Les procédures pleuvent contre SNC-Lavalin, ses dirigeants et ses administrateurs. Le cabinet Siskinds vient de déposer mercredi un troisième recours collectif de 400 millions de dollars en Ontario. Il suit de près celui que Rochon Genova LLP a déposé le même jour, d’un montant de 1,5 milliard, qui regroupe des investisseurs de l’extérieur du Québec.
En mars, Siskinds a aussi déposé un recours de 250 millions à Québec, pour représenter des investisseurs individuels. Le cabinet en a maintenant déposé un autre pour le compte du fonds de pension du Drywall Acoustic Lathing and Insulation, Local 675, un syndicat d'un métier de la construction ontarien. Le fonds de pension gère pour 256 millions de dollars d'actifs et détenait 17 350 actions de SNC-Lavalin pendant la période visée par le recours, du 6 novembre 2009 au 27 février 2012.
La procédure vise à inclure les investisseurs institutionnels, ce qui serait impossible au Québec, assure Dimitri Lascaris, l’avocat chez Siskinds responsable de la poursuite. «En vertu du Code civil, une entité employant plus de 50 personnes ne peut pas participer à un recours collectif», dit-il.
Le hic pour le cabinet, c'est que les recours ontariens de Siskinds et de Rochon Genova visent les mêmes défendants: des investisseurs individuels et institutionnels. «Tôt ou tard, il sera nécessaire pour la cour de choisir l'un ou l'autre des représentants», dit Dimitri Lascaris.
Le plus grand actionnaire de SNC-Lavalin, Jarislowski Fraser, qui contrôle 14 % de l’entreprise, a confié à LesAffaires.com qu’il ne comptait pas s’inscrire comme partie à un tel recours. «Des voyous se sont emparés de projets de SNC-Lavalin pour faire leur carrière, dit Stephen Jarislowski, président. Maintenant, il y a des avocats qui veulent en tirer profit. Mais on se retrouvera à payer les gens ayant subi des dommages avec leur propre argent…»
Deuxième plus grande actionnaire de l’entreprise avec presque 6 % des parts aux dernières nouvelles, la Caisse de dépôt et placement du Québec n’a pas pu commenter l’information avant la mise en ligne de ce texte.
Recours de Rochon Genova
La deuxième procédure, lancée aujourd’hui par Rochon Genova, regroupe des investisseurs non québécois et couvre la période du 1er février 2007 au 28 février 2012. Elle a comme requérant principal un investisseur individuel, Brent Gray, qui détenait 600 actions de SNC-Lavalin pendant la période visée par le recours. Mais elle pourrait également inclure de grandes sociétés financières, assure l’avocat John Archibald, du cabinet Rochon Genova. «Les investisseurs institutionnels entreraient dans la définition de nos requérants, donc ils sont également inclus», écrit-il dans un courriel à LesAffaires.com.
Le document allègue que la société montréalaise de génie conseil a violé les lois sur les valeurs mobilières en affirmant faussement qu'elle avait des procédures et des systèmes de contrôle adéquats en matière de divulgation et d'information financière.
La requête fait suite à des paiements allégués de SNC-Lavalin à des membres, des associés et des agents du régime de Mouhammar Kadhafi pour obtenir ou conserver des contrats d'infrastructures en Libye. Ces affirmations n'ont pas été prouvées en cour.
Le communiqué du cabinet Rochon Genova mentionne que le titre a perdu 20 % le 28 février 2012, soit une perte de valeur de 1,5 milliard. «Cette chute brutale a suivi un communiqué dans lequel SNC-Lavalin révélait que son comité directeur avait lancé une enquête sur 35 millions de dollars de paiements non documentés. L'enquête a ensuite déterminé que la compagnie avait fait pour 56 millions de paiements irréguliers à des agents commerciaux étrangers et que ces paiements avaient été autorisés par l'ancien pdg de l'entreprise, Pierre Duhaime.»
L'ex dirigeant a quitté l'entreprise après ces déclarations et a été remplacé par Ian Bourne, de façon intérimaire.
«Quand une compagnie insiste à répétition sur ses solides pratiques de bonne gouvernance auprès des investisseurs, des révélations sur de sérieuses infractions causent des dommages à la réputation de la compagnie et, conséquemment, un tort substantiel aux investisseurs», écrit John Archibald dans le communiqué du cabinet.
SNC-Lavalin n'a pas rappelé LesAffaires.com. La vice-présidente aux communications Leslie Quinton s'est contentée de répondre à nos questions dans un courriel laconique: «Nous croyons fermement que les allégations sont non-fondées [sic] et nous nous défendrons énergiquement contre celles-ci.»
Procédure amendée à Québec
L’autre cabinet qui poursuit SNC-Lavalin en Ontario et au Québec, Siskinds, compte en outre amender son recours de Québec déposé en mars pour ajouter «d’autres requérants». «Il y aura aussi un nouveau défendeur et de nouveaux détails», dit Dimitri Lascaris.
L’Ontarien Glenn Winder, requérant principal dans ce recours, reproche à SNC-Lavalin d'avoir menti aux investisseurs en affirmant à répétition qu'elle se conformait au droit international et aux règles d'éthique dans ses négociations de contrats.
D’un montant de 250 millions, le recours de Québec vise à représenter les investisseurs individuels de l’entreprise.
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