TORONTO- Les administrateurs de SNC-Lavalin ont songé à ne pas accorder l'indemnité de départ de 4,9 millions de dollars (M$) à son ancien patron Pierre Duhaime, mais ont finalement décidé qu'il était dans le meilleur intérêt de l'entreprise de la lui accorder.
"Il a été demandé à monsieur Duhaime de remettre sa démission à titre d'administrateur, de chef de la direction et de président. Mais il demeurait alors toujours un employé et son contrat comportait des clauses qui prévoyaient la majorité du montant qui lui a été versé. Nous nous sommes demandés s'il devait être congédié et, après considération, en sommes venus à la conclusion qu'il était dans le meilleur intérêt de la compagnie de ne pas contester son contrat", a indiqué en conférence de presse le président du conseil d'administration de SNC-Lavalin, Gwyn Morgan.
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Pierre Duhaime a approuvé les paiements inexpliqués de 56 M$ qui font aujourd'hui que l'entreprise est dans la tourmente.
Interrogé sur les explications qu'avait fournies monsieur Duhaime quant à ses motivations, les dirigeants de SNC se sont cependant montrés beaucoup plus laconiques.
"Le rapport d'enquête citait un certain nombre de facteurs. Il a été interrogé. Nous n'avons pas divulgué ce qu'il a dit et pour être honnête, nous ne planifions pas le faire, ni spéculer sur ce qu'il avait ou n'avait pas à l'esprit. Quand vous avez un contrat, vous avez l'option de le respecter ou de le contester. On a choisi d'agir dans le meilleur intérêt de l'entreprise", a indiqué l'administrateur Ian Bourne, aujourd'hui également chef de la direction intérimaire.
Les remarques des administrateurs surviennent au lendemain d'une lettre expédiée à SNC par la Caisse de dépôt et placement du Québec, lettre dans laquelle elle indiquait avoir voté en faveur de toutes les propositions, y compris celle sur la rémunération, mais éprouvé un malaise "sur les montants consentis à des membres de la haute direction alors que des enquêtes et procédures juridiques sont toujours en cours."
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D'autres interrogations
Peu interrogés par les actionnaires présents à Toronto, messieurs Morgan et Bourne ont dû faire face à un feu nourri de questions de la part des journalistes.
Notamment quant à une lettre anonyme reçue en décembre de la part d'employés indiquant que « Riadh Ben Aïssa avait organisé pour plus de 300 millions de dollars de paiements à des sociétés-écrans qui agissaient comme intermédiaires entre SNC-Lavalin et le régime de Khadafi en Lybie. »
Gwyn Morgan a indiqué qu'il avait reçu la lettre, y avoir porté attention, mais a reconnu que cette attention était de "celle que l'on porte à une lettre anonyme". C'est un peu plus tard, lorsque les problèmes de comptabilité se sont présentés que le conseil a décidé d'initier une enquête.
Monsieur Morgan s'est défendu d'avoir fait preuve de laxisme. Aux critiques de Stephen Jarislowsky, dont la firme détient 14% du capital de SNC, et qui reproche au conseil de ne pas avoir suffisamment surveillé les activités de l'entreprise, il a plutôt répliqué que dès les premiers moments où il avait eu vent que quelque chose ne fonctionnait pas, le conseil avait réagi. La firme a même été proactive avec les autorités policières et un de ses procureurs les a visitées le 26 mars, après que l'enquête maison eut été conclue.
Dans une récente analyse du dossier, la firme Veritas fait remarquer que huit employés ont eu un rôle dans les paiements inexpliqués de 56 M$, dont le président la division International, Michael Novak. Gwyn Morgan a soutenu que l'enquête avait permis de révéler ceux qui s'étaient conduits incorrectement. Seuls Riadh Ben Aïssa, ancien vice-président construction de l'entreprise, et le contrôleur de division Stéphane Roy ont été remerciés depuis l'éclatement de l'affaire. Il a justifié le maintient en emploi du chef de la direction financière, Gilles Laramée, par le fait que celui-ci avait avisé Pierre Duhaime de l'irrégularité d'un premier paiement et qu'il croyait qu'il était du rôle de monsieur Duhaime de le rapporter au conseil. Monsieur Laramée a refusé d'approuver le second paiement de 33 M$, tout comme Michael Novak.
Le prochain chef de direction parlera français
En assemblée, le président du conseil a fait savoir que la société était à l'œuvre pour recruter un nouveau chef de direction et a dit souhaiter pouvoir en recruter un le plus rapidement possible.
Il a précisé que la recherche était d'envergure internationale, et que le seul critère actuellement établi était qu'il parle les deux langues officielles du pays.