À quatre ans, Hugo Germain a appris qu'il ne jouerait jamais plus à être le fils du patron. Son père Jean-Yves Germain et sa tante Christiane, coprésidents du Groupe Germain, étaient alors propriétaires d'un restaurant appelé le Saint-Ô à Québec. Le petit Hugo, affamé, était entré à la cuisine d'un pas décidé.
«J'ai dit au chef : je suis le fils du boss, fais moi un spaghetti ! Mon père m'a entendu et c'est la dernière fois que j'ai manqué de respect envers un employé !» se souvient en riant l'homme de 34 ans, directeur du développement au Groupe Germain.
«Nos parents nous ont inculqué le respect des pairs et des employés. On n'a pas de statut spécial, et les marches sont d'autant plus difficiles à gravir que nous avons nos preuves à faire», ajoute la cousine Marie-Pier Germain, 32 ans, fille de Christiane et directrice des services professionnels de construction.
Diplômée en génie, la jeune femme a enseigné le yoga chaud pendant une brève période avant d'intégrer l'entreprise familiale, où elle avait occupé, lors de ses études, divers postes à temps partiel.
Son cousin Hugo, qui avait commencé à tondre la pelouse pour le Groupe Germain à 13 ans avant d'occuper des fonctions variées en hôtellerie, a étudié le commerce à l'Université Concordia et a eu envie d'aller voir chez Krispy Kreme si son avenir s'y trouvait. Il a aussi profité de son passage en Ontario pour faire une maîtrise en administration des affaires à l'Université Queen's. En 2006, dans une carte de Noël, il a écrit à son père qu'il avait hâte de travailler avec lui. Ça tombait bien, le projet d'un hôtel ALT au Quartier Dix30 de Brossard était dans les cartons. Hugo en est devenu le directeur général.
«À 28 ans, je n'aurais pas eu le pedigree nécessaire pour occuper ce poste dans une autre entreprise, mais c'était important d'amener la culture de l'entreprise familiale là-bas. Nos parents nous ont toujours donné beaucoup de corde. On peut s'étouffer avec la corde, comme on peut l'utiliser pour faire beaucoup d'expériences», dit-il.
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Préserver des relations harmonieuses
Les enfants Germain ne sont pas sous la supervision directe de leurs parents, même si ceux-ci sont présents dans leur quotidien. Une précaution qui vise à préserver des relations harmonieuses.
«Quelque part, il vaut mieux qu'il y ait une zone tampon et alors, les parents jouent un rôle de mentor plutôt qu'un rôle d'autorité», considère Marie-Pier, en admettant que tout n'est pas toujours rose quand on réunit famille et affaires. Les méthodes des uns et des autres diffèrent, même si les valeurs sont communes.
«Mon père n'a pas de diplôme universitaire et ça aurait été maladroit de ma part d'utiliser mes théories pour montrer comment on pourrait se développer, souligne Hugo. Lorsqu'on cherche à résoudre un problème, on se demande comment chacun l'aborderait et on arrive à des solutions plus complètes en mettant chacun de l'eau dans son vin.»
Il n'est pas question encore chez le Groupe Germain de céder les commandes à la jeune génération, qui souhaite travailler avec les parents le plus longtemps possible.
«Ils aiment beaucoup ce qu'ils font, et ils ont toujours soif de nouveaux projets. Ils ont beaucoup à nous montrer. On est privilégiés de pouvoir les côtoyer comme coprésidents et comme parents», souligne Marie-Pier. D'ailleurs, elle ajoute sentir la volonté des parents d'inclure les enfants dans la planification stratégique des trois prochaines années.
L'ambition internationale
Depuis 2010, le Groupe Germain centre ses efforts sur son expansion canadienne. La croissance se fait rapidement, avec trois nouveaux hôtels d'ici un an. Marie-Pier, qui a hérité du souci d'esthétisme de sa mère, doit relever le défi de l'ouverture de l'ALT de Griffintown à Montréal en mars.
Même si Hugo trouve difficile d'être plus ambitieux que son père Jean-Yves, pour qui la croissance ne va jamais assez vite, il voit grand pour l'avenir des hôtels Germain et ALT.
«Jusqu'à maintenant, on a eu une bonne discipline pour réaliser le plan de match de l'expansion canadienne. Ce serait l'fun un jour, intelligemment, de sortir du pays», entrevoit-il.
Cette ambition est aussi accompagnée de celle d'avoir des conjoints et des enfants heureux. Hugo a deux fillettes ; Marie-Pier en a une et souhaite avoir un autre enfant, en plus de terminer son MBA l'an prochain.
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