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Au-delà du glamour, des vedettes et des partys, la 3e édition de C2MTL sur le commerce et la créativité a permis à Les Affaires de récolter les meilleures idées des conférenciers, applicables tout de suite. De quoi redonner du swing à votre entreprise !
Imaginons. Vous dirigez une fondation caritative et vous cherchez une nouvelle directrice des ressources humaines. Deux candidates se retrouvent en finale : l'une travaille pour une fondation concurrente, l'autre chez Google. Laquelle choisirez-vous ? Le gros bon sens, et l'habitude, vous pousse vers la première candidate qui connaît votre secteur. Mais c'est de la seconde dont votre fondation a probablement besoin pour se réinventer et durer. Pour innover, il faut recruter des innovateurs.
L'innovation est un des piliers d'un modèle d'affaires robuste et durable, explique Estelle Metayer, chasseuse de tendances, professeure associée en stratégie à McGill et fondatrice de Competia, en Suisse. Sa firme offre des services d'intelligence stratégique. Aéroplan, GDF Suez, Danone... Ces firmes ont toutes fait appel à Competia pour se transformer. Estelle Metayer était conférencière en mai, à Montréal, à la troisième édition de C2MTL, événement qui conjugue affaires et créativité. La fondatrice de Competia a présenté les cinq préalables pour transformer son modèle d'entreprise avec succès, et à répétition.
1. Cultiver l'innovation
On parle beaucoup de développer une culture de l'innovation. Mais la culture repose sur les gens. Mieux vaut concentrer ses efforts sur le recrutement. Recruter des candidats qui baignent dans une culture de l'innovation afin qu'ils la transportent avec eux. Le reste suivra.
2. Développer l'agilité
Pouvez-vous déplacer vos ressources rapidement si votre entreprise se développe et a, par conséquent, de nouveaux besoins ? Prenons le cas du financement. Si vous ajoutez des activités ou modifiez carrément votre mission, vos investisseurs suivront-ils ? Ont-ils investi dans votre produit ou dans l'équipe de gestion ? Parfois, lorsqu'une entreprise s'apprête à effectuer un virage stratégique, elle doit aussi revoir sa structure de financement. « Peut-être qu'à ce moment de la vie de votre entreprise, un fonds d'investissement qui vous dicte quoi faire n'est pas le bon partenaire financier, avance Estelle Metayer. Le financement participatif pourrait être plus indiqué. »
3. Personnaliser ses technologies de l'information (TI)
Vos outils technologiques permettent-ils à l'information de remonter jusqu'à vous ? Ou celle-ci reste-t-elle bloquée dans les systèmes, incompréhensible et inaccessible ? « Dans un monde idéal, il ne devrait plus y avoir de CIO [directeur des TI], explique Estelle Metayer. Chaque service devrait posséder son propre CIO et ses propres outils adaptés à sa réalité. »
4. Saisir les occasions
D'où viendra votre croissance ? Comptez-vous ravir des parts de marchés à vos concurrents ? Allez-vous plutôt développer un nouveau marché et éduquer les consommateurs ? C'est la différence entre un océan rouge et un océan bleu. L'océan rouge représente les activités existantes, là où la concurrence est sanglante. Il est facile d'évoluer dans un océan rouge, car les règles sont connues et les frontières claires. Mais y réussir pose problème, puisqu'il est surpeuplé. À l'opposé, l'océan bleu est constitué d'activités qui n'existent pas. La demande reste à créer et les règles, à définir. Les occasions de croissance rapide sont importantes. On doit la théorie des océans bleu et rouge à W.Chan Kim et Renée Mauborgne, de l'école internationale de gestion INSEAD.
Que vous plongiez dans un océan bleu ou dans un océan rouge, les trois mêmes possibilités s'offrent à vous : foncer seul, trouver des partenaires ou collaborer avec vos concurrents (« coopétition »).
5. Raffiner la prise de décision
« L'expérience peut vous induire en erreur, surtout lorsqu'il s'agit de vous réinventer », prévient Estelle Metayer. Vous fiez-vous toujours aux mêmes sources d'information ? La firme de services financiers UBS, par exemple, prend désormais des photos aériennes des stationnements de Walmart pour estimer les ventes mensuelles de ce détaillant. UBS compte le nombre de véhicules et le multiplie par l'achat moyen d'un consommateur. L'information était disponible, il suffisait d'en profiter.
Savez-vous vous inspirer de la contreculture pour voir venir les tendances ? « Certaines firmes étudient les graffitis et l'art de rue pour déceler les préoccupations émergentes de la société. Une photo Instagram peut devenir le point de départ d'une tendance », révèle la consultante.
Il y a les tendances et il y a les signaux faibles. Les tendances sont relativement connues. Il est presque trop tard pour s'y adapter. Les signaux faibles vous mènent plus loin. Ce sont les tendances d'aprèsdemain. Plus utiles, mais plus difficiles à déceler. Il vous faut un canari... comme celui qu'on a longtemps employé dans les mines de charbon pour déceler l'odeur de gaz laissant présager une explosion. Votre canari, lui, doit déceler les signaux faibles qui pourraient faire exploser votre entreprise. Détectés tôt, les signaux faibles peuvent être intégrés à la stratégie de l'entreprise pour lui permettre de s'adapter.
Savez-vous comment recruter un canari ?
Pour prendre de bonnes décisions, on dit qu'il faut se donner le temps de réfléchir. « C'est trop restrictif », estime Estelle Metayer. N'encadrez pas trop vos temps d'arrêt. « C'est la différence entre regarder les étoiles plutôt que de faire une réunion de remueméninges », ajoute-t-elle. Et profitez-en pour mettre vos « yeux d'extra-terrestre »... Regardez une situation que vous avez toujours considérée comme normale, et dites-vous « peut-être qu'elle ne l'est pas ». Il est possible que cela vous amène à renverser votre mission. « Prenons le cas de la française Veolia qui traite les déchets. Et si, au lieu de viser à traiter de plus en plus de déchets, elle devenait consultante en réduction de rebuts ? Et si Via Rail s'associait à une université pour offrir un MBA pendant ses trajets ? On tient pour acquis que les trajets sont obligatoirement du temps perdu. Pourrait-il en être autrement ? » avance Estelle Metayer.
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Réinventer le sexe : makelovenotporn.com
« La pornographie devient de plus en plus violente, parce que les dirigeants de cette industrie sont morts de peur, déclare la Britannique Cindy Gallop, fondatrice du site makelovenotporn.com. Ils ignorent comme réagir au sexe gratuit sur Internet et aucun consultant ne vient à leur rescousse pour les aider à se réinventer. » Elle ajoute : « si les brillants esprits qui lisent et écrivent dans la Harvard Business Review ou dans Les Affaires s'intéressaient à l'industrie de la porno au lieu de faire comme si elle n'existait pas, on l'aurait réinventée ». Cindy Gallop propose une solution. « J'ai créé une entreprise, le site makelovenotporn.com, qui parle et montre du vrai sexe et qui est aussi visible et aussi importante que les entreprises de la pornographie. » Une route parsemée d'embûches. Aucun système traditionnel de paiement en ligne ne collabore avec elle. Les investisseurs non plus. Mais les abonnements au site augmentent. Même les vedettes du porno envoient des captations vidéo de leurs vrais ébats amoureux, pour contribuer à la « cause ».
Réinventer le paiement : Square
« Réinventez les choses simples, celles que l'on tient pour acquises », conseille Françoise Brougher, business lead [directrice du développement] chez Square, un système de paiement qui fonctionne à partir d'un cellulaire ou d'une tablette. Il suffit de brancher une pièce sur votre appareil mobile. Les artistes et les petits détaillants en raffolent. Plus de ventes ratées faute d'avoir les moyens d'investir dans un système de paiement traditionnel. Square réinvente aussi les reçus. Ceux-ci sont envoyés électroniquement au client au moment de la transaction. Le détaillant économise du papier et amorce une relation en ligne avec son client. Square est une création de l'Américain Jack Dorsey, le fondateur de Twitter.
Catherine Hoke, Fondatrice, Defy Ventures
Catherine Hoke travaille dans le secteur de l'investissement. Elle a débuté sur la côte ouest, à Palo Alto, chez Summit Partners. Puis sur la côte est, à New York, chez American Securities Capital. Depuis 2010, elle a déplacé sa cible et imaginé un modèle d'entreprise qui la place à l'abri de la concurrence. Defy Venture investit dans d'ex-détenus, dont 80 % ont commis un crime violent, pour les transformer en entrepreneurs. Sa firme, Defy Ventures, est un fonds de capital de risque et un incubateur. L'un des clients a démarré un service de traiteur. Un autre, une firme d'organisation d'événements.
« Nous les incitons à démarrer des entreprises simples qui génèrent des revenus rapidement pour leur permettre de se remettre sur les rails », dit la trentenaire.
Zita Cobb, Fondatrice, Fondation Shorefast
« On réinvente une communauté en retournant à ses racines, dit Zita Cobb, entrepreneure et philanthrope.
La mienne, l'île Fogo, à Terre-Neuve, est un mélange de nature et de culture. Les autres industries, l'exploration pétrolière et gazière, par exemple, ne seront que de passage. Évitons de construire un modèle d'entreprise artificiel. » En 2004, après un exode de 20 ans en Californie dans le secteur de la fibre optique, Zita Cobb rentre au bercail animée d'une mission : assurer la pérennité de l'île Fogo, mise à mal par la pêche industrielle. Depuis, l'île Fogo est devenue un lieu de séjour pour les artistes. La Fondation Shorefast a contribué, entre autres, à construire un hôtel. Le restaurant a été sacré l'un des trois meilleurs du Canada par le magazine En Route.
Les meubles du Fogo Island Inn sont regroupés dans un catalogue, et tous peuvent être commandés.
L'hôtel, les meubles, les résidences pour les artistes, tout a été cocréé par des artistes locaux et des artistes extérieurs pour marier design contemporain et artisanat local. Ne parlez pas à Zita Cobb des communautés virtuelles.
« Une communauté, c'est un lieu physique », insiste-t-elle. Celle-ci peut se trouver en pleine mer ou dans un océan de béton, ajoute l'entrepreneure. Le défi reste le même : trouver un modèle commercial reposant sur sa valeur intrinsèque.
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Se transformer malgré les résistances
Plus de 80 % des clients cibles de la québécoise Toon Boom ont acheté son produit. Ses logiciels d'animation sont utilisés dans les studios de cinéma de 122 pays. Par conséquent, pour croître, elle a dû leur trouver un nouveau créneau. « L'éducation est un défi majeur du 21e siècle, dit Joan Vogelesang, fondatrice de Toon Boom. Et on compte sur la technologie pour faciliter l'apprentissage.» Logique. Pourtant, Joan Vogelesang a affronté une solide résistance. De la part de ses employés, « qui trouvaient plus glamour de travailler pour l'industrie du cinéma que pour celle de l'éducation ». De celle de ses actionnaires, « qui ne croyaient pas en la rentabilité du secteur de l'éducation ». Sa stratégie : établir une division à part, pour démontrer le sérieux de son virage. Travailler avec des utilisateurs précoces de la technologie en éducation, comme le gouvernement de la Turquie et de la Thaïlande, pour décrocher des victoires rapides.
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La méthode LP
Louis-Philippe Maurice est un entrepreneur en série montréalais (Busdbud, GeoDonation, Entrepreneurs anonymes) et le lauréat de nombreux prix. Chaque fois, le Québécois crée en transformant ce qui le frustre. Sa méthode repose sur trois questions.
1. Quoi ? C'est-à-dire qu'est-ce qui me frustre ?
2. Pourquoi cela me frustre-t-il ? Qu'est-ce qui cloche ?
3. Et si... l'on faisait les choses autrement ? Et si l'on renversait la perspective, la méthode, l'exécution ?
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25 % - Le quart des téléspectateurs se baladent sur les médias sociaux pour commenter l'émission qu'ils écoutent, révèle Ty Ahmad-Taylor, vice-président de Smart TV Services, chez Samsung. Comment faire pour que ces téléspectateurs ne baissent pas constamment les yeux sur leur second écran ? Intégrer le second écran au premier. Cela donne la télé sociale, version Samsung. Le fil de commentaires défile sur le côté de l'écran, pendant que l'émission suit son cours. « Notre intuition de départ était bonne, mais il a fallu corriger le tir, explique Ty Ahmad-Taylor. Au début, nous affichions deux fils de commentaires, celui du téléspectateur et le fil général lié à l'émission en cours. Comme le premier n'était pas consulté, nous l'avons enlevé. » Le processus de transformation ressemble au mythe de Sisyphe, illustre le v.-p. : « Lorsque vous le croyez achevé, il faut reprendre le travail ».
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