux 25-45 ans qui préfèrent souvent les meubles modernes.

Comment réussira-t-on à séduire ces deux types de consommateurs à la fois ? «Ça prend un budget énorme. Nous avons deux plans médias distincts. Ça prend des stratégies différentes. Ça se fait, mais ça coûte plus cher», répond Carol Alfieri, directrice des ventes et du marketing.

Nouveaux marchés

Ross I. Fraser mise aussi sur l'attrait grandissant du Quartier du design Royalmount, qui compte 65 entreprises (vente de meubles, de luminaires, d'électroménagers, d'accessoires de décoration), pour augmenter son achalandage et son attrait auprès des designers.

Tandis que les détaillants Germain Larivière, Maison Corbeil et JC Perreault prennent de l'expansion en périphérie de Montréal, Meubles Fraser n'envisage aucune expansion à court terme. «J'aime l'idée d'avoir un seul magasin. Ce n'est pas nécessaire pour nous d'aller à Laval ou sur la Rive-Sud, car les gens qui y résident viennent déjà chez nous. Si je prends de l'expansion, se sera sûrement en Ontario, dans quelques années», dit Ross I. Fraser.

LES STRATÉGIES

Une nouvelle image plus moderne

Exit le logo en ovale doré évoquant «la solidité, le style traditionnel, le très cher». «On s'est demandé si les jeunes seraient attirés par cela», raconte Ross I. Fraser. La réponse fut visiblement non.

Plusieurs environnements distincts

Dans chaque «galerie», le style musical est adapté aux meubles présentés afin de créer «une expérience unique». À certains endroits, le plancher est en béton plutôt qu'en tapis.

Collections plus modernes

Les meubles de style contemporain comptent désormais pour 50 % de l'offre, plutôt que 10 %. Ils sont pratiquement tous regroupés à l'étage supérieur du magasin, mais quelques pièces phare sont présentées à l'entrée.

L'utilisation des médias sociaux

«On veut avoir un dialogue, interagir avec notre clientèle. On veut obtenir du feed-back et que les clients aient un rôle dans l'entreprise. C'est une façon de communiquer plus constamment», affirme Carol Alfieri, directrice des ventes et du marketing.

Meubles Fraser croit par ailleurs que l'obtention de l'exclusivité pour le Québec de la vente de la collection italienne Clei lui permettra de s'associer avec des constructeurs de copropriétés. Ces meubles haut de gamme sont conçus pour les petits espaces. Des 5 à 7 seront organisés pour présenter les meubles aux promoteurs immobiliers, promet-on, avec la conviction que «l'intérêt pour cette collection sera énorme».

AVIS D'EXPERTS

Vincent Sabourin, directeur du Département de stratégie, École des sciences de la gestion de l'UQAM

«Si on veut rejoindre les francophones, on a un problème majeur d'emplacement, car 99,9 % d'entre eux ne savent pas où est la rue Devonshire. Seuls les gens d'Hampstead fréquentent naturellement le quartier [...] Meubles Fraser ferait mieux d'ouvrir un deuxième magasin, plutôt que d'avoir deux concepts sous un même toit. Les chances que les deux concepts soient moyens sont très élevées. L'expérience montre que les entreprises performantes font une seule chose et travaillent sans cesse sur cette chose-là. Ça va leur prendre sept essais et erreurs avant d'être bons, d'être sur un pied d'égalité avec Maison Corbeil, leur concurrent direct.»

Louis Hébert, spécialiste en stratégie d'entreprise, HEC Montréal

«L'industrie change. La concurrence est forte, agile et elle se déplace. Il faut s'adapter. Vouloir rafraîchir son image, c'est sain, mais ça ne veut pas dire que ça va fonctionner. Changer la perception que les consommateurs ont de son commerce, ça peut prendre des années

Se réinventer, c'est éminemment compliqué. Plusieurs entreprises essaient, mais peu réussissent. À courir deux lièvres à la fois, on risque de rater les deux et de perdre son avantage concurrentiel auprès des deux clientèles. L'offre peut devenir tellement confuse que plus personne ne s'y retrouve. Ça peut même mener à la disparition de l'entreprise.»

CE QU'IL FAUT RETENIR

Pendant que ses concurrents multiplient les points de vente, Meubles Fraser mise sur sa seule adresse, mais change son image, ses communications et son offre dans l'espoir de séduire une nouvelle clientèle de jeunes professionnels.

marie-eve.fournier@transcontinental.ca

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