En France, près de 12% des managers sont confrontés de manière régulière à des situations problématiques liées à la religion. C'est-à-dire qu'ils doivent résoudre un problème de ce type de façon quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle. Pour le tiers (32%) des managers français, ces difficultés-là ne surgissent que quelques fois par an. Et pour un peu plus de la moitié (56%), il ne survient quasiment jamais. C'est ce qui ressort d'un sondage mené conjointement par l'Institut Randstad et l'Observatoire du fait religieux en entreprise (Ofre).
De quelles difficultés parle-t-on, au juste? Bien souvent, de demandes particulières. Ainsi, la demande d'absence pour fête religieuse est la plus fréquente (16%), suivie par celle d'aménagement du temps de travail (13%). S'y ajoutent, entre autres : les prières pendant le temps de travail (13%) et le port ostentatoire d'un signe religieux (10%).
Dans d'autres cas, il s'agit carrément de transgressions à la norme, voire à la loi. Par exemple, l'étude cite le refus de travailler avec une femme (8%), la volonté de ne travailler qu'avec des coreligionnaires (8%), ou encore le refus de réaliser des tâches pour motifs religieux (5%).
Cela étant, des cas aussi extrêmes sont une rareté. De fait, 76% des managers n'ont jamais, ou rarement, eu à intervenir pour des problèmes aussi compliqués. En vérité, seulement 2% des managers sont souvent amenés à faire face à ce sujet, soit une ou plusieurs fois par semaine.
Comment réagissent alors, en général, les managers? Ils règlent le différend par le dialogue, au cas par cas. Ce n'est que dans 3% des cas que l'on débouche sur une impasse : l'employé concerné menace de porter plainte pour discrimination; l'employé remet en cause la légitimé de l'entreprise pour statuer; l'employé refuse toute discussion; etc.
«Le fait religieux ne suscite pas, ou rarement, d'hostilité lorsqu'il correspond à une pratique personnelle, visible, sans s'imposer aux autres et qu'il n'interfère pas avec la réalisation du travail. Néanmoins, les Français attendent de l'entreprise une "neutralité affirmée" en matière de religion, soit une fermeté face à des comportements religieux qui viseraient à modifier le fonctionnement de l'organisation», indique l'étude.
Deux exemples : 89% des personnes interrogées dans le cadre du sondage trouvent inacceptable de refuser de réaliser des tâches pour des motifs religieux; et 94% estiment qu'on ne peut pas prier pendant le temps de travail. Deux exemples qu'il convient, toutefois, de nuancer : 60% des personnes interrogées considèrent qu'il est tout à fait acceptable de prier pendant les pauses; la même proportion (60%) estime qu'on n'a pas à demander la permission à l'entreprise pour cela. «La question de la religion n'est donc pas un tabou au travail», résume l'étude.
Une interrogation saute aux yeux : quel est le principe de neutralité auquel les Français font ainsi référence? Cette neutralité correspond à «une conception très étendue de la laïcité», qui nécessite d'être «articulée avec le respect des personnes». Ce qui, on le voit bien, est quelque chose de «complexe».
«La grande majorité des Français (78%) pensent que l'entreprise ne doit pas s'adapter pour tenir compte des demandes et des contraintes à caractère religieux de ses salariés. Et 72% d'entre eux estiment que les signes religieux ostentatoires devraient être proscrits de l'espace de travail», souligne l'étude.
Des opinions qu'on retrouve chez les pratiquants réguliers, dans une moindre mesure : 65% pensent que l'entreprise ne doit pas faire d'accommodements raisonnables et 51% sont favorables à l'interdiction des signes religieux visibles. À noter que l'appartenance religieuse ne génère pas de différence de positionnement sur ces deux points-là.