Sheryl Sandberg, la directrice d'exploitation de Facebook, exhorte les femmes à "se bouger" pour réussir le grand écart entre vies professionnelle et familiale, dans le livre qu'elle vient tout juste de sortir aux États-Unis, Lean In. Un livre que plusieurs chroniqueurs américains présentent comme «le manifeste féministe moderne».
«Je crois que le monde serait meilleur si la moitié de nos entreprises et des pays étaient dirigés par des femmes, et si la moitié de nos foyers étaient gérés par des hommes, dit-elle sur son site Web LeanIn.org, mis en ligne la semaine dernière. Le hic, c'est que les femmes mettent elles-mêmes un frein à leur carrière pour préserver leur vie de famille, même lorsqu'elles n'ont pas encore d'enfant.»
D'où son invitation aux femmes à «se bouger», «à croire en leurs rêves» et à «dépasser, avec l'aide des hommes, l'ordre social actuel dicté par la hiérarchisation des sexes». «Lean In (Bougez-vous, en anglais) s'adresse aux femmes de tous âges», souligne la femme d'affaires de 43 ans, diplômée de Harvard et mère de deux enfants.
Sheryl Sandberg s'inscrit ainsi en championne des Américaines qui rêvent d'allier carrière brillante et vie familiale accomplie. Après avoir travaillé au ministère de l'Economie, elle a été économiste à la Banque mondiale, puis a été embauchée chez Google avant de devenir la numéro 2 de Facebook.
«Un acte révolutionnaire»
«La question de l'égalité des sexes est au point mort aux États-Unis depuis les années 1990, note Lori Mackenzie, directrice adjointe d'un institut de l'Université Stanford spécialisé dans les rapports homme-femme. Mettre ce sujet sur la place publique est un acte révolutionnaire.»
«Elle ne dit pas que l'équilibre entre le travail et la famille est facile à atteindre, poursuit la sociologue. Elle dit : "Bougeons-nous, et mettons-nous-y ensemble".»
Comment? En commençant par en parler, notamment via la site Web de Lean In : les femmes sont invitées à y partager leur expérience; parmi elles, on retrouve d'ores et déjà la présentatrice vedette Oprah Winfrey, l'actrice Reese Witherspoon et l'ancienne Première dame Laura Bush.
«Ces témoignages dressent un tableau des épreuves et des obstacles que nous rencontrons toutes, explique Mme Sandberg. Elles nous permettent de voir qu'il est payant de croire en nous-même et de tendre vers des objectifs concrets.»
Sont aussi proposés des cercles de rencontres, où les femmes peuvent se retrouver régulièrement pour partager leurs idées et suivre des cours gratuits sur la négociation en entreprise, le langage corporel ou encore l'animation d'équipe. D'ailleurs, un guide de discussion à l'attention des managers a été confectionné pour aider à aborder le sujet au travail (cf. le PDF ci-joint).
Bien entendu, l'opération amorcée par Mme Sandberg suscite des levers de boucliers. Ses détracteurs lui opposent, entre autres, qu'«il est facile pour une femme riche et puissante de bien combiner vie professionnelle et personnelle», à l'image de ce que lui reproche Heidi Hartmann, directrice de l'institut de recherche Women's Policy Research. Des reproches balayés du revers de la main par ses défenseurs, considérant qu'il ne s'agit là que de «critiques envers sa personne, et non de ses idées», et donc de «critiques non recevables», d'après Alexandra Chang, chroniqueuse du magazine Wired.
(Avec AFP.)