Bruno-Marie Béchard

Publié le 01/07/2009 à 00:00

Bruno-Marie Béchard

Publié le 01/07/2009 à 00:00

Il a fait la une de Commerce en février 2003, peu après sa nomination. Huit ans plus tard, celui qui fut le plus jeune recteur en Amérique du Nord nous accorde son entrevue de départ. Quel bilan Bruno-Marie Béchard fait-il de ses deux mandats à la tête de l'Université de Sherbrooke ?

D'ici quelques semaines, Bruno-Marie Béchard s'envolera pour l'Asie. Un an à sillonner les routes de la Chine et de l'Inde avec sa femme et ses deux fils. Cette sabbatique, il devait la prendre il y a huit ans. À l'époque, il visait la Suisse. Toutefois, la vie et son employeur avaient d'autres plans pour lui : un poste de recteur, un défi qu'il ne pouvait qu'accepter. " C'est vrai, je suis un spécimen rare ! admet-il. J'ai été ingénieur, ensuite professeur, pour finalement devenir recteur. Disons que je n'avais pas envisagé les choses de cette façon. " Il oublie de mentionner une incursion en politique, en 2004, comme candidat pour le Parti libéral du Canada.

Le parcours est aussi atypique que celui qui l'a tracé. Recteur hyperactif, personna-lité publique qui ne pratique pas la langue de bois, Bruno-Marie Béchard ne fait rien comme les autres. Déjà en 2002, en prenant la barre de l'Université de Sherbrooke, le jeune homme étonnait en devenant à 36 ans le plus jeune recteur universitaire en Amérique du Nord. Huit ans plus tard, il surprend toujours. Mais cette fois, c'est pour avoir transformé de fond en comble l'Université de Sherbrooke.

En l'espace de deux mandats, il aura doublé le nombre de programmes offerts, augmenté de 25 % le nombre d'étudiants et de 85 % le taux d'attraction de l'institution. Même ses détracteurs - peu nombreux, doit-on dire - peuvent difficilement le critiquer. Sous son règne, l'Université de Sherbrooke est passée du stade d'une des universités canadiennes les moins bien cotées à celui d'université francophone la mieux cotée au pays par le magazine Maclean's.

Sa recette : " Développer ce que les autres universités n'offrent pas et faire preuve d'innovation en défrichant des terrains inexplorés ". En un mot : oser. D'ailleurs, c'est le mot d'ordre qui aura permis au jeune recteur de collectionner une foule de réalisations, dont la mise sur pied de nombreux programmes de formation continue, comme celui centré sur le transfert technologique annoncé en avril dernier. " Il n'y a pas de recette magique. Ce qu'il faut, c'est observer ce que font les autres pour ne pas le répéter, et développer ensuite notre propre créneau avec des idées avant-gardistes. "

Certains lui reprochent le fait que l'Université de Sherbrooke fasse concurrence aux deux universités francophones de la métropole en ayant pignon sur rue à Longueuil. Sa réponse : " Nous ne sommes pas une université régionale. Nous sommes une université installée en région. C'est bien différent. Environ 90 % des étudiants viennent de l'extérieur de cette région. "

Bruno-Marie Béchard ne peut s'empêcher d'aller à contre-courant. Tout comme il ne peut s'empêcher d'être optimiste. Il aime montrer que " faire autrement " est non seulement possible, mais aussi nécessaire pour avancer. Un exemple : en 2004, l'Université de Sherbrooke instaure, avec la Société de transport de Sherbrooke (STS), un programme qui permet aux étudiants de prendre l'autobus gratuitement. Une petite révolution qui coûte chaque année près d'un million de dollars à l'institution, mais dont l'impact est significatif. Près de 40 % des étudiants ont abandonné leur véhicule et six stationnements ont été remplacés par des espaces verts.

L'université, croit-il, n'est pas qu'un endroit où on donne de la formation. " Quand on y pense, c'est le seul moment de notre vie où nous sommes étroitement et cons-tamment en contact avec des gens de milieux différents. C'est le moment ou jamais de s'ouvrir à la nouveauté. "

On s'en doute, un optimiste comme lui déteste les clichés négatifs. Parmi ceux qui le hérissent le plus : l'image que l'on colle à la jeunesse québécoise. Pour lui, les jeunes sont tout sauf blasés. " Ils représentent l'avenir. Une société qui n'écoute pas sa jeunesse est une société qui meurt. Je peux vous assurer que les jeunes sont porteurs d'idées et de façons de faire nouvelles. Ce n'est pas à eux de se plier à nos méthodes, mais plutôt à nous de suivre leur rythme. " Pour ceux qui en doutent, il établit un parallèle avec le milieu des affaires : " Prenez GM. L'entreprise a-t-elle été à l'écoute des nouvelles tendances ? Non. Est-ce que ça lui a servi ? Aucunement. "

Écouter ne suffirait pas à assouvir son énergie. Il doit agir. Et pour tous les pro-jets qu'il démarre, il collabore avec des acteurs économiques, sociaux et municipaux. C'est son modèle de gestion. " Une université est à la fois un lieu d'apprentissage et de transfert de connaissances, et un lieu de formation pour le marché du travail. " Mais si elle désire atteindre ses objectifs, ajoute-t-il, elle n'a pas d'autre choix que de tisser des liens privilégiés avec des acteurs économiques et des municipalités, de mettre en place des stages qui répondront aux besoins de demain.

La réalisation dont il est le plus fier reste l'aménagement du nouveau campus de Longueuil, qui accueillera ses premiers étudiants en janvier prochain. C'est d'ailleurs dans un bureau du pavillon de Longueuil qu'il a reçu Commerce. " Venez, je vais vous montrer quelque chose. " Ses yeux s'illuminent ; il se lève d'un bond. Tout en parlant, il enjambe une chaise, traverse d'un trait le bureau et se faufile dans une autre pièce, dont l'immense fenêtre donne directement sur... le nouveau campus dont la construction n'est pas encore terminée.

Ce projet, c'est son bébé. " Nous avons travaillé extrêmement fort pour y parvenir. Il y a huit ans, si j'avais dit que nous aurions un pavillon comme celui-ci à Longueuil, jamais on ne m'aurait cru. Et pourtant. "

En quittant le rectorat à 44 ans, Bruno-Marie Béchard ne troque pas ses souliers d'universitaire contre les pantoufles d'un retraité. Il ira plutôt étudier les systèmes d'éducation qui émergent en Asie.

Pourquoi l'Asie ? " À cause de l'éveil de ce continent, la planète comptera trois fois plus d'universités d'ici quelques années. " Selon le ministère chinois de l'Éducation, 23 millions d'étudiants sont actuellement inscrits dans une université chinoise, ce qui représente près de 20 % des étudiants du monde, le plus grand bassin du globe. " Je veux voir sur le terrain de quelle façon ces institutions changeront le système d'éducation actuel. On s'en doute, elles s'inspirent de valeurs différentes des nôtres. "

Que fera-t-il à son retour ? " Tout est possible, répond-il. Je n'ai jamais eu d'objectifs professionnels à long terme. " Seule certitude : il compte continuer à participer à la vie démocratique du Québec d'une fa-çon quelconque. " C'est essentiel pour moi. " Admirateur inconditionnel de René Lévesque, il a été un militant souverainiste convaincu. " Je demeure nationaliste, mais je considère aujourd'hui que les défis de notre société sont davantage mondiaux. " C'est sûrement pour cette raison qu'en 2004, il s'est présenté comme candidat au Parti libéral du Canada. Un saut en politique est-il envisagé ? " À court terme, je ne crois pas. " Mais avec lui, rien n'est impossible.

ulysse.bergeron@transcontinental.ca

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