Lorsque Lennie Moreno, pdg de Sofdesk, a appris que Google lançait Project Sunroof, le 17 août, il a retenu son souffle. L'arrivée de Google dans le créneau de sa start-up ne semblait pas de bon augure. Après avoir lu quelques articles sur Project Sunroof, M. Moreno était toutefois rassuré. Aujourd'hui, il croit même que l'annonce de Google a potentiellement augmenté la valeur de son entreprise.
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Sofdesk, créée à Montréal en 2013, indique aux consommateurs combien ils pourraient économiser en couvrant leur toit de panneaux solaires. La jeune entreprise, maintenant profitable, a réalisé des revenus de 1,2 million de dollars au cours des 12 derniers mois.
«Nous sommes très heureux du fait que Google ait lancé ce projet, car nous croyons que c'est une importante validation pour notre entreprise», lance Lennie Moreno.
Plus précis que Google
Comme l'entreprise montréalaise, Google permet désormais aux résidents des régions de Fresno, San Francisco et Boston d'évaluer combien ils pourraient économiser grâce à des panneaux solaires. Pour ce faire, Project Sunroof utilise les photos satellites de Google Earth pour évaluer la quantité d'énergie solaire pouvant être captée par un toit donné. La surface, l'orientation et l'emplacement géographique du toit des demandeurs sont pris en compte.
Pour sa part, Sofdesk offre aux consommateurs de partout au Canada et aux États-Unis une évaluation semblable, elle aussi basée sur des photos satellites. M. Moreno soutient cependant que les évaluations de Sofdesk sont plus précises que celles de Google. «La précision de l'outil de Google laisse à désirer. Il ne tient pas compte de facteurs, dont l'ombrage réel et les vents, qui sont très importants pour l'estimation.»
Du reste, Lennie Moreno ne s'inquiète pas trop de la concurrence de Google. Comme la Californienne, Sofdesk génère des revenus en dirigeant les consommateurs intéressés vers des installateurs de panneaux solaires. C'est là où le service de Google s'arrête et où celui de Sofdesk commence, puisque la start-up de 14 employés fournit un logiciel d'estimation aux installateurs de panneaux solaires baptisé Solargraf, au prix de 195 $ par mois.
Sofdesk vise ainsi à exposer les installateurs de panneaux solaires à son outil en ligne en leur adressant des clients. Alors que Project Sunroof renvoie ses clients à une poignée d'installateurs parmi les plus importants aux États-Unis, Sofdesk vise les acteurs de taille plus modeste, qui se comptent par milliers aux États-Unis. Selon Lennie Moreno, ces derniers ont un bel avenir devant eux, malgré la concurrence de géants comme SolarCity : «Les installateurs de panneaux solaires sont comme les plombiers ou les électriciens : il y aura toujours de petits acteurs locaux».
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La source d'énergie de l'avenir ?
Pour Julien Dumoulin-Smith, analyste spécialisé en énergie chez UBS, il est clair que le temps du porte-à-porte pour vendre des panneaux solaires est compté.
«Aujourd'hui, la plupart des ventes se font encore par du porte-à-porte ou en magasin, mais de plus en plus de consommateurs se rendent compte qu'ils peuvent avoir de meilleurs prix sur le Web», explique l'analyste. Cette baisse des prix attribuable au Web, conjuguée à la baisse constante du prix des cellules solaires, pourrait amener plus de personnes à installer des panneaux solaires sur leur toit.
Cependant, l'énergie solaire ne représente que 0,5 % de l'électricité produite à l'échelle mondiale. Or, l'International Energy Agency (IEA) estime que l'énergie solaire pourrait être la source de plus du quart (27 %) de l'électricité consommée dans le monde d'ici 2050, à condition que les gouvernements adoptent les politiques nécessaires pour y parvenir. Si la cible optimiste du rapport de l'IEA était atteinte, l'énergie solaire deviendrait la première source d'énergie électrique, devant les énergies fossiles et l'hydroélectricité.
Au-delà de ce rapport enthousiaste, il va sans dire que le potentiel de l'énergie solaire est immense et que la hausse du prix pétrole, inévitable à long terme, ne pourra que la rendre plus attrayante.
En attendant, ce sont les crédits d'impôt qui, un peu partout dans le monde, permettent de rentabiliser l'installation de panneaux solaires sur les toits. En tenant compte des subventions, l'installation de panneaux solaires serait rentable dans quelque 89 pays, y compris au Canada, selon Lennie Moreno.
Au Québec, par contre, les tarifs d'Hydro-Québec sont si bas que l'argument économique ne tient pas la route. D'ailleurs, aucun des 14 employés de Sofdesk n'a installé de panneaux solaires sur son toit. Une situation quelque peu ironique... qui ne risque pas de changer avant que la start-up n'ouvre un bureau en Ontario ou en Californie.
> Le marché mondial de l’énergie solaire devrait s’élever à 137 milliards de dollars américains en 2020, par rapport à 60 milliards en 2013. Source : Frost & Sullivan
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