Le 1er mars, Donald Thompson, 51 ans, prendra sa « retraite ». Après 25 ans passés chez McDonald's. Dont deux ans et demi comme chef de la direction. Deux ans et demi qui n'auront pas suffi à redresser un « superpétrolier » fort de 36 000 restaurants, dont plus de 80 % appartiennent à des franchisés, dans plus de 100 pays.
Ce changement de garde précipité est la source d'une réflexion qui dépasse le seul cas de McDonald's, pour toucher aux rôles respectifs des conseils d'administration et des hauts dirigeants.
Mais rappelons d'abord quelques faits essentiels du « cas McDonald's ».
Brillant ingénieur en électricité, M. Thompson a été recruté par McDonald's pour développer la robotique en usage dans les cuisines des restaurants. Il a rapidement bifurqué vers la gestion opérationnelle.
La haute direction l'a remarqué quand, sous son leadership, la performance de la chaîne dans la région de San Diego est passée de la 39e et avant-dernière région à la 2e des États-Unis. Il a gravi les échelons jusqu'à devenir chef de l'exploitation aux États-Unis en 2005, président de McDonald's USA en 2006, chef de l'exploitation mondiale en 2010, puis chef de la direction en juillet 2012. Il a donc été étroitement associé à l'immense création de richesse accomplie par McDonald's de 2005 à 2012, alors que la capitalisation boursière de l'entreprise passait de 42 à 90 milliards de dollars américains.
Feuille de route impeccable. Fait à signaler, il a été élu au conseil d'administration dès 2011, avant d'être nommé chef de la direction.
Les mauvais trimestres ont commencé environ six mois après que M. Thompson est devenu chef de la direction. Les problèmes remontaient toutefois à plus longtemps et ils étaient connus. M. Thompson en parlait sans détour : changement de goût du marché en matière alimentaire, notamment aux États-Unis, en particulier chez les plus jeunes adultes ; problèmes, réels ou seulement perçus, en matière d'exploitation des travailleurs, de qualité de la nourriture, etc. Simplement, ce n'est qu'en 2013 qu'ils ont commencé à plomber les résultats.
À qui incombe la stratégie ?
Après deux ans de résultats décevants, on met le plus haut dirigeant à la « retraite ». Le marché reçoit la nouvelle positivement : le titre de McDonald's s'apprécie de 3 % dès l'annonce du départ de M. Thompson.
Mais en changeant de président, on change quoi au juste ?
D'un côté, le conseil qui montre la porte au président est exactement, personne pour personne, le même conseil que celui qui, en 2012, a choisi un candidat qu'il connaissait parfaitement. L'ancienneté médiane de ce conseil est de 12 ans - le plus récent administrateur n'est nul autre que M. Thompson lui-même, dont le départ est l'occasion de nommer une nouvelle administratrice.
De l'autre côté, on remplace M. Thompson par le Britannique Steve Easterbrook. Celui-ci est un ancien de McDonald's. Après une absence de deux ans, il est revenu dans l'entreprise en 2013 où il occupe le poste de chef mondial de la marque et relève directement de M. Thompson. On sent donc davantage de continuité que de rupture.
La vraie question qui se cache derrière cette anecdote est la suivante : qui, du conseil ou du principal dirigeant, est le véritable responsable de la vision et de la stratégie d'une entreprise ? Appartient-il au conseil de la définir et de choisir un chef de la direction en conséquence ? On conclurait alors que le conseil de McDonald's juge que M. Thompson ne parvient pas à exécuter la stratégie convenue et endossée par le conseil. Ce serait étonnant, alors que M. Thompson exécute depuis des années la stratégie de McDonald's assez bien pour avoir obtenu promotion sur promotion.
Ou bien le rôle du conseil se limite-t-il à choisir un président qui, lui, définira une stratégie pour produire des résultats ? On changerait alors de président pour changer de stratégie, ce qui serait normal. Mais dans cette hypothèse, pourquoi choisir un président en parfaite continuité avec un président mis à la porte ?
De facto, bien des conseils ne se mêlent pas de la vision ou de la stratégie de développement de leur entreprise. Ils limitent leur travail à la « gouvernance » au sens strict, leur rôle le plus important étant bien sûr de recruter (ou de mettre à la « retraite ») le chef de la direction, et de déterminer sa rémunération. Lorsque des actionnaires institutionnels s'impatientent devant des résultats décevants, on change le président, sans trop s'interroger sur la stratégie. On le sait tous, « revue stratégique » se traduit invariablement par la vente d'actifs ou de l'entreprise au complet - jamais par une véritable réflexion sur la stratégie de développement.
C'est ce que pensent plusieurs administrateurs. Mais le choix d'un chef de la direction est, implicitement, le choix d'une vision, d'une culture, d'une stratégie. Prétendre le contraire, c'est se priver de faire la réflexion stratégique de façon explicite et structurée.
Pour un conseil d'administration, la stratégie et le choix du pdg, c'est comme l'oeuf et la poule : on ne sait pas lequel vient avant l'autre, mais ils sont indissociables.
Robert Dutton est le tout premier entraîneur en résidence de l'École d'entrepreneurship de Beauce (EEB). Pendant 20 ans, il a assuré la direction de Rona à titre de président et chef de la direction. Sous sa gouverne, l'entreprise a connu une croissance soutenue et est devenue le plus important distributeur et détaillant canadien de produits de quincaillerie, de rénovation et de jardinage. Après un passage aussi marquant que remarquable comme entrepreneur-entraîneur, Robert Dutton a décidé d'accompagner les entrepreneurs-athlètes de façon plus assidue, au sein de l'EEB.