Les femmes gèrent-elles différemment que le font ces messieurs? Oui, répondent Marie-Andrée Boutin, vice-présidente de l’immobilier et de la planification de magasins chez Groupe Aldo, et Anna Martini, présidente du Groupe Dynamite.
Les deux femmes d’affaires répondaient aux questions de Monique Jérôme-Forget, l’ancienne ministre des Finances du gouvernement Charest, dans le cadre d’une conférence organisée par l’International Council of Shopping Centers (ICSC) à Montréal. L’évènement se déroule à Montréal mercredi et jeudi et rassemble les acteurs de l’immobilier commercial.
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Championne de la place des femmes en affaires, Mme Jérôme-Forget a coprésidée la «Table des partenaires influents». Le comité a proposé au gouvernement de se donner des cibles en vue de convaincre les entreprises cotées en Bourse de nommer plus de femmes à leur conseil d’administration. Mme Forget était la seule parmi les huit membres à prôner l’instauration de quota plutôt que l’approche volontaire.
Anna Martini, est la présidente du Groupe Dynamite, qui possède les enseignes Garage et Dynamite. Elle gère une entreprise de 4 200 employés. Elle mène aussi le plan d’expansion de la marque aux États-Unis. Elle a commencé sa carrière chez Deloitte.
Maire-Andrée Boutin est vice-présidente de l’immobilier et de la planification de magasins chez Groupe Aldo. Elle travaille pour le Groupe depuis 20 ans et a œuvré à l’expansion internationale du Groupe. « Il ne fallait pas avoir un gros ego, raconte-t-elle. Je ne suis pas sûre qu’un homme aurait pu le faire. Les gens avaient peu d’égard envers nous. On nous donnait des mauvais emplacements dans les centres commerciaux; on oubliait les rendez-vous qu’on nous avait donnés. Aujourd’hui, c’est différent. »
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Monique Jérôme-Forget — Croyez-vous qu’il y ait un plafond de verre?
Anna Martini — Je crois que beaucoup de femmes se mettent elles-mêmes un plafond de verre. On peut avoir autant de succès, si on est prête à jouer le même jeu. J’ai vu beaucoup de femmes accepter qu’à partir d’un niveau, elles ne progressent plus, même si des occasions s’offrent à elles. C’est leur décision.
Maire-Andrée Boutin — Je ne suis pas tout à fait d’accord avec Anna. Il faut travailler très fort pour grimper les échelons et concilier sa vie personnelle avec sa carrière. Le plafond de verre existe. Les choses changent, mais je crois qu’il ne faut pas lâcher.
M. J-F. — Les hommes et les femmes gèrent-ils différemment l’échec?
M-A.B. — Encore aujourd’hui, c’est plus pénible pour une femme de composer avec l’échec. Les femmes visibles sont punies plus facilement. C’est pourquoi il est important de cultiver un bon réseau.
A.M. — Les hommes ont une meilleure capacité de rebondir après un échec. Ils réagissent du tac au tac. Les femmes vont prendre plus de temps pour faire leur bilan, c’est peut-être une qualité qu’on doit apprendre des hommes.
M.J-F. — On a la perception que les femmes sont plus émotives et qu’elles ont plus de difficultés à se contrôler. Pourtant, j’ai vu des hommes, que je ne nommerai pas, piquer des colères. Qu’en pensez-vous?
M-A.B. — Les hommes avec qui je travaille sont calmes et en maîtrise de leurs émotions. En général, je pense que les femmes filtrent davantage leurs émotions. On peut être découragée ou fâchée, mais on le garde pour nous. Les hommes s’emportent davantage, mais ils oublient plus rapidement. Parfois, les femmes ont tendance à ruminer davantage leurs griefs.
M. J-F. — Les hommes et les femmes gèrent-ils différemment le risque?
A.M. — Les femmes prennent des risques, mais différemment. Elles cherchent le consensus, elles demandent plus d’information. Disons qu’elles y vont avec plus de prudence. Lorsque j’ai quitté Deloitte pour Dynamite, j’ai pris un gros risque. J’avais une bonne expérience en finances, mais j’ai dû en apprendre plus sur l'exploitation.