Le Canada doit en faire plus pour favoriser le développement du transport par bateau, a plaidé lundi la grande patronne du Groupe maritime Verreault, Denise Verreault.
Dans une allocution prononcée à la tribune du Cercle canadien de Montréal, Mme Verreault a déploré que la marine marchande du pays n'occupe plus que le 36e rang mondial, derrière la Sierra Leone et la Géorgie, mais devant la France et l'Espagne.
"La majorité des navires enregistrés au Canada ne naviguent jamais hors des eaux intérieures du pays, a-t-elle souligné. (...) Quel triste sort pour un pays entouré de trois océans!"
Huitième exportateur du monde, le Canada fait transporter sur des bateaux étrangers la plus grande partie de ses biens destinés à l'extérieur de l'Amérique du Nord.
La dirigeante estime qu'Ottawa devrait mettre en place de nouveaux incitatifs fiscaux pour encourager la possession, la construction et la réparation de navires au Canada. Elle refuse toutefois de chiffrer ces mesures.
"Ce n'est pas tant ce que ça coûterait que ce que ça rapporterait en termes d'emplois, d'économies dans les budgets d'entretien des routes et de pollution", a-t-elle illustré.
Denise Verreault a donné l'exemple de la barge Alouette Spirit qui, depuis six ans, transporte 90 pour cent de la production de l'aluminerie Alouette de Sept-Îles. Elle a permis d'éviter pas moins de 100 000 voyages de camions lourds sur la route 138, ce qui a fait économiser quelque 600 000 $ en entretien à Transports Québec.
Le transport maritime est à la fois plus écologique et plus économique que les autres modes de transport, a rappelé Mme Verreault. Ainsi, transporter une tonne de marchandise par la mer émet jusqu'à 10 fois moins de gaz à effet de serre que par la route.
La pdg souhaiterait en fait que les gouvernements apportent la même attention à l'industrie maritime qu'au secteur aéronautique.
"Une frégate canadienne a plus de technologie qu'un Boeing 747, a-t-elle lancé. Un bateau, ce n'est pas un dinosaure!"
Davie
En point de presse, Denise Verreault a par ailleurs dénoncé que des chantiers maritimes concurrents du sien bénéficient de soutiens gouvernementaux. Elle a notamment évoqué le cas de la Davie, à Lévis, qui a reçu pas moins de 600 millions $ de Québec au fil des ans et qui s'apprête à être vendue à Fincantieri, une société d'État italienne.
"Ç'a l'air d'être un cycle lavage-rinçage, lavage-rinçage..." a-t-elle lâché pour décrire les innombrables tentatives de relance du chantier de la Rive-Sud de Québec.
Mme Verreault presse Ottawa de réunir en quelques blocs les contrats de réparation de ses navires et de les partager entre différents chantiers à travers le pays. De cette façon, chaque entreprise saurait à quoi s'en tenir pendant un certain temps.
Elle a relevé que les deux chantiers à qui le gouvernement confiera la construction des nouveaux navires militaires seront également chargés de leur entretien pendant plusieurs années. Forts de ces contrats, ils pourraient être en mesure de demander des prix moins élevés pour d'autres travaux de réparation et ainsi faire une concurrence déloyale aux chantiers qui n'auront pas mis la main sur la manne, estime Mme Verreault.
Situés aux Méchins, en Gaspésie, les chantiers Verreault emploient entre 100 et 200 personnes selon les périodes. Les affaires de l'entreprise vont bien: son carnet de commandes est fort bien garni, du moins pour l'instant.