Gros plan sur des innovations numériques qui contribuent à rapprocher les villes de leurs citoyens.
1. Victoriaville : mettre en commun les idées
En février 2015, Victoriaville a mis en ligne la plateforme monidee.ca pour réaliser des consultations publiques à l'aide d'Internet. Cet outil numérique a été élaboré dans la foulée du projet de revitalisation du centre-ville afin de faire participer les citoyens dès le début du processus. L'objectif : «avoir un gros brainstorm communautaire», explique Jonathan Moisan, conseiller aux nouveaux médias à Victoriaville.
Les citoyens ont été invités à soumettre en ligne des idées pour ce chantier à l'aide d'un formulaire numérique. Ensuite, le grand public pouvait commenter et voter sur les propositions, à condition de dévoiler leur identité. Un processus de modération a permis de faire en sorte que les propos soient pertinents et que les idées soient classées dans les bonnes catégories. Une maquette électronique, pour visualiser une projection du résultat prévu, sera publiée en ligne et accueillera les commentaires avant que ne soient lancés les appels d'offres pour le chantier.
Une dizaine d'idées proposées et soumises au vote sur monidee.ca sont aujourd'hui intégrées au plan de revitalisation, alors qu'elles n'étaient pas prévues par l'administration au départ. Une deuxième consultation a été amorcée sur le site l'été dernier à propos du développement du Vieil-Arthabaska. Pour les deux consultations, 416 idées ont été suggérées, dont 216 ont été publiés sur le site. Quelque 6 000 votes ont été enregistrés, et les pages ont été visitées près de 52 000 fois.
Victoriaville a élaboré cet outil numérique de A à Z, en partenariat avec deux entreprises locales, Libergia et Vertisoft. Le projet a coûté 14 000 $ en frais directs liés à la programmation et à l'intégration graphique. Victoriaville veut maintenant offrir sa plateforme à d'autres municipalités qui souhaitent mener des consultations publiques de la même façon.
2. Laval dévoilera ses données sur les accidents de la route
En novembre, Laval prévoit mettre en ligne 14 bases de données qui seront accessibles à tous ses citoyens. Ces informations brutes pourront être téléchargées dans une section du site Web de la municipalité, à l'instar de celles que fournissent les portails de données ouvertes des villes de Montréal et de Québec.
Toutefois, Laval innove en rendant publique sa base de données détaillant les endroits où se sont produits les accidents de la route, une première au Québec, selon Annie Thibodeau, responsable des communications numériques de la Ville. Ces données, fournies par le service de police, permettront notamment d'établir quels sont les intersections ou les axes routiers comportant le plus de risques d'accident. Ces informations pourront influer sur les décisions municipales en matière d'aménagement et de gestion des transports, tout en renseignant les citoyens.
D'autres bases de données seront mises en ligne, comme celles concernant les chantiers routiers, les obstructions des voies publiques, la géolocalisation de l'ensemble des adresses domiciliaires et des immeubles publics, ainsi que celles associées au zonage.
Les résultats de plusieurs sondages menés par la Ville en 2014 sur la satisfaction des citoyens, des entreprises et des organismes à l'égard de ses services se trouveront aussi sur le site.
«Tous les services municipaux seront interpellés et invités à ouvrir des bases de données et à présenter un plan de diffusion à cet effet», indique Mme Thibodeau.
La municipalité souhaite voir des citoyens, des entreprises ou des organisations se servir de ces informations brutes pour créer leurs propres applications, qui pourraient bénéficier à l'ensemble de la communauté lavalloise. Les municipalités de Laval, de Gatineau, de Montréal, de Québec et de Sherbrooke ainsi que le gouvernement du Québec sont en discussion au sujet de la création d'une plateforme commune de partage de données ouvertes.
3. Rouyn-Noranda utilise la toile pour favoriser le covoiturage
Depuis janvier, les habitants de Rouyn-Noranda peuvent trouver par Internet des personnes pour faire du covoiturage à l'intérieur de la ville. Transport Le Nomade, un service municipal, proposait déjà un maillage de cet ordre, mais à l'aide de réservation par téléphone, par formulaire papier ou en personne.
Le développement du site, conçu par l'agence Kiwi Création, a coûté 8 000 $. Son fonctionnement s'apparente à des sites de service de covoiturage interurbain. Le site accorde plus de flexibilité en ce qui concerne les jumelages, comme dans la modification ou la mise à jour des disponibilités. Les conducteurs peuvent désormais offrir une place à la dernière minute. La création du site Internet de Transport Le Nomade a aussi été l'occasion de centraliser l'information au sujet des autres services de transport collectif, soit l'autocar et le transport adapté.
L'un des objectifs est de permettre aux citoyens de se déplacer plus facilement vers les quartiers ruraux, parfois situés à une cinquantaine de kilomètres l'un de l'autre. «On veut désengorger notre secteur urbain et régler nos problèmes de stationnement» en réduisant le nombre de voitures sur les routes, explique Lise Paquet, coordonnatrice administrative responsable du dossier du transport à la Ville de Rouyn-Noranda.
Depuis l'inauguration du volet Web, Transport Le Nomade a gagné une cinquantaine de membres. Les grands employeurs, notamment, seront sensibilisés à ce service pour inciter les travailleurs de différentes entreprises à voyager ensemble.
4. Gatineau à la carte
Gatineau travaille sur un projet de «Tableau de bord», un outil numérique interactif et intuitif qui permettra de croiser et de visionner différentes données sur une carte géographique de la ville. Le projet a démarré en janvier 2015 et la fonctionnalité devrait être accessible au public au début de l'année 2016. DBx Geomatics, une firme locale spécialisée dans la création d'applications de cartographie, a décroché le contrat de 110 000 $ pour mettre au point cet outil.
«Ce sera un lieu de centralisation de l'information et de démocratisation, car on permettra aux gens d'utiliser l'information et de faire les cartes qui leur semblent utiles», souligne Maurin Dabbadie, géomaticien au service d'urbanisme de Gatineau.
Dans une première phase, l'outil permettra de visualiser sur une carte de Gatineau les données issues des recensements de 1991 à 2006 et de l'Enquête nationale sur les ménages de 2011. Avec une division de la carte en 74 communautés, quartiers et lieux d'appartenances, cet instrument numérique constituera une précieuse ressource pour le service des loisirs de la municipalité, afin d'adapter son offre aux habitants selon leur situation géographique.
Dans une deuxième phase, prévue pour le début de l'année 2017, les informations sur les permis d'affaires, les permis de construction et les transports devraient être ajoutées.
Pour la Ville de Gatineau, le «Tableau de bord» constitue une occasion de se délester de nombreux fichier de format pdf et de cartes statiques distinctes présentes sur son site Web. Mais surtout, il s'agit d'une manière d'abaisser le nombre de demandes d'information au sujet de la démographie, de l'économie, du transport, de la construction, de l'habitation ou des permis d'affaires, que la municipalité doit actuellement gérer par dizaines chaque semaine.
5. Une puce incite à jeter moins à Beaconsfield
Beaconsfield s'est doté d'un système de gestion électronique des déchets afin d'encourager ses citoyens à moins jeter aux ordures ce qui peut être recyclé ou composté. D'abord expérimenté grâce à un projet-pilote touchant quelques centaines de résidences en 2013 et 2014, le système électronique s'appliquera en 2016 aux 6 500 bacs à ordure déployés dans la ville. Ces bacs seront tous dotés d'une puce de radio-identification (RFID). Services Matrec, qui réalise la collecte des déchets, installera sur son camion un lecteur qui peut détecter le code identifiant de chaque puce, reliée au matricule, à l'adresse domiciliaire et au volume du bac. Il transmet dans une base de données chaque levée de bac effectuée, ce qui permet de facturer chaque levée supplémentaire aux 12 qui sont incluses dans la tarification annuelle de base.
Beaconsfield prévoit que cette technologie diminuera le nombre de déchets produit sur son territoire. Pendant la durée du projet-pilote, même si aucune tarification incitative n'y avait été associée, les participants produisaient en moyenne 31 % d'ordures de moins que les non-participants. «On avertit les citoyens qu'on surveille l'utilisation du service. Cela les conscientise et ils sont encouragés à utiliser les autres services (comme la collecte des matières recyclables et des matières organiques ) qui sont disponibles», dit Andrew Duffield, directeur des Travaux publics à la Ville de Beaconsfield. Comme la collecte est maintenant robotisée, un seul opérateur devrait effectuer la collecte dans le camion, plutôt que deux. M. Duffield prévoit des économies de près de 100 000 $ en 2016 dans la collecte des ordures comparativement à 2014, mais le coût global de la collecte des matières résiduelles devrait demeurer stable.
6. Gaspé surveille son déneigement à l'aide de GPS
En 2013, Gaspé a muni l'ensemble des camions de déneigement de GPS afin de suivre leur travail en temps réel. La commande de 20 GPS a coûté 8 500 $, et les frais de fonctionnement du système montent à 519 $ par mois durant la saison hivernale.
Mais le maire de Gaspé, Daniel Côté, assure que les économies sont substantielles. D'abord, les sommes déboursées en surveillance ont diminué. «Cela nous permet de faire un suivi des opérations de déneigement sans avoir 12 contremaîtres sur le terrain pour vérifier tout ce qui se passe. Un seul contremaître est capable, avec son ordinateur, de surveiller les opérations.»
De plus, le maire considère que ce système permet de mieux répondre aux plaintes. En ayant sous la main l'information concernant l'endroit et le moment où le camion de déneigement est passé, et la vitesse à laquelle il se déplaçait, il est possible de trier les plaintes non fondées et de répondre plus efficacement aux demandes plus urgentes.
Parmi les 13 camions de déneigement en activité, certains sont gérés et exploités par la Ville, tandis que d'autres le sont par des sous-traitants. Le GPS a été imposé dans les nouveaux contrats. «Au début, on craignait que les déneigeurs privés n'embarquent pas dans la démarche, mais tout le monde s'est rallié assez rapidement», dit M. Côté. Selon lui, la plupart d'entre eux ont vu d'un bon oeil ce virage pour se protéger des plaintes injustifiées.
Par ailleurs, il a été possible de faire pression sur les sous-traitants qui effectuaient leur travail moins efficacement que souhaité. L'utilisation de GPS a aussi permis de dégager des tendances et d'ajuster légèrement les parcours des camions pour offrir un service plus efficace.
7. Lac-Mégantic : une autre définition de la ville intelligente
«Ce n'est pas parce qu'on a beaucoup de technologies ou une bonne productivité qu'on est nécessairement une ville intelligente», dit Marie-Claude Arguin, directrice générale adjointe de la Ville de Lac-Mégantic.
À la suite de l'explosion d'un train transportant du pétrole dans son centre-ville, en juillet 2013, Lac-Mégantic doit reconstruire son centre-ville et «recommencer à la base», rappelle Mme Arguin. Pour l'instant, la municipalité s'est donné une définition de la ville intelligente qui n'est pas articulée autour des outils numériques, mais plutôt autour de questions stratégiques comme le développement durable, l'environnement, la mobilité durable, les écocitoyens et la gouvernance participative. «Ça ne veut pas dire qu'on ne prévoit pas devenir un jour plus efficaces en utilisant la technologie. Mais actuellement, avec ce qui nous est arrivé, c'est comme si on construisait une maison et qu'on était encore à l'étape de bâtir la fondation. Mais plutôt que de rebâtir comme avant, on a pris la décision d'y aller avec la gouvernance participative.»
Une démarche citoyenne nommée «Réinventer la ville» a été amorcée peu après la tragédie. Les Méganticois ont été invités à des réunions pour exprimer leurs désirs à propos du nouveau centre-ville. De 250 à 450 personnes ont participé à chacune des rencontres. Une fois des consensus dégagés, cet exercice s'est poursuivi avec six groupes thématiques, composés de citoyens.
«La gouvernance participative, c'est le premier principe auquel on a décidé d'adhérer comme ville intelligente. On a l'intention de la poursuivre le temps de la construction, mais aussi de l'implanter au sein de la gouvernance de notre municipalité», explique Mme Arguin.
8. Les citoyens et les entreprises se branchent à Thetford Mines
Sans passer par un vaste chantier d'infrastructures numériques, Thetford Mines multiplie les initiatives numériques à la mesure de ses moyens. Depuis 2012, plusieurs lieux publics ont été dotés d'un service Wi-Fi gratuit pour tous les citoyens. Ils peuvent donc se brancher sur la toile aux parcs Notre-Dame et Desjardins. La municipalité a aussi mis en place le service Pair, grâce auquel un appel automatisé est lancé chaque jour aux personnes à mobilité réduite habitant seule. «Dernièrement, ça a été profitable. Une personne âgée ne répondait pas. On est allé sur les lieux et elle avait fait une chute. Cela a permis de répondre à l'urgence rapidement», raconte Alexandre Meilleur, directeur du service des travaux publics à Thetford Mines.
La Ville a également travaillé pour que plusieurs opérations courantes puissent être effectuées en ligne, qu'il s'agisse d'une demande de permis auprès du service d'urbanisme, du paiement direct des factures ou des inscriptions à des activités culturelles et de loisirs.
Mais surtout, la municipalité s'est jointe au programme PerLE du gouvernement du Québec en 2014. Elle est devenue ainsi la première ville de Chaudière-Appalaches à donner accès, par l'intermédiaire de ce service gratuit sur le Web, aux informations concernant les permis et les certificats nécessaires au démarrage et à la croissance d'une entreprise sur son territoire. Cette démarche lui a valu de se hisser parmi les villes les plus favorables à l'entrepreneuriat au Québec, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI).
9. Shawinigan veut s'éclairer intelligemment
Dans le cadre de l'amélioration de ses services grâce aux outils numériques, Shawinigan a donné le feu vert à un vaste chantier pour doter l'ensemble de ses rues d'un éclairage intelligent. La municipalité de la Mauricie a déjà fait l'achat des ampoules à diodes électroluminescentes (DEL) nécessaires, mais elle ne désire pas s'arrêter là pour réaliser des économies. «On veut aller beaucoup plus loin et optimiser les investissements», indique Mme Charbonneau.
La Ville lancera avant la fin de 2015 un appel d'offres pour un système de contrôle intelligent, qui passera par l'installation de «passerelles» permettant d'envoyer et de recevoir des informations depuis un capteur relié à plusieurs lampadaires et de les acheminer à un serveur central. Cette démarche vise à contrôler à distance l'intensité de l'éclairage selon les endroits, les heures, mais aussi les activités en cours dans les rues. La municipalité espère que cette infrastructure et ce réseau numérique pourront ensuite servir à d'autres projets liés à la ville intelligente.
Pour l'instant, l'initiative en matière d'éclairage devrait aider à réduire la pollution lumineuse, mais aussi les coûts liés tant à la consommation d'énergie qu'à l'entretien ou au remplacement des ampoules. Shawinigan compte investir plus de trois millions de dollars dans ce projet, qui lui permettra de réaliser des économies de 250 000 $. La Ville bénéficie d'une subvention de plus de 350 000 $ d'Hydro-Québec pour mener à bien ce projet.