Pierre Morency, pdg de Nova Envirocom, a troqué le militantisme pour l'entrepreneuriat. " J'avais fait le tour du jardin. J'avais le sentiment que cela n'avançait pas assez, surtout quand je voyais que les idées développées par d'autres étaient reprises par des entreprises privées ou des municipalités ", dit celui qui a introduit les produits en plastique biodégradable au Québec il y a près de 10 ans.
Militant très actif dans les années 1980-1990, Pierre Morency a fondé le Regroupement national des conseils régionaux en environnement. En 1995, il passe à une autre étape. Il devient grossiste en produits environnementaux et formateur en environnement. Il prépare le premier programme officiel de compostage domestique, dont il vient de vendre les droits de transfert en France. Après les premiers sacs en plastique entièrement compostable lancés en 2003, il propose les ustensiles et la vaisselle compostables en 2007.
Le succès de la mise en marché de ces innovations a toutefois nécessité un vrai travail d'éducation sur les plans politique, réglementaire, technologique et normatif. Son expérience de militant lui a alors été très utile. " Il a fallu faire le même travail qu'un écologiste, c'est-à-dire vulgariser et sensibiliser ceux qui prennent les décisions, préparer un discours et des réponses pour justifier l'objectif de prendre un virage. Comme chef d'entreprise, j'ai utilisé la même approche qu'à l'époque de mon engagement écolo ", poursuit M. Morency.
De la maîtrise à la coopérative
" Au départ, je n'avais pas l'intention de démarrer une entreprise. C'est plutôt la cause du transport collectif qui me motivait ", affirme Benoît Robert, pdg du service d'auto-partage Communauto. C'est avec l'idée d'en faire un projet pilote pour sa maîtrise qu'il lance le service en 1994 à Québec, puis l'année suivante à Montréal. Il opte pour la formule coopérative.
Rapidement, cette formule ne lui convient plus : il veut avoir les coudées franches pour la suite de choses. " Je m'investissais beaucoup plus que ce que j'avais prévu. Je portais tout sur mes épaules, mais rien de cela ne m'appartenait ", soutient le diplômé en biologie et en aménagement du territoire et développement régional.
M. Robert a toujours voulu positionner son entreprise comme un service d'utilité publique. Il a cherché à la faire croître afin de jouer un rôle dans la société.
Son objectif ultime : changer la façon de bâtir les villes et stimuler l'offre de mobilité pour les gens qui n'ont pas de véhicule, de manière à faciliter la décision de se passer de voiture.
" Si on veut réduire de façon importante les émanations polluantes des automobiles, influer sur la qualité de vie et sur le projet urbanistique, on n'a pas d'autre choix ", explique M. Robert.
Faire face au scepticisme
Vocation écologique et objectifs commerciaux ne vont pas toujours de pair. " Il faut convaincre nos alliés de jadis qu'on n'a pas changé, mais qu'on a pris des chemins différents pour arriver au même objectif. Les premières années, on est quasiment renié parce qu'on est devenu un ''chef d'entreprise mercantile'' ", confie Pierre Morency, de Nova. " Il faut du temps avant que les anciens partenaires constatent que cela fournit des leviers plus intéressants pour atteindre nos objectifs. "
Les premières années, Benoît Robert a fait face au scepticisme des groupes environnementaux qui ne comprenaient pas comment Communauto pouvait être une entreprise à vocation environnementale, tout en rendant la voiture plus disponible.
Les débuts en affaires de ces hommes qui ont su concilier entrepreneuriat et valeurs personnelles n'ont donc pas été faciles. " On est à la fois la bête noire des entreprises, parce qu'on est des écologistes en affaires, et des milieux environnementaux, qui nous considèrent comme des traîtres. Il y a un purgatoire à traverser ! " conclut M. Morency.