«L'agilité est la nouvelle tendance en marketing», a déclaré d'entrée de jeu Andrew Zimakas, directeur marketing de Tangerine lors de la deuxième édition des Rendez-vous CMO [chief marketing officer, ou directeur du marketing], organisée par Les Affaires, qui portait sur l'impact des données et des nouvelles technologies sur le marketing. Et l'un des fleurons de l'utilisation optimale des données, c'est certainement Netflix. L'entreprise propose des films et des séries télévisées en flux continu sur Internet en s'adaptant constamment aux choix de ses auditeurs.
«Ils savent à quel moment les gens appuient sur le bouton pause, quand ils utilisent l'option avance rapide et même la période de la journée où certains types de contenus sont visionnés. Non seulement ils peuvent vous proposer des contenus liés à ce que vous avez aimé, mais ils produisent et diffusent des séries qui remportent un grand succès. Est-ce une coïncidence ?»
Malgré l'accumulation de données sur les consommateurs, très peu d'entreprises arrivent à utiliser cette information de manière pertinente. «Comme l'a dit Nate Silver [un statisticien américain réputé pour ses prévisions, qui est notamment derrière le blogue FiveThirtyEight], malgré les montagnes de données, le proverbial big data [les mégadonnées], nous ne sommes pas beaucoup plus brillants qu'auparavant. Le défi est d'arriver à extraire les données parmi tout ce bruit."»
Avantage concurrentiel
Être une banque totalement virtuelle a permis à Tangerine d'utiliser ses données plus agilement que ses concurrents, estime M. Zimakas. Ayant vu le jour dans un univers numérique, dans lequel elle n'avait pas à se préoccuper de maintenir des assises physiques dans les communautés, l'ancienne ING Direct appartient désormais à une banque «de briques et de mortier», la Banque de Nouvelle-Écosse (Banque Scotia), qui vient d'annoncer 1 500 licenciements, dont les deux tiers au Canada.
«Les institutions financières traditionnelles ont déjà beaucoup amélioré leurs outils numériques. Mais c'est beaucoup plus compliqué pour elles, elles sont beaucoup plus grandes et travaillent beaucoup plus en silos», constate le CMO. Le potentiel de croissance des banques virtuelles est impressionnant, soutient-il. «Sur les 12 millions de Canadiens qui accepteraient de gérer leurs finances personnelles en ligne, seulement 15 % font affaire avec nous. Il faut maintenant trouver les arguments pour les convaincre.»
Des solutions simples
Tangerine s'est elle aussi mise à l'ère des nouvelles technologies en vue d'offrir des solutions simplifiées à ses clients. M. Zimakas cite le dépôt de chèques par une simple photo prise à l'aide d'un téléphone intelligent, de même que l'offre de comptes d'épargne libre d'impôt (CELI) en ligne. «Nous avons été la première institution financière à offrir ces services au Canada, souligne-t-il. Bientôt, nous allons offrir des options de sécurité supplémentaires avec les empreintes digitales et de nouvelles fonctions de commandes vocales. Bref, résume-t-il, les clients veulent des services simples, faciles, conviviaux, car ce sont des gens occupés !»
Les marques sont infidèles
Mais comment garder la clientèle fidèle dans un univers où tout va très vite ? Dans le paradigme de Tangerine, ce ne sont pas les clients qui sont infidèles à l'égard des entreprises, c'est plutôt l'inverse. «Seulement un consommateur sur six pense que les marques ont un engagement sincère envers eux, s'étonne Andrew Zimakas. Comme en entreprise, nous ne répondons pas du tout à leurs attentes sur ce plan. Il y a encore beaucoup de travail à faire.»
En raison de l'immense quantité d'informations devenues accessibles avec l'explosion des TI, les consommateurs détiennent un pouvoir inégalé quant aux choix. «Nous sommes passés d'une prise de décisions descendante à un processus issu de la base», illustre le directeur du marketing. L'heure est aux consommateurs, c'est à eux, dorénavant, que revient la tâche de dicter leur volonté et leurs besoins.
Ce qu'ils en disent
À la suite de la représentation d'Andrew Zimakas, quatre spécialistes du marketing étaient appelés à partager leur expérience. Tour à tour, ils ont présenté leurs réflexions, répondu aux questions du public et donné leurs conseils.
«Le big data [les mégadonnées], c'est comme boire de l'eau à partir d'un boyau d'arrosage... Il y en a énormément ! Comment l'utiliser de façon intelligente ? Le temps de comprendre comment, et nous serons tous morts.» - Rick Seifeddine, premier vice-président de la marque, Bell Canada
«Nous utilisons les données sur nos clients pour valider nos idées, pas pour créer de nouveaux produits ou services.» - Louis Gagnon, chef du développement des produits et du marketing, Audible.com (Amazon)
«Les données sont au coeur des grandes transformations que nous vivons. Nous les utilisons pour vendre aux PME de l'espace publicitaire relativement aux recherches que nos clients effectuent. - Nicolas Gaudreau, premier vice-président et chef de la direction marketing, Groupe Pages Jaunes
«L'utilisation des données nous permet de définir le profil de nos clients, de leur offrir des produits qui correspondent à ce qu'ils veulent et à ainsi augmenter nos ventes.» - Patrick Hadsipantelis, vice-président, Monnaie royale canadienne
Le prochain Rendez-vous CMO aura lieu le jeudi 4 décembre avec Manoj Fenelon, directeur des tendances chez PepsiCo.