Investir temps et argent dans sa page Facebook ou dans son compte Twitter ? Combien de photos sur Pinterest avant de saturer sa page ? Combien valent quelques secondes sur Snapchat ? Doit-on privilégier une version iPad ou pour téléphone intelligent ?
Le choix pour rejoindre son client n'a jamais été aussi grand. Il n'a jamais été aussi compliqué non plus. Comment s'assurer de l'efficacité et de la rentabilité de sa campagne ?
« C'est la question à mille dollars », dit Tracy Smith, vice-président marketing et solutions numériques chez Ivanhoé Cambridge, la filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec qui gère une vingtaine de centres commerciaux.
En compagnie de trois autres vice-présidents marketing, Tracy Smith était panéliste au dernier Rendez-vous CMO organisé par Les Affaires sur le thème de la multiplication des canaux et de la complexité qu'elle engendre. « Il faut rejoindre les gens là où ils sont », dit-il. Et ce n'est pas dans un seul canal ou sur un seul support. La recherche d'information sur un produit passe par une multitude de chemins qui s'entrecroisent. « Lorsqu'un client arrive au centre commercial, c'est l'aboutissement d'une expérience numérique, poursuit Tracy Smith. Le défi est de savoir comment s'immiscer avant, pendant et après cette recherche. Il faut faire le pont entre l'expérience en ligne et ce qui se passe en magasin. Et ce n'est pas simple. »
L'interaction, la mesure qui valide l'investissement
Savoir avec précision quand et où s'est décidé l'acte d'achat « est une tâche ardue, à moins d'avoir un site transactionnel », explique Danny Kronstrom, spécialiste en marketing numérique.
Un client qui effectue un achat a interagi avec la marque de trois à sept fois, évalue une autre panéliste, Pascale Guay, présidente de Dialog Insight, une firme d'intelligence marketing. « Or, si on connaît généralement le dernier clic qui mène à l'achat, dit-elle, on mesure mal l'ensemble des actions qui y ont mené, soit tout ce qui est en amont. On sait aussi que 45 % des recherches commencées sur le téléphone intelligent se poursuivent par la suite sur l'ordinateur. »
On est désormais loin du clic ou du « j'aime » qui, jadis, témoignaient de l'impact d'une campagne. Le défi aujourd'hui est de qualifier la quantité, poursuit Danny Kronstrom : « On peut avoir beaucoup de visiteurs, mais qui ne servent strictement à rien ».
Vos abonnés aiment, commentent et partagent vos publications ? Tout est là, dit Martin Lessard, consultant en stratégies Web et médias sociaux. « La mesure qui valide l'investissement dans un canal plutôt qu'un autre, c'est l'interaction. »
Par ailleurs, il ne faut pas se laisser submerger par la surabondance des choix, poursuit-il. « Avec la multiplication des canaux, deux éléments restent fondamentaux : où est son client ? » Un nouveau média apparaît tous les jours, ou presque, sur le marché. Suivre la cadence est impossible, croit-il. « On doit se demander : où est-on à l'aise et pertinent ? On ne peut pas être partout. »
Il ne faut pas oublier tous les autres canaux, traditionnels, qui remplissent encore fort bien leurs rôles. Internet n'est pas la réponse à tout. « On a encore besoin que quelqu'un nous dise : oui cette chemise te va bien », dit Pascale Guay.
Chez Intact Assurance, on l'a bien compris. Magasiner une assurance sur Internet n'a rien de ludique et l'expérience n'a qu'un seul but : celle d'être rapide et efficace, explique Richard Taschereau, vice-président, marketing et distribution stratégique. Or, bien des visiteurs viennent et repartent une fois leur soumission obtenue, sans avoir acheté quoi que ce soit. Richard Taschereau a eu une idée : utiliser le bon vieux téléphone afin de savoir pourquoi. Plus de 70 % des visiteurs ont ainsi été joints. Un pari risqué, qui aurait pu se retourner contre Intact. Mais il a fonctionné. « Les clients sont ravis qu'on leur téléphone. Et les deux tiers demandent à être transférés à un conseiller. » C'est l'équation idéale, conclut-il. Un peu de techno, un peu de relations humaines.
La boutique, l’ultime canal
Comment ne pas vous laisser submerger par les données et distraire par les nou- veaux canaux ? En traitant votre client comme un être... pas si unique que ça !
C’est la philosophie d’Ethan Song, cofon- dateur de Frank & Oak, un détaillant mon- tréalais d’accessoires et de vêtements pour hommes qui, en trois ans à peine, a bâti un petit empire prospère en ligne. «Il n’est pas si important de personnaliser votre offre pour chaque client, dit celui qui était le conférencier vedette au dernier Rendez- vous CMO. Il y a quatre ou cinq profils de clients et on doit s’en tenir à ça. »
Ses stratégies se déclinent toutes dans un cellulaire. Mais aussi, depuis peu, dans un autre canal auquel Ethan Song croit beaucoup : la boutique. « C’est un canal, dit Ethan Song, une plateforme qui sert à montrer nos produits et nos services, et à promouvoir notre culture. »
D’ailleurs, au cours des derniers mois, l’entreprise montréalaise a ouvert un ré- seau de boutiques sur rue partout au Canada.