Le ministère des Transports a dû retirer une autre poutre qui semblait instable à l'entrée du tunnel Ville-Marie, au centre-ville de Montréal, où une poutre s'était déjà effondrée dimanche matin, entraînant avec elle un écran de béton de plusieurs tonnes.
La poutre instable a été retirée par une grue, dans la nuit de dimanche à lundi, a révélé Caroline Larose, porte-parole du ministère des Transports, au cours d'un point de presse, lundi, pour faire le point sur la situation.
Alors que l'enquête sur les causes de l'effondrement de dimanche matin débutait, les ingénieurs s'affairaient lundi à trouver le meilleur moyen pour stabiliser une troisième poutre, a-t-elle ajouté.
Le ministère tente aussi de trouver un passage sécuritaire dans la structure pour pousser plus loin les travaux et l'inspection.
Le ministère a mandaté deux ingénieurs indépendants pour épauler ses propres ingénieurs. Ce seront donc deux ingénieurs spécialisés de l'École de technologie supérieure et de l'École polytechnique de Montréal qui prêteront main forte aux deux ingénieurs du ministère des Transports.
"La prochaine étape, c'est de laisser toute la latitude aux ingénieurs pour faire leur travail. C'est eux qui vont déterminer les prochaines étapes à suivre, le type d'inspection qu'ils ont besoin de faire, la durée de la fermeture et les prochaines interventions", a résumé Mme Larose.
Ce sont eux, notamment, qui détermineront à quel moment les énormes pièces de béton seront retirées de la chaussée de l'autoroute 720 direction est. Il s'agit de paralumes, des pièces de béton ajourées comme pour former un grillage, de manière à atténuer la lumière vive lorsqu'un conducteur sort du tunnel.
Mme Larose a précisé que cette section du tunnel avait été inspectée de façon complète en 2008 et qu'elle avait subi une inspection annuelle en 2010.
Du côté de la Sûreté du Québec, la porte-parole Geneviève Bruneau a confirmé que le corps policier enquêtait séparément sur l'effondrement, ses causes et ses circonstances.
"La majorité de l'enquête est déjà bien entamée. Les gens qui devaient être rencontrés directement ou indirectement, pour la plupart, ont déjà été rencontrés. L'enquête se poursuit; nos enquêteurs sont là pour reconstituer l'événement dans son ensemble à partir du début", a précisé Mme Bruneau, sur place.
Mme Bruneau n'a pas voulu parler de soupçon d'activité criminelle, bien qu'il y ait enquête policière sur l'effondrement. "On enquête sur les événements qui se produisent sur notre territoire, comme ça pourrait avoir lieu n'importe où. Il n'y a aucune conclusion avancée au moment où on se parle."
Réactions
De son côté, à Chibougamau, le premier ministre du Québec, Jean Charest, a lui-même exprimé son inquiétude devant l'effondrement.
"Il y a eu une inspection annuelle faite en 2010 et l'inspection annuelle a indiqué qu'il n'y avait pas de problèmes. Raison de plus d'aller creuser pour voir exactement ce qui est arrivé et pourquoi. Je ne le sais pas; personne ne le sait. Une chose est sûre: c'est inquiétant quand ça arrive", a-t-il opiné.
Par ailleurs, l'opposition péquiste a demandé au ministère des Transports de rendre publics tous les rapports sur l'état des infrastructures qui ont été réalisés afin que le public québécois sache à quoi s'en tenir.
Au cours d'un point de presse, lundi, le député péquiste responsable des dossiers de Transports, Nicolas Girard, s'est demandé si le ministère n'avait pas des choses à cacher, puisqu'il s'est jusqu'ici refusé à dévoiler ces rapports, sous prétexte qu'ils étaient souvent techniques et difficiles à comprendre.
"Visiblement, ils ont des choses à cacher. Si, comme le ministre l'a indiqué hier (dimanche), les routes et les ponts qui sont ouverts sont sécuritaires, pourquoi refuse-t-il de rendre publics les rapports d'inspection. Qu'a-t-il à cacher?" a demandé le député Girard, accompagné de son collègue Martin Lemay, député de Laurier_Sainte-Marie, qui inclut la zone touchée.
M. Girard a dénoncé la "culture du secret" et "le jeu de cache-cache" qui prévalent au ministère des Transports. "Il y a actuellement une véritable crise de confiance entre la population et le gouvernement Charest sur l'état de nos infrastructures routières."
"Le gouvernement Charest a fait preuve d'inaction dans un trop grand nombre de dossiers dans la grande région métropolitaine", a critiqué le député Girard, citant les cas de l'échangeur Turcot, en mauvais état, dont la construction devrait finalement débuter l'an prochain, et celui de la rue Notre-Dame, qui traîne toujours en longueur.
Le député Girard pense aussi qu'il manque d'ingénieurs et de ressources au ministère des Transports pour assurer l'inspection des infrastructures montréalaises, qui datent souvent des années 1960 et 1970. Le syndicat des ingénieurs du gouvernement a déjà dénoncé le fait qu'il perdait des membres au profit du secteur privé.
Mme Larose a assuré que le rapport d'inspection qui sera fait à la suite de l'effondrement sera cette fois rendu public. Les rapports d'inspection de 2008 et de 2010 sur cette section du tunnel n'ont toutefois pas été rendus publics.
L'effondrement de cette poutre et des écrans paralumes à l'entrée du tunnel Ville-Marie, survenu dimanche vers 9h10, n'a entraîné aucun décès et n'a causé aucune blessure. Les automobilistes qui circulaient à proximité ont pu s'arrêter à temps.
La Ville de Montréal a annoncé des mesures de mitigation de la circulation, la réouverture du tunnel en direction est n'étant pas imminente.
De passage à Québec pour une annonce, le ministre fédéral de l'Industrie, Christian Paradis, a dit juger "assez préoccupant" l'écrasement de blocs de béton.
ll a dit que le gouvernement fédéral avait prévu dans son budget 2011 des sommes destinées aux infrastructures, et que le Québec pourrait éventuellement s'en prévaloir pour mettre à niveau ce type d'équipement routier.
"On a démontré notre volonté dans notre budget 2011. Il faut s'asseoir ensemble et il faut se parler pour voir ce qu'on fait pour le moyen et le long terme, une fois qu'on a mis des investissements massifs accélérés avec lesquels les priorités venaient des provinces", a indiqué le lieutenant politique du premier ministre Stephen Harper au Québec, en conférence de presse, lundi.
M. Paradis était à Québec pour annoncer un projet de règlement visant à éliminer les pourriels du secteur industriel et commercial. Les contrevenants devront payer des amendes lorsqu'ils envoient des messages électroniques commerciaux non sollicités, ou encore des messages trompeurs, notamment en vue de voler des renseignements personnels.